La Bretagne ou le refus de la politique

Chronique publié le 26/02/23 18:34 dans Politique par Yvon Ollivier pour Yvon Ollivier
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drapeau breton

Souvent je me suis demandé pour quelles raisons nous restions bloqués en Bretagne sur le chemin de l’émancipation. Fallait-il l’imputer à nos élus dépendants des partis parisiens et donc peu concernés par l’évolution de notre péninsule ? Les Bretons avaient-ils vraiment trouvé leur bonheur au sein du système jacobin ?

Je crois à présent que, si rien n’avance, c’est à cause du refus de la politique conçue comme mouvement vers l’émancipation. Mais qu’est-ce que la politique si ce n’est la force d’affronter les vrais problèmes qui se posent à la société ? Or aujourd’hui, même nos grands élus fuient la politique.

Alors que le vœu voté en avril 2022 par le Conseil régional avait tracé un sillon, son président Loig Chesnais-Girard annonce l’été suivant qu’il ne veut plus d’autonomie législative, la seule qui vaille. Il est rejoint par les vieux défenseurs du système qui n’accorde aucune liberté à la Bretagne.

Le budget dévolu par la Région à la langue bretonne est en baisse pour 2023 ! L’Etat ne respecte pas ses engagements souscrits dans le cadre de la Convention spécifique sur les langues et Loïg Chesnais-Girard ne dit rien. Comment peut-on mener une telle politique sans taper du poing sur la table et exiger l’autonomie budgétaire et fiscale ?

La Bretagne historique pèse 65 milliards de prélèvements obligatoires. De combien profite-t-elle en retour ?

La vie conforme et maintenue dans le corset légalement imposé à la Région et le refus de l’émancipation, signent un refus magistral de la politique.

Pour donner le change, le pouvoir régional palabre. Ce 9 mars , un forum celte est organisé par la région réservant une demi-heure à la société civile pour s’exprimer sur la question de l’autonomie.

Malgré la demande d’entretien avec le groupe de travail en charge de l’autonomie piloté par le vice-Président Quernez, le collectif Bretagne majeure, qui a longuement réfléchi à ces questions, n’a toujours pas été reçu. Rien ne dit qu’il le sera.

Faut-il être optimiste au sujet des travaux de ce groupe de travail en l’absence de volonté politique susceptible de révolutionner un système viscéralement centralisateur ? En la matière, il n’est pas demi-mesure. C’est le dogme de l’indivisibilité de la souveraineté de la nation française qu’il faut remettre en cause, pour opérer le grand basculement vers le partage du Pouvoir et décider enfin des choses qui ne concernent que nous.

Si les Bretons ont connu la résilience culturelle avec le renouveau des années 70, ils se refusent toujours à la politique. La résilience politique ne semble pas d’actualité. Tout le démontre. La propension des partis régionalistes à s’allier avec les formations politiques parisiennes n’a d’autre effet que de maintenir le système en lui accordant une caution bretonne bon marché. Rien n’avance depuis si longtemps.

Et pendant ce temps, nos langues se meurent, notre maritimité s’efface et notre société s’ouvre au tourisme de masse qui prive de logement nos jeunes.

Notre résilience culturelle ne serait-elle pas détournée de sa vocation en l’absence de résilience politique ? La culture sans la résilience politique conduit à la « folklorisation ». Que faisons-nous de notre culture sinon l’offrir en pâture l’été venu au vaste cirque touristique ?

Les représentants de nos associations culturelles bretonnes seraient sous la dépendance de la région bretagne ? Après les acquis de la charte culturelle de 1978, n’ont-ils pas accepté, à la demande de Jean Yves Le Drian, de saborder le Conseil culturel issu de cette Charte et représentatif du dynamisme de nos cinq départements, pour en faire une instance consultative incorporée à la région ?

De force d’opposition, le mouvement breton semble devenu force d’appoint au service du pouvoir régional. N’est-ce pas un refus magistral de la politique ? Depuis, nous n’avons cessé de reculer et les promesses issues du revival ont fait long feu. Le mouvement breton semble s’être évanoui dans la nature.

Pour sortir du danger de la folklorisation qui menace, nos associations culturelles pourraient retrouver le chemin de la politique. Il leur suffirait de décréter, qu’après avoir mûrement réfléchi, dès le 21 juin 2023, plus aucun bagad, plus aucun cercle, plus aucun pardon ne réjouira les touristes. Plus de festoù-noz, rien. Silence complet jusqu’au moment où nous aurons l’assurance de la mise en œuvre d’une véritable politique linguistique et d’un projet fort pour l’autonomie.

La région qui dort se réveillerait en sursaut. Notre vieux peuple breton trouverait le chemin de la résilience politique et de la prise en charge des principaux problèmes qu’il rencontre. Yvonig Gicquel , négociateur de la charte culturelle de 1978, n’avait pas fait autrement pour amener le Pouvoir à la table de la discussion. Les cercles et bagadoù avaient refusé de célébrer la venue en Bretagne du Président Giscard d’Estaing !

Et si nous retrouvions le sens de la politique ?

Yvon Ollivier

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Vos commentaires :
Mercredi 1 mai 2024
Le mouvement breton prend le problème à l'envers .(selon moi)

pour voter Breton, il faut des ....Bretons .
Or le mouvement breton a abandonné l'éducation populaire bretonne et a tout laissé aux écoles bilingues .

or ces écoles touchent 10 % des éleves (au mieux) et de plus elles n'apprennent que la langue pas du tout la culture bretonne dans son ensemble .
je ne parle même pas des cercles celtiques et bagadou qui ont abandonné cette éducation populaire depuis longtemps .

on ne peut pas faire voter Breton à des ....Français ....
et il faut être réaliste les Bretons sont de bons français et le coté breton n'est plus qu'une aimable appartenance régionale (et sur B4 en plus)

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