Bretons d’Ailleurs… histoires & racines avec Alain Kerloc'h à Belfast

Chronique publié le 22/01/21 16:24 dans Bretons d’Ailleurs par Marie Anne Page pour Marie Anne Page
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Alain Kerloc'h, "Breton-Irlandais", copropriétaire de OX Restaurant à Belfast.

41° 53′ 41″ N, 12° 28′ 14″ E : à la rencontre du Quimpérois Alain Kerloc’h, sommelier et copropriétaire de « OX Restaurant » à Belfast.

Avec son associé irlandais Stephen Toman, ils ont fait de cette adresse l’une des plus belles du pays et dont la reconnaissance va bien au-delà des frontières. Etoilés Michelin en 2015 -deux années après leur ouverture-, la liste des récompenses, des « Best » obtenus est effarante, on ne compte plus les prix en Chef de l’année pour l’irlandais Stephen, de Maître d’hôtel de l’année ou de la plus belle carte des vins pour le breton Alain.

L’un de leurs secrets ?

Savoir conjuguer avec leur équipe, le sens de l’ouverture et la simplicité : un mode de management revendiqué par ces deux professionnels, dont l’amitié s’est construite lorsque tous deux travaillaient chez le Breton et triple étoilé Alain Passard (restaurant l’Arpège, Paris).

Mais, pourquoi s’être installé en Irlande du Nord et Belfast ?

D’un côté, Stephen (on l'appelle plutôt Stevie) : voulant retrouver ses racines et sa ville natale, il rejoint Belfast. De l’autre, Alain : tombé amoureux de Laura, belle Irlandaise aux yeux bleus, il l’épouse et part s’installer… à Belfast ! Et voilà comment le destin réunit à nouveau les deux complices, qui décident de créer leur propre restaurant. Ce sera «OX», en 2013.

Avec l’amour de Laura, l’esprit du pays d’accueil…

Des années et quatre enfants plus tard (Lucas, Noah, Jude et Mathieu, que des garçons !), Alain se sent toujours aussi bien en terre irlandaise, avec laquelle sa «bretonnitude» est en parfaite harmonie. « Je me sens bien ici et n’ai jamais été traité comme un étranger. La mentalité des gens est très similaire à la nôtre. Ce qui est prioritaire est la famille, d’en être proche, le bonheur que cela apporte, avec l’amitié. Le côté financier est secondaire.»

«Un autre trait commun entre les Bretons et les Irlandais : on reste simple, on ne se prend pas au sérieux, on écoute les personnes, car tout le monde est intéressant quelle que soit la profession. C’est ce que nous transmettons à nos enfants : respecter tout le monde, savoir écouter et apprendre à être curieux.»

Il y a aussi les paysages, les côtes, une météorologie un peu capricieuse, le goût du beurre, du lait, la musique traditionnelle, le plaisir de raconter des histoires…

Les anciennes et grandes vagues d’expatriation (les Irlandais partis dans des pays anglophones et surtout l’Amérique du Nord, les Bretons eux, un peu partout. Le côté bosseur aussi «oui, mais ils sont comme nous, ils n’ aiment pas faire le travail des autres, (ceux qui sont fainéants !!), ils aiment la justice.»

Cuisine ou carte des vins, on évolue dans un espace de liberté

Un grand héritage gastronomique, tel celui de notre «capitale des Gaules» pour donner un exemple, peut se montrer écrasant parfois, difficile à surpasser, à « réinventer » pour dire un mot à la mode.

En Irlande, les chefs vivent une approche décomplexée de la gastronomie, une sorte de «page blanche» originelle, ce qui a fait naître une belle quantité de tables formidables, aux cuisines exquises (la Bretagne et ses chefs évoluent aussi dans cet esprit). Attention, la qualité des produits, les saveurs ou le plaisir d’être à table ne sont aucunement remis en question ! Irlandais et Bretons savent faire et très bien. Nous parlons d’avoir à gérer l’histoire et la réputation d’une grande cuisine.

« Oui, il y a une énergie positive. Le fait d’être ″neutres″ donne moins de règles et plus de liberté, avec des chefs créatifs qui ont fait leur école en France (comme Stevie à l’Arpège). Ils sont très proches des producteurs et leur demandent de planter un légume ou une herbe. Ça fait évoluer tout le monde.»

Un sens de l’ouverture qui se retrouve en œnologie : pas de pression, pas de frontières à préserver, la carte des vins affiche des références du monde entier. En revanche, évolution de climat aidant, après le whisky, le gin, les bières... le futur nous réserve qui sait d’autres surprises, comme des orangers, des vignobles sur le sol irlandais (et breton !).

Le bonheur d’exercer le métier de sommelier

Faire le travail que l’on aime rend heureux : ce message enseigné à Alain par son père et ses oncles, il le pratique au quotidien, le partage avec son équipe, le transmet à ses enfants. Tout est possible lorsqu’on est passionné ! De ce métier qu’il adore, il souligne l’importance d’avoir des connaissances, qu’il faut lire beaucoup, et se maintenir en état d’apprentissage constant…

Mais surtout, il faut être ouvert aux autres, être à l’écoute de leurs souhaits, respecter leur palais et leur budget. «En exemple, une personne qui aime l’acide, je vais lui proposer un vin qui lui correspond. Si la personne m’annonce un budget de 50 €, je vais veiller à un montant de 45 €. C’est ce que je transmets à mon équipe, avec le sens de l’humilité.» On l’a compris. Exit le sommelier (ou la sommelière), qui affiche sa science ou une certaine arrogance, il en existe, c’est dommage. Bien faire ce métier, c’est penser au client et vouloir son plaisir. Simplicité et gentillesse peuvent parfaitement s’accorder avec professionnalisme, expertise et nombre de récompenses obtenues.

Quant aux racines natales, elles restent sous le signe de rires, de douceur… et de fruits de mer !

«Quand nous venons voir ma famille à Quimper, c’est un plaisir de se retrouver tous ensemble et longtemps à table, de manger des crêpes, et surtout des fruits de mer ! Pour Laura, son plus beau souvenir de Bretagne, c’est l’odeur des araignées de mer que préparait mon père.»

PS : « OX restaurant » est fermé pour le moment. Quand il rouvrira et si vous êtes sur Belfast…

OX Restaurant

1 Oxford St, Belfast BT1 3LA, Royaume-Uni

Tél : (00) 44 28 90 31 4121

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Vos commentaires :
Jack Le Guen
Dimanche 22 décembre 2024
Super belle photo d’une famille heureuse brito-irlandaise.

CATHERINE DELALANDE
Dimanche 22 décembre 2024
Bon à savoir pour une prochaine escale Irlandaise. Merci !

Marie Anne Page
Dimanche 22 décembre 2024
Merci à vous pour ces commentaires!

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