Vendredi une centaine de personnes a manifesté devant la mairie de Plovan alors que deux représentants de l'association CAFUB (Collectif pour une alternative aux fermes-usines en Bigoudénie), Mme Françoise Marzin, riveraine immédiate et l'ingénieur agronome Jean-Michel Nicolas s'entretenaient avec le maire, Michel Burel. Le problème ? L'extension de la porcherie SARL La Vallée à Kerviel sur la commune de Plovan. Avec cette extension, le nombre de truies sur le site de Kerviel passerait de 3 500 à 6 000, ce qui équivaudrait à une production annuelle de plus de 18 000 porcs, 30 000 pour les deux sites, car la SARL a un autre site sur la commune de Plogastel-St-Germain.
Le but de cette mobilisation est de faire stopper les travaux de terrassement qui ont démarré récemment. Un arrêté préfectoral du 19 juillet 2017 a en effet autorisé l’extension de l’élevage malgré les avis défavorables du conseil municipal de Plovan et de la première enquête publique en 2016. Non content des résultats de cette enquête, le préfet du Finistère, Pascal Lelarge, a proposé au tribunal administratif une nouvelle enquête . La commissaire enquêtrice Mme Agnés Lefèbvre (voir son rapport édifiant en bas) a été remerciée. Le tribunal administratif a ordonné une nouvelle enquête d'utilité publique et on a envoyé une autre commissaire, Mme Catherine Desborses, qui, elle, a donné un avis favorable ! C'est commode non ?
Cela peut paraître anodin mais la même chose s'est produite pour l'extension de la porcherie de Landuvez SARL Avel Vor, à 1500 m de la mer, au Pays des Abers, comme rapporté par un représentant de l'association Plein Air de Landuvez, venu expliquer qu'il est nécessaire de se regrouper pour peser plus fort. Eau et Rivières de Bretagne, Bretagne Vivante, Baie de Douarnenez environnement et le collectif Ondes Citoyennes se sont associés à ces luttes contre l'extension des porcheries.
Toute porcherie augmente trois choses. La quantité d'azote dans les sols, la quantité de nitrates dans les eaux et la quantité d'ammoniac dans l'air.
Les agrandissements de porcheries atteignent des proportions qui menacent un équilibre fragile des campagnes et des rivages bretons. D'abord les sols car de telles quantités d'épandage de lisiers, les rendent trop riches en azote. Ceci est d'autant plus grave pour Kerviel car une autre porcherie, la ferme du Ruot, qui élève des cochons pour l'entreprise Hénaff (12 500 porcs/an), est juste à coté, de l'autre coté de la route de Quimper. Les deux exploitations se touchent en fait. À elles deux, ces deux porcheries totaliseraient plus de 30 000 porcs par an sur 10 km2.
Qualité de l'air ? Pour le site de Kerviel, les effluves vont nuire au sentier pédestre Per Jakez Helias, et au GR34 côtier. Le rejet d'ammoniac a des conséquences immédiates sur les travailleurs de l'entreprise mais aussi sur les personnes vivant dans les environs.
L'étang protégé de Kergalan sur le littoral à 3 kms est directement en aval du site de kerviel. La réserve biologique de Truñvel-Tréogat est aussi juste à côté de l'Etang de Kergalan mais alimenté par des ruisseaux différents il est vrai. Malgré des installations de retraitement du lisier, des accidents sont possibles, d'autant plus que le changement climatique s'accompagne de phénomènes métérologiques extrêmes et donc hasardeux pour toute exploitation agricole et tout élevage. Des toits de granges ont été détruits à quelques kms de Kerviel lors des tempêtes de 2014, la baie d'Audierne étant, avec Ouessant, l'endroit le plus venteux de toute la Bretagne.
La baie d'Audierne est certes plus propre que la baie de Douarnenez voisine avec ses algues vertes mais elle est de plus en plus menacée. Un pêcheur professionnel de tellines est venu témoigner de la disparition brutale des tellines en baie d'Audierne en 2010. Ce coquillage a du mal à revenir. Il y a quelques années, des riverains et les surfeurs de la Torche ont aussi montré du doigt les productions de tulipes à Plomeur, au sud de la baie, productions accompagnées d'usages d'herbicides à quelques centaines de mètres du rivage.
Cette affaire des extensions de porcheries touche aussi à des problèmes tout aussi grave d'ordre sociologique qui concernent l'évolution du paysage et de l'économie de toute la Bretagne rurale. Dans le premier rapport d'utilité public qui était défavorable, Mme Agnes Lefebvre avait fait cette remarque pertinente dans ses conclusions «La recherche d’une taille toujours plus grande pour faire des économies d’échelle en abaissant les coûts de production a des conséquences économiques qui dépassent les seuls exploitants par l’arrêt d’activité de petites exploitations, les pertes d’emploi que cela implique et la diminution d’habitants en activité dans les communes rurales au profit de résidences secondaires, ce qui ne permet pas de maintenir l’école ou les commerces.» Elle mentionne aussi les demandes croissantes pour le bio qui justement est produit dans de petites exploitations avec des cochons cajolés et élevés sur de la paille.
Lors des débats qui ont suivi l'entretien avec le maire, la CAFUB a annoncé avoir relevé un vice de forme sur le permis de construire apposé à l'entrée du site de Kerviel et a déposé une demande de référé. Elle a demandé à la mairie de faire stopper les travaux en cours. Des participants ont toutefois posé la question de l'utilité d'une manifestation devant la mairie alors que les décisions se prennent à la préfecture de Quimper. C'est sans doute là que la prochaine manifestation aura lieu.
La pétition est en ligne pour demander l’arrêt des travaux au ministre de l’Écologie François De Rugy :
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