La talentueuse chanteuse bretonne sort un nouvel album, son 7e, « Immram » le 7 mai prochain. Cette artiste, qui parle et chante en breton depuis sa plus tendre enfance, est une perle rare. Sa poésie contemporaine est précieuse pour faire vivre notre langue, voire notre culture.
Habituée des festivals bretons, Gwennyn est aussi devenue au fil des albums et des concerts, une ambassadrice de la Bretagne. Elle s’est produite dans une vingtaine de pays de Singapour au Brésil en passant par le Vietnam, la Belgique, l’Espagne, l’Autriche ou la Suisse. Elle s'est produite lors de 150 concerts en Allemagne. Le public aime son authenticité, sa créativité, son indépendance. Des qualités qui s’ajoutent à son plaisir de monter sur scène.
Un Immram est un mot gaélique qui signifie « voyage ». C’est aussi un genre de contes de la mythologie celtique irlandaise qui narre le séjour d’un héros dans l’Autre Monde des Celtes. Un des plus célèbres est le « séjour merveilleux de Bran » sur « L’île aux femmes ».
Ce nouvel album parle certainement de voyages et de libertés, mais aussi des femmes, de l’île de son monde féminin qu’elle veut partager et que nous devons retrouver comme un paradis perdu dans ce contexte de crise sanitaire, de destruction de la biodiversité et de la déplétion des ressources naturelles.
La musique est à nouveau créée ou coordonnée par son fidèle compagnon, le très professionnel guitariste Patrice Marzin et ses autres musiciens habituels comme le talentueux Kevin Camus au uillean pipe, Manu Leroy à la basse et Yvon Molard à la batterie, ainsi que d’autres venus pour l’enregistrement. L’album a été fignolé. On l’écoute avec plaisir.
Le premier morceau Me ivez est plus ou moins autobiographique. Gwennyn parle de ses rêves de jeunesse, des déceptions et de ce qui émergea pour elle : sa liberté de femme. La musique contemporaine et rythmée de ce premier morceau est tout le contraire d’une gwerz.
Le deuxième morceau est, quant à lui, une gwerz, une reprise (il n’y a que deux traditionnels) d’un cantique breton Me gav hir an amzer (Je trouve le temps long). Ce cantique est une prière poignante à l’image de la foi de nos Anciens.
War an Hent (Sur la route) enregistrée avec le Bagad de Lann-Bihoué est une vibrante chanson pour la langue bretonne. Elle y parle de la Redadeg, cette course-relais qui lève des fonds pour la langue bretonne et qui aura lieu en mai prochain. Cette chanson tombe à propos avec l’adoption par le Parlement à Paris de la loi Molac sur l’enseignement des langues régionales.
Avel ar c’hemm ‘vez o c’hwezhañ. Dre heñchoù Breizh. Hir, hir-mat an hent. Labour divent hon eus c’hoazh. Le vent du changement souffle sur les routes de Bretagne. Long, long est le chemin. Un travail immense nous attend.
Fille du vent Un poème magnifique sur la liberté.
Deuit ‘ta (venez). Une chanson à tous ceux qui arrivent en Bretagne pour y chercher un air plus pur et des racines plus profondes.
Mamm-douar (terre-mère). Dans presque toutes les cultures anciennes, la terre est une déesse, une divinité féminine, une Mother-earth des Améridiens. Mamm-douar est un appel aux femmes « révolutionnaires » car elles seules peuvent sauver la terre. « Tout autour de la terre, une bataille gronde ». Ici on se croit vraiment dans les anciens textes mythologiques gaéliques ou grecs, témoins de batailles gigantesques de dieux aux prises avec le destin des humains. La survie ou la disparition de notre espèce humaine va effectivement se jouer durant ce siècle. Les enjeux sont gigantesques.
Kimiad est une reprise d’une gwerz produite et arrangée par Alan Stivell. A l’origine Kimiad ar soudard yaouank (« L'adieu du jeune soldat ») est une chanson bretonne de Prosper Proux (milieu du XIXe siècle).
Les autres nouvelles chansons Mizioù du ou Bleunioù pop-up sont toutes aussi belles. Gwennyn est une sacrée poétesse dans la pure tradition bardique, une grande prêtresse animée par les mythes et les légendes de l’ancienne Celtie.
■