À BERNARD GENSAC, frère en humanité

Bernard Gensac nous a quittés. Homme sensible et généreux, amoureux fou de la vie, de la poésie comme de la musique, père de trois filles - Frédérique, Sarah et Manuelle - professeur de Français à Pont-l’Abbé puis à Concarneau, il a créé avec sa femme Martine Gensac, ses amis, Michèle Ebenmoussi, Jean Dollé, Pierre Dubois, François Hetz, Gilles Pelletier, une compagnie originale : La compagnie Passeparole bien connue en Pays Bigouden.

Lire et faire passer la poésie en toute simplicité, avec élégance et joie de partager ce moment comme une parenthèse dans nos vies trépidantes. Pendant des années cette Compagnie, discrète, a su rassembler autour d'elle un public large et fidèle. Animée d'une passion pour les textes et la poésie elle proposait, chaque année, ses nouvelles créations. Un travail collectif, animé par Bernard Gensac, autour d'un poète choisi. Une heure avec... : des lectures de poèmes, accompagnés de musiques variées. Un enchantement. Un transport vers Le chant des hommes.

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Le poète turc Nazim Hikmet 1901 -1963 a écrit ce texte fondateur en 1960 :

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«Le chant des hommes

Les chants des hommes

Sont plus beaux qu’eux-mêmes

Plus lourds d’espoir

Plus tristes

Plus durables

Plus que les hommes

J’ai aimé leurs chants

j’ai pu vivre sans les hommes

jamais sans les chants

Il m’est arrivé d’être infidèle

A ma bien-aimée

Jamais aux chants que j’ai chantés pour elle

Jamais non plus les chants ne m’ont trompé

Quel que soit leur langage

J’ai toujours compris tous les chants

Rien en ce monde

De tout ce que j’ai pu boire et manger

De tous les pays où j’ai voyagé

De tout ce que j’ai pu voir et apprendre

De tout ce que j’ai pu chercher et comprendre

Rien, rien

Ne m’a jamais rendu aussi heureux

Que les chants

Les chants des hommes»

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Une Cie qui a su nous emmener à la découverte des poètes Apollinaire, Rimbaud, Senghor, Neruda... Nous révéler, grâce à l’engagement de tous, la puissance des poètes. Et ce n’est pas rien dans ce monde qui inlassablement cherche de nouveaux repères, demande à ressentir la vie différemment.

Ces liens créés au fil des jours ont permis plus que tout de de faciliter l'accès à la poésie sous toutes ses formes et de l'accompagner, pour le meilleur.

Bernard Gensac aimait particulièrement Xavier Grall, dont il dirait, sans nul doute, encore aujourd’hui «J'aime le tempérament exalté et romanesque de Grall».

Pour célébrer Bernard Gensac, je terminerai avec ce poème de Xavier Grall dont j’ai toujours en mémoire la lecture vibrante de Bernard Gensac.

Que cette nouvelle vie qui l’accueille, au-delà de nos mondes, lui soit, à l’infini, un chant merveilleux.

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«Seigneur Dieu

A mes frères et amis

Aux femmes que j’ai aimées

A tous ceux que mon cœur à croisés

Avant que d’entrer dans les ténèbres

Transmettez je vous prie mon espérance testamentaire

Nul chant nul solo

Nulle symphonie nul concerto

Qui porte nostalgie d’amour

Et soif et faim de tendresse

Ne sera perdu dans la détresse de lamer

Voilà et puis encore ceci

Par la dernière larme

Par l’ultime halètement

Par le dernier frémissement

Par le moineau qui s’envole

Par le geai sur la branche

Par la dernière chanson

Par la joie dans la grange

Par le vent qui se lève

Par le matin qui vient

Tout simplement

Je vous rends grâce

D’avoir été dans le bondissement incroyable

De votre création

Et misérable

Oui

Tout simplement

Un être humain

Parmi les milliards et les milliards

De vos créatures

A présent que les feuilles et les mains

De douce Nature

Me closent les yeux !

Mais Seigneur Dieu

Comme la vie était jolie

En ma Bretagne bleue !»

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Solo et autres poèmes,

Editions Calligrammes, 29000 Quimper 1981