Catalogne : émancipation démocratique, Espagne : répression étatique

Chronique publié le 4/11/17 18:02 dans Politique par Alan-Erwan CORAUD pour alan coraud
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Émancipation démocratique, répression étatique

Huit ministres catalans emprisonnés, des restrictions de liberté pour la société civile, des pressions sur les médias, un chantage à l’emploi contre les fonctionnaires catalans.

On dirait que l’Espagne met en action la Constitution française de 1958.

Hélas, je n’ai que rarement lu de véritables analyses critiques de cette Constitution qui prévoit que toute personne agissant en faveur de la sécession de son pays est passible d’une condamnation à une lourde peine de prison, qu’en cas de danger pour la République tous les citoyens sont soumis aux lois militaires…

N’oublions pas que c’est celui qui était surnommé l’hystérique à la bombe… nucléaire et qui arracha des centaines d’enfants réunionnais à leurs parents pour les faire adopter en Auvergne où la natalité était trop faible, celui-là même qui incita les Bretonnes à se marier avec les paysans du Massif Central, celui qui oublia très vite sa collaboration sous Pétain, bref ce fut ce triste sire Michel Debré qui rédigea la Constitution de 1958 que seule la Turquie copia, la considérant comme un modèle de gouvernance d’État (sic).

L’Espagne n’est pas allée aussi loin dans le déni de la démocratie mais malgré tout, sous bien des aspects, elle a une Constitution ayant quelques ressemblances avec la française. Ce qui lui permet aujourd’hui d’emprisonner des élus catalans.

Des États qui génèrent le populisme et les dérives extrémistes

La montée des populismes extrémistes qui prônent un nationalisme de repli, raciste et xénophobe, hostiles aux échanges économiques internationaux, hostiles aux traités commerciaux internationaux, est un fait. Pourtant, le meilleur moyen de prévenir les guerres c’est bien grâce au business. On échange aussi humainement et on crée des liens d’amitié. Ces accords sont aussi le moyen le plus efficace contre le dumping, contre les aides d’États qui faussent les marchés.

Le "produire local" prend parfois des airs de replis, ce qui donne une impression de malaise quand on constate les convergences de pensée entre l’extrême droite, les courants écologistes, l’agriculture bio et l’extrême gauche.

La construction européenne fédéraliste est bloquée par la faute d’un État comme l’État français qui veut de l’Union européenne pour prendre en charge sa dette colossale, pour l’aider à survivre malgré la faillite de son système étatique, obsolète, asphyxiant, dirigiste, autoritaire, administré, bref liberticide qui fige la société civile, les entrepreneurs et les porteurs de projets mais qui ne veut pas d’une Europe fédérale, démocratique, parlementaire, recherchant l’égalité entre les peuples.

Des peuples qui font un monde plus humain

A contrario de ces dangers, le peuple catalan et ses élus nous montrent le chemin qui fait aller tous les peuples de l’Union européenne vers un modèle de gouvernance de type fédéraliste, où toutes les nations d’Europe auraient une représentation à égalité.

La démocratie, valeur universelle, est aujourd’hui portée par les mouvements européens d’émancipation nationale de peuples minorisés.

Ces peuples sont ouverts au monde, ses habitants sont souvent polyglottes, voyageurs et ouverts aux autres. Sans doute que leur statut de citoyens de pays minorisés par des États dominateurs les a protégés de cette prétention à imposer leur langue ou culture, à ne pas se considérer comme « modèle universel », à ne pas hiérarchiser les gens en fonction de leurs origines.

Humanité et régressions étatiques

Ce sont bien ces États dominateurs qui génèrent les populismes et les attitudes belliqueuses. La gestion des flux d’immigrés est révélatrice de ces histoires sociétales.

Pourquoi l’Allemagne démocratique et fédéraliste accueille-t-elle 950.000 réfugiés politiques sans problème majeur, Angela Merkel étant même réélue, alors que dans le même temps la France qui en accueille 20.000 crie tout de suite à l’islamisation de la France et à la perte de son identité ?

C’est bien un État comme la France qui collabore à la régression de l’humanisme à travers cette montée des extrêmes. La France a généré le FN (Front National) et LR (Les Républicains), la différence n’étant maintenant que dans l’acronyme, la France Mélenchon - ici je refuse d’employer de terme d’insoumise, ne voulant pas salir ce noble mot, moi l’ancien insoumis breton - est une création française, quant au PS (Parti socialiste) il est plus national que socialiste…

Médias français néo-coloniaux ?

Messieurs et mesdames les journalistes hexagonaux, ce ne sont pas les luttes d’émancipation des peuples minorisés d’Europe mais bien votre propre pays et son système étatique que vous cautionnez, qui fait le lit de ces dérives politiques et de ces nouveaux Pétain.

Vous manipulez l’opinion publique, vous cautionnez ainsi les politiques répressives de certains États. Vous n’avez pas évolué d’un iota par rapport aux actualités que votre corporation diffusait lors des guerres d’indépendance du Vietnam, d’Algérie, du Cameroun…

C’en est pathétique.

Nous dénonçons l’obscurantisme de la pensée des médias français et de ses intellectuels et autres journalistes.

Nourris à l’école de la pensée républicaine française, ils osent faire le parallèle entre la montée des extrémismes populistes nourris des nationalismes étatiques et le mouvement d’autodétermination du peuple catalan nourri d’un nationalisme d’émancipation.

Car, bien sûr, il ne faut pas confondre le nationalisme d’émancipation des peuples minoritaires d’Europe et le nationalisme de domination des États espagnols et français.

Système républicain unitaire, pensée unitaire et asphyxie

Incapables de la moindre critique du système unitaire français, ils pourfendent les modèles politiques fédéralistes ou démocratiques qui donnent autonomie et libertés de gouvernance à leurs minorités nationales.

Leur discours est de dire " regardez ces systèmes qui reconnaissent les communautés, ils génèrent des revendications séparatistes. Nous, notre système unitaire est exemplaire ".

Ce qu’ils ne voient pas, ces tristes sires, pétris d’orgueil cocardier, c’est que ce système qui impose l’uniformisation, qui combat le pluralisme des cultures et des langues infligeant une gouvernance étatique autoritaire, ce qu’ils ne voient pas c’est que leur système étatique français génère son propre poison.

Ce poison se diffuse dans la société tout entière.

Il provoque des fractures sociétales graves, des révoltes dans les banlieues, des exils des forces vives, de la démotivation du secteur public, de la déresponsabilisation des citoyens, de l’épuisement des porteurs de projets, des fracturations sociétales d’une extrême gravité.

Plus ce système étatique est décadent, plus il est autoritaire. Cette décadence se révèle la corruption, la prévarication, la concussion, le népotisme de cette nomenklatura française.

Concrètement cette caste est composée de politiques, journalistes, écrivains et autres philosophes, artistes et dirigeants d’entreprises plus ou moins nationalisées qui se marient, se reproduisent entre eux et ceci depuis deux siècles.

Les similitudes avec le système communiste soviétique sont nombreuses.

Ces systèmes s’écroulent toujours brutalement.

La France aura son mur de Berlin. C’est le prix à payer quand on asphyxie la société civile tout entière. Cette oligarchie ne pourra tenir la société civile éternellement entre ses mains.

La modernité et l’humanité doivent aujourd’hui faire face à l’obsolescence de ces vieux États français et espagnols qui se sont créés en détruisant des peuples militairement faibles qui n’ont pu résister à leurs armées.

Ils se révèlent odieux quand ils perdent le contrôle. Car, ce qui caractérise les systèmes politiques d'essence totalitaire c'est de marginaliser, voire de criminaliser leurs dissidents politiques issus des minorités nationales. C’est criant de vérité avec la répression de l'État espagnol vis-à-vis des élus démocrates catalans. Ne pensez pas qu'il en serait différemment avec l'État français vis-à-vis de leaders corses ou bretons si d'aventure les électeurs les portaient vers une victoire indépendantiste.

Des peuples au croisement de leurs destins

Nous sommes au croisement de deux voies possibles.

Le XXIe siècle sera le siècle qui perpétuera l’ignominie d’États autoritaires et dominateurs dans une Union européenne foulant au pied les droits des peuples minoritaires ou bien il sera le siècle du progrès de l’humanité où l’ONU verra arriver quelques nouvelles nations reconnues par la communauté internationale et où l’Union européenne sera celle de toutes les nations authentiques qui auront chacune un siège à la table de la gouvernance partagée de cette fédération.

Quant à nous, Bretons, nous devons prendre notre destin en main.

Nous avons conscience d’être un maillon dans la grande chaîne des peuples du monde.

Nous n’avons aucune prétention à servir d’exemple universel, notre langue bretonne est vernaculaire, nous en sommes conscients mais nous l’aimons pour sa pensée libre et non formatée, pour sa poésie et son imaginaire.

Nous savons que les langues anglaise, chinoise ou espagnole sont véhiculaires et nous permettent d’échanger avec le monde entier.

Nous aimons nous inspirer des cultures du monde et l’altérité est la source où nous puisons notre joie de nous enrichir intellectuellement, humainement en échangeant avec les autres.

Alors, de grâce avant de fustiger cette soif de liberté des Bretons, Écossais, Catalans… messieurs et mesdames les journalistes français, ouvrez votre esprit, venez à notre rencontre, laissez vos préjugés de membres d’une corporation française particulièrement arrogante. Nous serons heureux de vous faire respirer le vent de la Bretagne, péninsule européenne ouverte sur le monde mais demandant son droit à l’autodétermination à l'image de la Catalogne.


Vos commentaires :
Jeudi 2 mai 2024
Quoi attendre d'autre de l'Espagne post franquiste et des partis tel le PSOE qui sont les héritiers de la minable deuxième république espagnole qui a laissé Euskadi crever sur le front nord et refusé les renforts lors de l'offensive sur l'Ebre, il fallait tenir Madrid. Pour la gauche et la droite espagnole se sera toujours le centre avant la périphérie : les jacobins ne sont pas qu'à Paris. Et l'attitude révoltante des pseudos institutions para étatiques siégeant à Bruxelles, après avoir gérer de manière totalement infame l'éclatement de la ci-devant ex Yougoslavie, elles ont de nouveau choisie la politique du chien crevé. Faudra t-il attendre une intervention US comme d'habitude ?
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