Il y a 100 ans, un indépendantiste breton obtenait le statut de réfugié politique en Grande-Bretagne

Reportage publié le 29/10/16 0:43 dans ABP par Philippe Argouarch pour ABP
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Louis-Marie Le Roux
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Dans le cadre des commémorations du centenaire de l'insurrection irlandaise de Pâques 2016 et du festival du livre de Carhaix, dont le thème cette année est l'Irlande, des conférences sont données à Carhaix à la pépinière des entreprises adjacente à l'espace Glenmor. L'universitaire Alan Le Cloarec de Rennes 2 a fait part de ses recherches sur Louis-Marie Le Roux (1890-1944), plus connu sous le nom de Louis-Napoléon Le Roux.

Louis-Marie Le Roux est né à Pleudaniel dans le Trégor, dans un milieu très modeste. Rien ne le destinait à une vie engagée pour la Bretagne ni à devenir un des pionniers de l'interceltisme. "Ce bretonnant de naissance, fils d’un meunier de Pleudaniel dans une famille de huit enfants, a été un activiste breton et international. Il agissait le plus souvent en coulisse, sans trop se mettre en avant, mais a côtoyé de près certains des grands événements et certaines grandes figures du monde politique de son temps", a écrit Alain Le Cloarec.

Très tôt, Louis-Marie Le Roux, assure le secrétariat de rédaction de la revue Ar Bobl, l'hebdomadaire bilingue de Taldir Jaffrennoù. Mais à l'âge de 21 ans, en octobre 1911, il est un des fondateurs du Parti Nationaliste breton (le premier PNB) avec Camille Le Mercier d’Erm et son frère, Pierre-André Le Roux. Il devient alors ouvertement indépendantiste (on dit alors séparatiste).

Il a pu être impliqué dans le dynamitage, à Rennes, du monument de Jean Boucher représentant Anne de Bretagne agenouillée devant le roi son époux.

Il participe au bulletin Brug (Bruyère) que fait paraître son ami et mentor Émile Masson. Avec lui il répand alors les thèses socialistes et libertaires dans la paysannerie de Basse-Bretagne. Il écrit dans la revue La Bretagne libertaire en 1921. En 1922, il est le traducteur français des ouvrages de J. Ramsay MacDonald. En 1922, il est devenu le secrétaire particulier du futur Premier ministre britannique Harold MacMillan mais acquiert la nationalité irlandaise. En 1930, il publie un livre qui définit les bases d'une langue interceltique.

En 1932, il écrit et publie L'irlande militante, la vie de Patrick Pearse, la première biographie du grand poète irlandais, qu'il a probablement rencontré lors de ses nombreux voyages en Irlande.

Dans les années 30, il fréquente les breizh atao mais s'en écarte vite pour éviter d'éponger les dettes du journal sans contrepartie politique. Le Roux crée alors une Association nationale bretonne, avec un nouveau journal intitulé Breiz Dishual. Son testament politique : il ne croit pas à la lutte armée en Bretagne. Pour lui il suffit d'obtenir l'enseignement du breton obligatoire dans toute la basse Bretagne et l'enseignement de l'histoire de Bretagne dans toute la Bretagne pour lancer la Bretagne d'une façon irréversible vers son émancipation.

Reparti en Irlande juste avant la seconde guerre mondiale, il est militant dans les rangs du Sinn Féin avec sa femme irlandaise. Il fait quelques voyages discrets en Bretagne, notamment en 1939 lors du débarquement d'armes à Locquirec destinées aux indépendantistes bretons.

Doué d'un sentiment extraordinaire pour prévoir l'arrivée des guerres, des guerres qu'il ne considère pas comme celles de la Bretagne, il se retrouve en Grande-Bretagne une année avant le début de chacune des deux guerres mondiales. A noter que la Grande-Bretagne lui accordera le statut de réfugié politique en 1916, alors que la France avait demandé son extradition. Pour la seconde, comme il était devenu citoyen irlandais, il pouvait ne pas participer au conflit. Ironie du sort, la guerre le rattrapera quand même en 1944 puisque il est tué par un V2 allemand tombé sur l'hôpital où il était soigné pour une grippe.

La plupart de ses archives ont été acquises par le gouvernement irlandais car il connaissait personnellement bon nombre de leaders nationalistes irlandais.


Vos commentaires :
Mardi 30 avril 2024
@ Spered dieub

J'avoue que le sujet mérite d'être développé car ce n'est pas à cela que je pensai tout comme j'imagine que ce n'est pas à cela que penseraient 99% des Bretons en entendant le mot «sulfureux» associé à la période des années 30-40.

Et j'avoue ne pas comprendre en quoi ce néo-paganisme poserait un problème quand pour la majorité des Bretons de l'époque la foi chrétienne restait profondément imprégnée des traditions de l'ancienne religion. Ce que malheureusement nous avons oublié, au point qu'un Breton d'aujourd'hui ne sait plus que ses grands-parents fêtaient Halloween (Samain) pour reprendre l'exemple le plus pathétique.

Et cela d'autant que nombres de pays européens cultivent cet aspect paganique comme une composante des racines de leur identité culturelle. Les Bretons sont donc loin d'être des extra-terrestres sur ce sujet.

Par contre, comme je le disais : l'oubli de tous ces nationalistes bretons (ou bretons très fortement engagés vis à vis de la Bretagne) qu'on nous a fait passer pour de bons petits français sous prétexte qu'ils étaient dans la résistance (en Bretagne ou en Grande-Bretagne) afin de consolider une image sale du nationalisme breton est l'une des honteuses du mouvement breton qui en virant à gauche à repris à son compte les accusations fallacieuses des ultra-nationalistes français!

Car à l'évidence, par égoïsme la gauche bretonne a fait bon ménage avec l'ultra-nationalisme français bloquant pour longtemps encore la capacité de Bretons à s'affirmer démocratiquement!

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