L'Église catholique a déjà fait le Grand-Ouest
L'Église catholique a déjà fait le Grand-ouest et ceci dès décembre 2002. Cette province ecclésiastique épouse les contours des régions administratives Bretagne et Pays-de-la-Loire. Elle a son siège à Rennes où siège son archevêque. Elle comprend 9 diocèses qui correspondent aux départements, chacun doté d'un évêque.
Ce charcutage est d'autant plus suspicieux que la Bretagne, seule, a probablement plus de baptisés que toutes les autres régions sauf l'Ile-de-France. Ce Grand-Ouest ecclésiastique n'a rien à voir avec le nombre de fidèles ou le nombre de baptisés. Les cinq départements auraient largement suffi.
Selon le décret du 8 décembre 2002, c'est Mgr Jean-Pierre Ricard, archevêque de Bordeaux et président de la Conférence épiscopale de France qui aurait "sollicité du Siège apostolique la restructuration des provinces ecclésiastiques en France, de sorte que, dans la mesure du possible, elles coïncident avec les régions administratives civiles..."
Dans ce découpage, il est frappant de constater que les deux Normandie restent réunifiées alors qu'elles ne l'étaient pas en 2002 sur le plan administratif, ce qui prouve que des réunifications sur des bases historiques étaient possibles. Face à la création de ce grand-Ouest ecclésiastique on ne peut que soupçonner qu'il y a eu un accord tacite avec l'État pour ne pas réunifier la Bretagne.
À noter qu'avant 2002, il y avait une région ecclésiastique Bretagne sans la Loire-Atlantique. Cette province ecclésiastique avait été créée le 3 janvier 1859 par le pape Pie IX à la demande de Napoléon III. Cette date de 1859 est importante car c'est la première fois que la Loire-Atlantique, alors nommée Loire-Inférieure, est séparée du reste de la Bretagne. L'Église a donc fait dès 1859 ce que l'État fera un siècle plus tard en 1957. Elle a fait en 2002 ce que l'État proposera en 2013, lors du projet de réforme territoriale. Un Grand-Ouest qui sera refusé par les Bretons et en premier lieu Jean-Yves Le Drian.
La réunification de la Bretagne c'est le cauchemar de la République ! Nous en sommes tous convaincus aujourd'hui. On imagine très bien des réunions du Ministère de l'intérieur, au plus haut niveau, flanquées de quelques Chefs d'État-majors faisant une liste des menaces qui pèsent sur la République : 1) Le salafisme, 2) L'indépendance de la Corse. 3) la réunification de la Bretagne. Bigre !
Si Mgr Jean-Pierre Ricard demandait de redécouper en respectant les limites des régions administratives de l'époque, ce n'est pas du tout ce qui a été fait d'une manière générale par le Vatican. L'Alsace a conservé le diocèse de Metz et la Lorraine a conservé la Franche-Comté. Une province Poitou bric-à-brac a été créée sans la Vendée mais avec le Limousin, la Corse a été rattachée à la Provence, La Picardie et la Champagne ont été fusionnées, etc...À part l'Aquitaine, le Languedoc-Roussillon et Rhône-Alpes presque aucune des provinces ecclésiastiques créées en 2002 ne respectent les régions administratives de l'époque, encore moins celles d'aujourd'hui.
Ce découpage montre encore une fois que les identités culturelles ou nationales comptent pour du beurre pour l'église catholique latine héritière de l'empire romain. Elle a toujours divisé les territoires (diocesis en latin), comme la République, selon sa propre logique interne, et bien sûr sans aucune consultation des fidèles et aucun respect des identités.
Certes l'Église a prêché en breton dans les paroisses et a enseigné le breton dans ses écoles alors qu'il était interdit dans les écoles publiques. Il ne s'agit pas de nier ici le rôle qu'elle a joué dans la préservation de la langue bretonne mais on peut se poser des questions sur les motivations réelles de telles démarches. Même la Convention, pendant la révolution, a affiché des décrets en breton en Basse-Bretagne quand il s'agissait de se faire comprendre.
On assiste encore une fois à cet héritage romain du concept de province, un mot qui veut dire en latin "le pays des vaincus". Des territoires conquis composés de nations vaincues à quadriller pour mieux les contrôler. L'Église, comme l'Islam, comme la République, et comme autrefois l'Empire romain, se définissent eux-mêmes des nations de fidèles ou de citoyens. Il y a la chrétienté, la nation de l'Islam, l'empire ou la république, et sans oublier la nation des prolétaires de l'ex-Union soviétique où le parti était la nation. Ces pseudos-nations vont de paire avec la négation des nations historiques héritées de l'histoire du monde.
Sortirons-nous un jour de ce cycle infernal de phagociteurs et de phagocités et du quadrillage arbitraire du monde par ceux qui détiennent le pouvoir ?
Modifié le 10/11/2019 à 10 heures
■Rappelez-vous :
— Nuit et jour à tout venant
Je chantais, ne vous déplaise.
— Vous chantiez ? j'en suis fort aise.
Eh bien !dansez maintenant. »
Je vois plus aujourd'hui de la cigale que de la fourmi.
Alors... sans forcément être des piliers d'églises, reconnaître la partie prégnante du christianisme dans l'ADN breton, c'est renforcer la Bretagne. Alors, à toutes les personnes - ici et ailleurs - qui critiquent l'Eglise et lui font des reproches, parlent des évêques liquidateurs de leurs diocèses, je vous pose la question : vous-mêmes, n'êtes vous pas les liquidateurs de la Bretagne en laissant de côté une partie même de son âme, en vous comportant comme des colonisés de la pensée qui portent en filigrane le poison laïciste français ?
Pour en revenir au christianisme : certains parlent de la religion comme de Rome. Mais c'est méconnaître en totalité l'histoire de l'Eglise et l'apport du christianisme celtique au catholicisme. Vous seriez surpris de tout ce qui existe et qui vient de nous, et non de Rome ! Finalement, les adversaires de l'Eglise sont souvent plus ultramontains que les catholiques eux-mêmes, semble-t-il...