Une carte publiée dans La revue économique montrant les pertes (soldats tués et disparus) par département, par rapport à la population et selon le recensement de 1911, ne manquera pas de soulever des commentaires.
En 1914 il n'est plus question d'Armée de Bretagne comme en 1870. Une armée levée en renfort suite aux désastres militaires qui fit si peur à Gambetta et à la toute nouvelle 3e République. En 1914, les Bretons sont mobilisés dans deux corps d'armée qui font partie de la Ve armée dite «Armée de Paris», le XIe qui correspond à la XIe Région militaire dont l'État-major est à Nantes et qui mobilise les jeunes du Finistère, du Morbihan, de la Loire-Inférieure et de la Vendée. Cet état-major semble avoir privilégié les Vendéens pour le casse-pipe selon les données de cette carte. On notera aussi que beaucoup de Finistériens étaient dans la marine nationale qui a eu moins de pertes que l'armée, d'où une couleur plus claire sur la carte. Le XIe corps d'Armée entame la guerre lors de la bataille la plus meurtrière de toute l'histoire de France, une défaite, la bataille des frontières avec les terribles combats de Maissin à découvert. 27 000 morts en une seule journée. Il participe aussi aux batailles de La Marne, de Verdun, du Chemin des dames parmi d'autres.
Quant au Xe corps d'armée de la Xe Région militaire basée à Rennes, il est formé des conscrits des Côtes-du-Nord, de l'Ille-et-Vilaine et de la Manche. Il participera aux batailles de la Marne, de la Somme et de Verdun avec les pertes qu'on imagine.
Depuis un siècle le nombre de morts bretons pendant la première guerre mondiale a été la source de polèmiques, le chiffre variant de 125 000 dans un article de Ouest-France de 2013 à 300 000.
Une carte est apparue récemment sur les réseaux sociaux montrant le pourcentage de tués pour chaque département. Avant de l'analyser nous devons prétendre que ces chiffres, dont la source ultime est le ministère de la Défense, ex-ministère de la Guerre sont exacts. Certains ont des doutes vu l'immense polémique concernant l'utilisation abusive de régiments bretons et de troupes coloniales lors des combats les plus durs de la première guerre mondiale. Le nombre de Bretons tués au combat varie aussi selon les définitions de qui est, ou n'est pas, «breton», sans parler de ceux qui ne comptent que les morts de la Bretagne croupion à quatre départements ou ceux qui ne comptent pas les Bretons nés en Bretagne, mais vivant dans d'autres départements.
Les chiffres peuvent être questionnés du fait que le ministère de la Guerre a menti systématiquement pendant les quatre années de la guerre. Il y a eu des antécédents. Les pertes réelles sur le front étaient falsifiées ou dissimulées au grand public. Même le courrier des soldats était censuré. Si les parents et les familles de ces jeunes hommes avaient su que 1000 soldats étaient tués tous les jours en moyenne, il est certain que la guerre n'aurait pas pu continuer. Quelqu'un a calculé que si on pouvait faire défiler tous les morts de cette hécatombe sur les Champs-Élysés, cela prendrait neuf jours !
Pour vérifier ces chiffres on peut toutefois comparer avec les différences de population entre le recensement de 1911 et celui de 1921 qui eux peuvent difficilement être remis en cause. Le pourcentage de perte de population pour l'Ille-et-Vilaine est de 8,3% et celui de la Vendée de 9,4%, ce qui correspond grosso modo aux pourcentages de la carte. La Vendée est bien le département qui semble avoir le plus souffert dans ce Grand-ouest mais aussi la Mayenne et les Côtes-du-Nord. Le 44 perd moins de population sans doute grâce à l'immigration vers Nantes des départements limitrophes. La Bretagne dans son ensemble a perdu 6% de sa population entre les deux recensements, soit 196 985 habitants. Le recensement de 1911 est fait 3 ans avant le début de la guerre, celui de 1921 trois ans après la fin, ce qui permet d'annuler les augmentations de population dues à la natalité. On peut donc affirmer que le nombre de Bretons morts à la guerre de 14-18 est d'environ 200 000 (ce chiffre inclut ceux qui sont morts de leurs blessures avant le recensement de 1921).
Calcul du nombre de soldats et marins bretons tués ou disparus pendant la première guerre mondiale basé sur les recensements de 1911 et 1921 extrapolés.
N(nombre de tués) = R2(recensement de 1921) - 3n +3d -3e - [R (recensement 1911) +3n -3d +3e]
n=nombre de naissance par an
d=nombre de décès pas an
e=nombre d'émigrants
N= R2-R1
N=3 271 635 - 3 074 650 = 196 985
N rectifié avec le nombre de morts des suites des blessures = 196 985 + 3000= 200 000 . 3000 morts suite de blessures graves est une approximation.
Il est assumé que grosso modo n,d,e ont les mêmes valeurs les 3 années avant la guerre et les trois années après la guerre. Mais pour d c'est pas entièrement correct car des blessés sont morts suite à leurs blessures après la signature de l'armistice et avant le recensement, d'où le chiffre de 200 000 morts.
La carte montre à première vue que ce n'est pas uniquement la Bretagne qui a souffert plus que les autres régions mais tout l'Ouest de la France-- ce que certains appellent aujourd'hui le Grand-ouest et qui regroupe les deux régions administratives, mais avec en plus la Manche. Au centre, il y a aussi de plus gros pourcentages dans les contreforts de l'Auvergne et le Limousin.
Quand on examine de plus près cette carte on s'aperçoit que tous les départements ruraux ont eu plus de tués que les autres. Les États-majors semblent avoir choisi d'envoyer au casse-pipe les régiments principalement composés de paysans, une classe sociale à leurs yeux, moins indispensable que les ouvriers et les cadres issus des centres urbains. Ces paysans d'ailleurs, parlaient souvent entre eux une langue autre que le français standard. Ils paraissaient sans doute moins français aux yeux des généraux. Le sort le plus injuste était réservé aux troupes coloniales : pour reprendre le fort de Douaumont, on a par exemple envoyé des tirailleurs sénégalais et somaliens qui se sont battus au corps à corps pour reprendre le fort aux Allemands avec les pertes que l'on imagine. Rien de nouveau au sein de l'empire qui se veut une république. Aux champs Catalauniques contre les Huns d'Attila, les Romains avaient envoyé les Goths, alors leurs alliés, se faire massacrer en priorité.
On peut appliquer la même méthode d'extrapolation des recensements sur l'ensemble des 86 départements métropolitains (sans la Moselle et l'Alsace) et on obtient 2 102 114 tués et disparus pour la France, un chiffre qui ne compte ni les troupes coloniales puisque nées en dehors de la France, ni les décédés des suites de blessures graves après le recensement de 1921. Soit une perte de 5% de la population métropolitaine. Donc oui avec 6%, la Bretagne a eu plus de morts que la moyenne nationale, mais pas que, de nombreux départements ruraux ont aussi payé un prix fort.
Modifié le 3/09/18
■De mon service militaire, je retiens un souvenir qui peut laisser perplexe sinon pantois. A une époque, les militaires considéraient - ou considèrent toujours? - que dans certaines situations périlleuses exposées au feu adverse...
. un soldat ordinaire tiendra une journée
. un bon soldat tiendra deux journées
. un soldat vraiment exceptionnel tiendra trois journées, mais pas plus.
Oubliée donc la notion de «Rambo», «Superman», et autre personnages de feuilletons ou BD. Les militaires, eux, ont parfaitement intégré la notion de «casse-pipe» a quoi fait référence le titre de l'article. Et surtout, ils savent - par l'expérience sur le temps long, et par culture - que certaines situations sont plus exposées que d'autres, voire intenables.
Les chiffres présentés ici posent de manière dramatique un problème effroyable. Il y manque au-delà des pourcentages, les valeurs chiffrées réelles, dont on sait, au moins pour la Bretagne, qu'elles sont toujours contestées : 240.000? 130.000?
Petit ajout pour aujourd'hui: d'où l'importance de la qualité des équipements (gilets pare-balles, véhicules blindés, etc..) pour ceux d'aujourd'hui (de statut militaire ou autres) qui sont exposés du fait de leur mission (que ce soit en opérations extérieures ou sur le théatre domestique) aux dangers de toutes sortes.
Daoust hag e paouzo ar broioù pe an dud, deizh pe zeizh, evit abeg pe abeg, da vrezeliñ ha d'en em lazañ kenetrezo?
En résumé, l'école laïque Républicaine a préparé plusieurs générations d'enfants à la ''revanche sur 1870''...
Pour ce faire, il fallait gommer les spécificités culturelles (bretons, basques, occitans, etc... mais également africains au sens général) pour ne constituer qu'une seule perception identitaire pour laquelle toucher au territoire ''national'' correspondait à toucher à sa famille et notamment à sa propre mère (la concept de Mère Patrie... décliné par les modérés en Grande et Petite Patrie...).
Dans les bataillons scolaires, on n'hésitait pas à mettre un uniforme à des enfants de 5 ans et à les faire parader et faire des exercices tactiques avec des armes en bois (pour les jeunes) afin de leur faire comprendre ce que nécessitait la défense de l'amour maternelle...!
Un lavage de cerveau institutionnalisé et initié par la Gauche Républicaine (les mêmes fameux ''ouvert d'esprit'' d'aujourd'hui...) qui sera l'acte fondateur de la fameuse école dite ''de la République''...
Mais il semble que la Gauche Républicaine n'a pas osé aller au bout de sa logique et fera évoluer son projet de Guerre de Revanche en utilisant les jeunes adultes endoctrinés pour partir à la conquête des colonies... (un but ''humanitaire'' pour apporter la civilisation aux inférieurs... un thème toujours d'actualité aujourd'hui sous une autre forme...) et c'est la Droite Républicaine moins favorable aux colonisations qui reprendra l'idée de l'utilisation de la jeunesse Républicaine sur le territoire européen... (clairement avoué dans le reportage...)
Le résultat de la démarche Républicaine (gauche/droite), il est visible sur cette carte proposée par ABP... des morts par centaines de milliers par millions.... (et encore, hors chiffres des colonies civilisées...)
Il ne faut pas beaucoup d'imagination pour comprendre que les enfants entre 1880 et 1914 ont subit un endoctrinement au minimum du niveau des jeunesses hitlériennes et des écoles de DAESH (le culte de la personne / de la religion étant simplement remplacé par le culte de l'Etat-Nation)... mais la pudeur toute française qui s'exprime dans ce reportage n'a pas osé ce parallèle qui pourtant bondissait à la vue du téléspectateur...
Néanmoins, merci à LCP pour avoir osé le reportage (même si à 11h du soir quand 99% des gens dorment)...
Plus que de savoir la réalité entre 130 000 ou 240 000 morts en Bretagne, il me semble que c'est plutôt cette endoctrinement au-travers de l'école Républicaine qui devrait susciter nos réflexions....
Pourquoi...?
Tout simplement parce que si l'esprit fasciste est mort en Europe (quoi qu'en dise l’extrême gauche qui a besoin de justifier sa violence), l'esprit Républicain au sens français du terme existe toujours....!
Et cet esprit existe tellement que l'enseignement du breton est toujours problématique, que la Réunification est un sujet ''dépassé'', que la démocratie en Bretagne n'a pas de compréhension et que ''Vive la République'' ne peut se dire qu'avant ''Vive la France'' pour les Français ou avant ''Vive la Bretagne'' pour les Bretons (bien que plus rare... la Bretagne ne pesant pas bien lourd face à l'idée de France incarnant l'Etat-Nation depuis que l'école Républicaine est devenu ce temple moderne de l'éducation des jeunes générations... et ce n'est d'ailleurs pas sans logique si le Mouvement Breton qui est très porté sur les valeurs Républicaines reste aussi peu disposé à enseigner l'histoire et les traditions issues d'un monde réel mais non filtré par l'étatique...)
Il y a donc matière à réflexion...!
Qui peut en parler?
Les organisations bretonnes peuvent elles pallier à ce qu il me semble un grave gommage de la guerre maritime
14/18 côté Bretons.
Ce n'est pas tant une haine contre les Bretons qui a amené à ce résultat mais une idéologique politique qui a voulu imposer une même identité à des peuples/des nations différentes au nom d'une GRANDEUR/SUPÉRIORITÉ supposée...
L'émission de LCP «Mourir pour la patrie» que je citais sur l'endoctrinement des enfants a été rediffusé ce weekend... L'intitulé est à lui seul révélateur : «L'école publique, dès sa création, a préparé les jeunes Français à devenir de bons citoyens et de futurs soldats en cultivant l'amour de la patrie : analyse.»
J'évoquais qu'à l'évidence cette démarche s'apparentait au MINIMUM à celle des jeunesses hitlériennes ou de DAESH... d'autant plus parlant que ce reportage a été réalisé par des Français et non par de pseudo-méchants nationalistes Bretons...
Le problème, c'est que cette évidente vérité ne passe pas dans le Mouvement Breton qui très orienté à gauche est relativement fasciné par l'étatisme universaliste Républicain...
Autrement dit, la pensée majoritaire du Mouvement Breton actuel est en grande partie issue du formatage qui s'est déroulé à l'époque dans les écoles... Hier le culte du nationalisme étatique, aujourd'hui la pensée unique institutionnalisée... (2 faces d'une même pièce qui bloque la société bretonne dans son émancipation).
Le Mouvement Breton qui aime tant chasser le ''fa'' (au titre qu'il serait de droite, une falsification bien connue...) se refusera à regarder la vérité sur cet endoctrinement des enfants dont l'origine Socialiste Républicain est cette fois-ci impossible à masquer...
La République a peut-être tué nos arrières grands-parents en les endoctrinant à la GRANDEUR DE DEVENIR FRANÇAIS mais le Mouvement Breton les tuent une 2ème fois en occultant la démarche politique et idéologique qui a conduit à ce massacre (qui d'ailleurs ne concernait pas que les Bretons car elle incita également les habitants des colonies africaines fraichement civilisés à se sacrifier pour ''leur (?)'' Mère Patrie)...
(pas étonnant que le Mouvement Breton a un problème à enseigner l'histoire de Bretagne aux enfants...)
Doit-on s'étonner que l'analyse un minimum objectif de cette période nous vient des Français et non des Bretons?
@ laou ar spazher
Morse, n’am boa lennet tra seurt-se. Biskoazh kemend-all !
Ce que vous écrivez (e brezhoneg) est impressionnant. Ainsi, les officiers bretons, en responsabilité opérationnelle, auraient été plus économes de leurs hommes. On sait que le nombre des pertes dépend pour partie de la personnalité et de l’intelligence du commandement (pensons au très contesté général Nivelle). Qu’il y ait des variations individuelles n’a rien de surprenant, mais qu’il s’en dégage une observation empirique plus générale devrait, à mon sens, retenir l’attention des historiens spécialistes de cette période.
Souezhet ha dedennet un tammig on gant-se…