Communiqué transmis le 19 octobre 2016 par l'ACIPA avec cette introduction :
Vous trouverez ci-dessous une lettre ouverte du Collectif de juristes et avocats, en réaction à la prise de position de Jean-Jacques Urvoas au «Grand rendez-vous» Europe1 / iTélé / Les Échos le 8 octobre dernier.
Nous vous informons que, conformément à ce qui avait été annoncé, le Tribunal administratif de Nantes a été saisi d'une demande d'annulation des arrêtés de dérogation relatifs au campagnol amphibie, le 15 octobre dernier.
Les impacts environnementaux du projet seront également au coeur de l'audience en appel qui aura lieu le lundi 7 novembre à 14 h à la Cour administrative d'appel de Nantes, concernant les arrêtés «loi sur l'eau» et «espèces protégées», ainsi que la déclaration d'utilité publique du programme viaire.
Nous vous en souhaitons bonne réception.
Cordialement
Agnès Belaud
Monsieur le Ministre de la Justice
Jean-Jacques Urvoas
Nantes, le 13 octobre 2016
Objet : Projet d’aéroport de Notre-Dame des Landes
Monsieur le Ministre,
Nous venons vers vous en tant que Collectif de juristes et avocats opposés au projet d’aéroport du Grand Ouest.
Vous avez récemment pris la parole dans les média sur ce projet, en votre qualité de Garde des Sceaux, en affirmant que «le droit dit oui, la population dit oui» au projet, et en précisant que vous utiliserez «les moyens pour que le droit passe», et que l’aéroport se construise. Ces paroles font écho à celles du Premier ministre, qui a confirmé il y a peu qu’une évacuation du site de Notre-Dame des Landes et un début des travaux étaient envisagés «à l’automne».
De tels propos justifient quelques éclaircissements de notre part, notre collectif ayant suivi depuis de nombreuses années les développements juridiques afférents au projet d’aéroport.
En premier lieu, nous tenons à rappeler, contrairement à de nombreuses affirmations, que les recours relatifs à ce projet ne sont pas «épuisés», et que le temps du droit dans cette affaire n’est aucunement passé, comme vous le laissez entendre.
La légalité des arrêtés environnementaux adoptés à la fin de l’année 2013 (espèces protégées et loi sur l’eau) est ainsi étudiée actuellement par la Cour administrative d’appel de Nantes, des questions inédites et essentielles étant posées par le projet s’agissant notamment de la compensation environnementale.
Par ailleurs, s’agissant de l’utilité publique du projet, nous vous rappelons que le rapport du CGEDD missionné par madame la ministre de l’Écologie a conclu que ce projet était «surdimensionné», et que l’optimisation de l’aéroport de Nantes-Atlantique «permettrait d’accompagner la croissance du trafic». Nous avons d’ailleurs sollicité, il y a peu, l’abrogation de la déclaration d’utilité publique devant le Conseil d’État sur le fondement de ce rapport. Le recours est actuellement en cours d’instruction, l’État n’ayant pas répondu à notre requête à ce stade.
Le fait que la justice soit encore saisie à l’heure actuelle est lié, au demeurant, en grande partie, au fractionnement du projet en de très nombreuses autorisations pendant près de 10 ans. A ce titre, la Préfecture a très récemment publié deux arrêtés relatifs au Campagnol amphibie, dont nous venons de solliciter l’annulation devant le Tribunal administratif de Nantes, ces derniers étant en relation directe avec les arrêtés dont nous contestons la légalité devant la Cour administrative d’appel. En outre, le permis de construire relatif à l’aérogare n’a aucunement été délivré à ce jour, l’instruction de la demande déposée en avril 2013 ayant été suspendue.
Comme vous vous en doutez, ce fractionnement du projet a eu pour principale conséquence d’empêcher le public d’avoir une vision globale et sincère sur ses coûts et avantages réels, et les alternatives crédibles à sa réalisation.
En second lieu, le droit auquel vous faite référence inclut également le droit européen, que l’État français doit respecter. Or, nous vous rappelons qu’une procédure d’infraction à l’encontre de l’État français est toujours en cours s’agissant du projet d’aéroport du Grand Ouest, en l’absence d’évaluation globale des impacts environnementaux du projet.
Si l’État a choisi la révision du schéma de cohérence territoriale (SCOT) Nantes-Saint-Nazaire pour tenter de régulariser ces insuffisances, la Commission européenne a rappelé à plusieurs reprises que les travaux ne pourraient commencer avant l’adoption définitive du SCOT. Cette dernière ne pourra intervenir avant le début d’année 2017, une enquête publique étant actuellement en cours.
Tout engagement des travaux avant l’adoption définitive du SCOT témoignerait donc d’une violation manifeste du droit européen par l’État français.
En troisième lieu, en rappelant que «la population a dit oui» au projet d’aéroport, vous avez également précisé avoir vous-même besoin de cette infrastructure «en tant que Breton».
Nous ne pouvons que constater le caractère paradoxal de ces propos, le Gouvernement auquel vous appartenez ayant délibérément circonscrit le périmètre de la consultation du 26 juin à la Loire-Atlantique, en écartant les Bretons, qui sont pourtant financeurs d’un projet qui se réclame du «Grand Ouest».
L’organisation d’une consultation, sur la base d’une ordonnance dont la légalité est toujours actuellement contestée devant le Conseil d’État, dans un périmètre opportunément restreint et s’agissant d’un projet qualifié de surdimensionné par les experts du CGEDD, paraît donc bien éloignée d’une validation massive du projet par «la population» dans son ensemble. Les sondages réalisés au moment de la consultation ont, au demeurant, démontré que le Non l’aurait emporté en cas de réalisation de la consultation à une autre échelle, témoignant de la volatilité de la notion de démocratie dans un tel contexte.
En réalité, les différences de position sur le projet d’aéroport de Notre-Dame des Landes au sein même de l’exécutif de notre pays sont le reflet des difficultés juridiques irréductibles posées par ce projet d’État, et des nombreuses interrogations qu’il suscite quant à la cohérence de l’action gouvernementale sur le plan économique et environnemental.
Nous espérons que votre connaissance de la chose juridique, en tant que Maître de Conférences, vous amènera à percevoir les enjeux liés à une remise à plat de ce projet en prenant en compte l’état de notre société en 2016, et vous incitera à refuser tout engagement des travaux dans les mois qui viennent, afin que la justice puisse sereinement se positionner sur la légalité de ce projet avant une destruction irréversible du site de Notre-Dame des Landes.
Nous restons, bien évidemment, à votre entière disposition pour tout échange sur ce dossier.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Garde des Sceaux, l’expression de notre haute considération
Le collectif de juristes et avocats opposés au projet d’aéroport de Notre-Dame des Landes
Copie à :
- Monsieur le président de la République
- Monsieur le Premier ministre
- Madame la ministre de l’Écologie
Note ABP
CGEDD : Le Conseil Général de l'Environnement et du Développement Durable.
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Maryvonne Cadiou reprend
Je me souviens très bien qu'au début il a été question de référendum, puis c'est devenu Consultation...
Par quel tour de passe-passe, pour quelle raison ?
Justifiée ou pas quelque part ? ?
L'Acipa l'a bien remarqué et fait remarquer
Cela a bien sûr beaucoup moins de force (pas la vôtre !), de poids, c'est même nul...
réponse : Consultation : on vous consulte, puis on fait ce que l'on veut selon le résultat.
Les mots ont un sens et ce n'est pas pour rien que c'est ce mot qui a été choisi.
Quant a Valls, Urvoas, retailleau et autres (ainsi que les juristes) qui nous expliquent qu'il faut que «l'état de droit soit respecté» EH BIEN CHICHE !
La France n'a aucun droit à Nantes et partout en Bretagne car le soit disant accord de 1532 n'est pas un traité. Au plan international et pour que «l'état de droit soit respecté » le seul lien juridique est le traité de Nantes de 1499 qui dit :
clause 1: pérennité du style de l'État
clause 4 : seule une juridiction Bretonne (et non pas tribunal français) est apte à juger en Bretagne
clause 12 : Aucune éxécution de mandements ni exploits (d'huissiers) en Bretagne. (donc pas d'expulsions)
Mais comme ces «juristes» font du droit étranger (français) alors, «l'état de droit» n'est pas respecté !
Car la France n'est pas le pays des droits de l'homme (120 prisonniers politiques Bretons, Basques, Corses) et ne respecte pas les engagements internationaux qu'elle signe : Charte de l'ONU 1947 et Charte sur les droits des peuples autochtones 2007. (Bretons, Corses, Kanaks, Polynésiens...) (respect des territoires, langues, coutumes ...etc et devoir d'y associer les populations)