Metz, le folklore, du pain bénit pour les falsificateurs ?

Papier publié le 22/06/20 15:19 dans Histoire de Bretagne par Bernard Grua pour Bernard Grua
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Centre Pompidou Metz, le folklore, du pain bénit pour les falsificateurs
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« Jeunes Filles du Pouldu ». Carte postale, impression photomécanique. MUCEM/YVES INCHIERMA

En ce moment, se tient au Centre Pompidou de Metz une riche exposition intitulée «Folklore» . Elle «explore le lien entre art et anthropologie». Philippe Dagen, dans «le Monde», se livre à un surprenant raccourci. Il en présente une interprétation réductrice, négative et trompeuse, tout en trouvant un bouc émissaire, la Bretagne.

Tout est dans l'en-tête de cet article du Monde «Le folklore, du pain bénit pour la propagande nationaliste et régionaliste» (Voir l'article ). Le titre résume l'événement à une seule des nombreuses recherches exposées, tout en ignorant les intéressantes démonstrations, qui prouvent à quel point la création populaire a fécondé l'art d'aujourd'hui. Ce faisant, Philippe Dagen donne une définition infamante du terme «Folklore», que les organisateurs de l'exposition s'étaient bien gardés de déterminer. En effet, l'intention de Jean-Marie Gallais, responsable du pôle programmation du Centre Pompidou-Metz était de poser «la question de la place du folklore dans l’histoire de l’art moderne et contemporain»

La récupération du folklore par la propagande pétainiste

Pourquoi, avec cette accroche, avoir mis une photo, datée de 1915, présentant deux jeunes femmes du Pouldu, village côtier du Finistère sud, fréquenté par Gauguin. Elles n'ont rien à voir avec le titre et, bien sûr, avec le pétainisme. Se livrer à un tel rapprochement est choquant, alors que les cérémonies du 18 juin ont rappelé l'éminente place prise par les Bretons au sein des tout premiers Français qui ont refusé la capitulation. Cela paraît encore plus incongru si on se souvient que l'appel du Général de Gaulle, à la BBC, fut doublé, en breton, par Charles-Marie Guillois Est-ce que le marin, en sabot sur le monument de l'île de Sein sous la devise «Kentoc'h Mervel» (Plutôt mourir), serait aussi du folklorisme pétainiste ? Pourquoi ne pas avoir choisi, en guise d'illustration, une image d'Epinal représentant le Maréchal, un santon de Marseille à son effigie ou une assiette marquée de la francisque, dont il est question dans l'article ?

Il suffit de quelques vitrines pour rappeler combien la notion de tradition peut devenir toxique

Pourquoi occuper un tel espace dans un texte aussi court en s'acharnant sur [[René-Yves_Creston]]. Pourquoi le présenter comme un «folkloriste et dessinateur, celtomane fanatique»? Comme si Creston avait été un des créateurs de l'idéologie de la «Révolution Nationale». Comme si, à l'image d'un Président de la Ve République, il avait été décoré de la francisque. En effet, cet humaniste sociologue et artiste engagé n'a pas attendu août 1944 et la certitude d'une défaite de l'Allemagne pour adhérer, quatre ans plus tôt, aux Forces Françaises Libres ainsi qu'à l'un des premiers réseaux de résistance, celui du Musée_de_l'homme.

Cet étrange activiste, surtout connu pour ses travaux d’illustrateur

René-Yves Creston, le célèbre chef du fertile et remarquable mouvement [[Seiz_Breur]] a eu pour objectif d'apporter un nouveau souffle aux Arts Décoratifs en puisant dans la culture bretonne. «...en France (René-Yves Creston) est... un acteur marquant du passage du folklore à l’ethnologie du proche...» Bref, René Yves-Creston est une personnalité et un artiste que tout oppose au réquisitoire «folklo» et partisan de Philippe Dagen. Son oeuvre en est témoin.

Il est difficile de répondre aux questions que suscitent la matière de ce texte, son illustration et son titre. Mais il est encore plus ardu de comprendre l'esprit de son rédacteur. Pourquoi un tel détournement ? Y avait-il une volonté de créer le buzz et, d'attirer ainsi les lecteurs en accumulant cet invraisemblable bric-à-brac ? Le plumitif avait-il une revanche personnelle à prendre ? En ces périodes de «Black Lives Matter», le racisme anti-breton est un des seuls tolérés voire encouragés, soit. Alors, le racisme primaire qui est exprimé, ici, est-il un simple cliché et une facilité rédactionnelle, ou correspond-il à une véritable animosité et au mépris manifesté par un professeur de la culture officielle académique ? [[Philippe_Dagen]] a le droit de préférer Puvis de Chavannes à [[René_Quillivic_(sculpteur)]]. Mais peut-il, pour autant, produire un texte révisionniste, qui ne fait pas honneur au journal Le Monde ? Est-il fondé à écrire, avec une telle désinvolture, une critique obscurantiste du travail de l'équipe de Jean-Marie Gallais ? Est-il autorisé, en usant d'un argument d'autorité, à insulter ainsi la Bretagne, les Bretons et la culture bretonne ?

Cela serait faire offense aux titres universitaires de Philippe Dagen que de penser qu'il puisse se tromper sur des connaissances largement partagées. Alors, pourquoi a-t-il choisi de tromper «son Monde» et ses lecteurs ?


Vos commentaires :
Emilie Le Berre
Vendredi 27 décembre 2024
Simple, ce ne sont pas des journalistes mais des commissaires politiques, des gardes bleu-blanc-rouge vivant de subventions donc de notre argent.

kris braz
Vendredi 27 décembre 2024
Ceux qui n'envisagent pas de s'abonner au Monde apprécieraient l'article en son entier.

Bernard Grua
Vendredi 27 décembre 2024
Emilie Le Berre, il ne sagit pas de commissaires politiques etc... D'ailleurs Philippe Daven n'est pas non plus un journaliste. J'ai mis le lien avec sa biographie Wikipedia dans l'article. Je le repose ici: Voir le site . Il est indiqué que sa principale activité est celle de «Professeur des universités». Il est par ailleurs chercheur, essayiste, critique et chroniqueur romancier. A vous de trouver la casquette qu'il a enfilée pour écrire son bien mauvais aticle.

Bernard Grua
Vendredi 27 décembre 2024
Kris braz, ce texte est réservé aux abonnés seulement. Il n'est, hélas, pas possible de le mettre en annexe car cela irait contre la propriété intelectuelle du Monde. Je n'ai pu que mettre un lien vers cet article incomplet. J'en suis désolé.

jakez Lheritier
Vendredi 27 décembre 2024
Cela rappelle un libre penseur «historien» venu des Côtes d'Armor,voilà une dizaine d'année à St Nazer
dire que le Triskel breton s'inspirait de la -croix gammée nazie, et que René Yves Creston était un collaborateur sous Pétain.
Demandez un droit de réponse dans le Monde est envisageable?

Naon-e-dad
Vendredi 27 décembre 2024
Le journal Le Monde:

«Grand quotidien du soir»?

ou «Quotidien du grand soir» ?

Diaes eo divizout, n'eo ket 'ta?


JP. Touzalin
Vendredi 27 décembre 2024
Bonjour,
Sans parler de racisme, au sujet de RY Creston, ne peut-on pas porter plainte pour « Faux et usage de faux» ?

Pascal Lafargue
Vendredi 27 décembre 2024
Dans la construction d’une nation égalitaire, devenue égalitariste, les différences ethnographiques deviennent insupportables, elles destabilisent la conception que ces personnes se font de la France, (dans le cas présent, le costume breton illustre à merveille cette différence trop visible). La langue les embarrasse aussi, on se souvient que Jean-Pierre Chevènement avait dit que les Bretons voulaient “balkaniser” la France avec leurs écoles Diwan. Alors la passion l’emporte sur la raison et amène ces penseurs à des postulats grotesques et particulièrement acrimonieux. Je me souviens d’avoir lu un article dans la revue L’Histoire dans les années 90, dans lequel un universitaire basque disait que les Basques étaient racistes (?!) et pour essayer de prouver que c’était ancré dans leur culture, il disait que le phénomène des caqueux (kakoused) avait été particulièrement fort au Pays Basque, au Moyen Age ?! (on notera que le phénomène a été autant sinon plus fort en Bretagne et que pourtant le racisme y est le moins fort de tout l’Hexagone…)
Il y a ce paradoxe chez ces penseurs et politiciens de France : ils refusent de reconnaitre que les Bretons puissent former un peuple (cf Marine Le Pen récemment à l’Ile de Sein) ayant sa langue, son histoire et sa culture propre mais dans le même temps, ils mettent en lumière des differences et des spécificités, mais… supposées dangereuses. Il y a donc une bien reconnaissance de la différence, mais une reconnaissance obligatoirement négative.

Fañch ar Vilin
Vendredi 27 décembre 2024
Le Monde comme si …
J’apprécie que vous réagissiez à ce genre d’articles puisqu’une fois de plus nous, Bretons sommes stigmatisés par un nationaliste français, mais ne donnons pas non plus trop d’importance à ces journaux qui ne voient pas plus loin que le bout de leur périphérique parisien.
Si nous avons du temps libre, plutôt que de perdre du temps à lire la presse française, utilisons-le pour apprendre notre histoire et notre langue et nous investir pour la Bretagne.
En parlant d’histoire, ne nous privons pas de mettre à ces donneurs de leçons le nez dans leur caca.
Rappelons-leur simplement qui sont les personnages célèbres qui ont fait la France et dont on baptise à foison de leur nom les rues, les écoles et autres édifices.
J’aimerais que « Le Monde » fouille un peu dans les poubelles de l’histoire de la région France. Un article sur chacun des colons, tyrans sanguinaires, et autres collabos qui ont fait la France aurait de quoi alimenter le journal pendant plusieurs années.
Une fois de plus je déplore que mes impôts soient utilisés pour financer cette presse qui m’est complètement étrangère.

Bernard Grua
Vendredi 27 décembre 2024
Courrier électronique envoyé à la rédaction du journal Le Monde

Objet: «Le folklore, du pain bénit pour la propagande nationaliste et régionaliste»
A: courrier-des-lecteurs [at] lemonde.fr
Nantes, le 23 juin 2020

Madame, Monsieur,

L'article de Monsieur Philippe Dagen paru dans votre journal le 17 juin 2020 Voir le site est, par bien des aspects, trompeur et confusionniste, en ce qui concerne l'exposition «Folklore» du Centre Pompidou - Metz et en ce qui concerne la victime de son propos, à savoir la Bretagne.
Je vous serais reconnaissant de bien vouloir faire paraître un droit de réponse en reprenant ce communiqué paru sur le site de l'Agence Bretagne Presse Voir le site
Je vous en remercie par avance et vous prie de bien vouloir agréer, Madame, Monsieur, l'expression de mes salutations distinguées.

Bernard Grua, Nantes


Burban xavier
Vendredi 27 décembre 2024
la presse papier est largement subventionnée par le Ministère de la Culture et les drac . Comment peut -elle être indépendante ? Nos quotidiens régionaux le sont aussi faute de quoi ils auraient disparus ces dernières années et plus encore maintenant ... Les journaux sont en crise ...
C'est pourquoi , je vous recommande le magazine «Ya » , journal indépendant et entièrement en breton et avec un article en gallo chaque semaine . Soutenons ce bon journal qui produit de bons textes et qui permet d'apprendre ou de perfectionner son apprentissage de la langue . C'est plus utile et concret .

Fañch ar Vilin
Vendredi 27 décembre 2024
Bernard Grua,

Avez-vous reçu une réponse du monde ?


Bernard Grua
Vendredi 27 décembre 2024
@Fañch ar Vilin Non, je n'ai pas reçu de réponse du Monde. En revanche Libération a fait un article très correct sur cette exposition même si le titre peut être discuté. Voir le site Là aussi, c'est réservé aux abonnés. Donc, je dois croire ce qui m'en a été dit, n'ayant pas pu le lire personnellement.

TY JEAN
Vendredi 27 décembre 2024
La présentation de cette expo ( voir sur le site du centre Pompidou-Metz ) me rend aussi perplexe.
Nous pourrions protester,envoyer des courriers pour remettre « les pendules à l'heure »

Maryvonne Cadiou
Vendredi 27 décembre 2024
René-Yves Creston n'a-t-il pas fait partie d'un réseau de Résistants ? Celui du Musée de l'Homme de Paris ?
N'ayant rien vérifié, je ne me fie ici qu'à ma seule mémoire...

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