Malgré une crise du monde agricole en France particulièrement sévère et récurrente, il n' y a eu aucun débat au Parlement européen et encore moins une décision de Bruxelles ces derniers 30 jours pour répondre aux agriculteurs et tout spécialement à la demande des producteurs de viande afin de rendre obligatoire l'étiquetage de l'origine de la viande à l'ensemble de l'Europe et à tous les produits, y compris quand la viande est juste un des ingrédients. Pourtant un rapport de la Commission européenne souligne que 90% des consommateurs sont en faveur d’un étiquetage de l’origine de la viande dans les aliments transformés.
En France, il y a bien eu la loi Hamon en 2014 mais cette loi est restée caduque car au dernier moment Benoît Hamon a admis que c'est Bruxelles qui décidera et Bruxelles ne suit pas du tout. Contacté par ABP, Thierry Merret pense qu'il faut «oublier la loi Hamon» et «organiser un partenariat consommateur-producteur afin de faire pression sur les grandes et moyennes surfaces pour n'accepter sur leurs étalages que des viandes et des produits alimentaires étiquetés avec la source de tous les ingrédients». Cette solution est basée sur le fait que, selon l’Association nationale de défense des consommateurs et usagers (CLCV), près de 80 % des Français veulent connaître l’origine de leurs produits.
Bruxelles subit le dictat de la majorité des États, surtout de l'est de l'Europe, qui sont contre l'étiquetage. Il s'agit pour eux de défendre les intérêts de leur industrie alimentaire. Le Parlement européen est aussi sous l'influence des grands groupes de l'alimentation. Il y a aussi le précédent de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) qui, en octobre 2014, a donné tort aux États-unis qui étiquetaient l'origine de la viande. (voir le site) . L'OMC a affirmé que cela était contraire aux lois du commerce. Le Canada aurait perdu des milliards de dollars en exportations de viande, les Américains préférant acheter de la viande américaine plutôt que de la viande canadienne. Les faits : 1) le patriotisme économique se développe partout dans le monde et 2) le souci du consommateur est de consommer local afin de baisser son empreinte carbone (dûe aux transports). Partout les consommateurs préfèrent acheter des produits locaux.
Dans un communiqué paru jeudi dernier, la FDSEA pose la question :
«Étiquetage de l’origine : pourquoi les GMS ne l'exigent-elles pas de leurs fournisseurs ? Depuis de nombreux mois, la FDSEA du Finistère exige que l’étiquetage de l’origine soit rendu obligatoire pour tous les produits alimentaires, y compris les produits transformés et les plats préparés. Lors des rencontres avec les députés le samedi 30 janvier, la FDSEA et les Jeunes Agriculteurs ont remis la pression sur les élus politiques. Alors que la France refuse obstinément de légiférer sur la mention d’origine pour les produits transformés, ce type d’information est disponible pour le consommateur chez certains de nos voisins européens, comme au Royaume-Uni. Pourquoi la France s’y refuse-t-elle ? En attendant la mise en œuvre d’un décret rendant obligatoire l’étiquetage de l’origine dans les produits transformés, la FDSEA exige que les GMS se positionnent clairement sur l'étiquetage obligatoire des produits transformés ! La FDSEA leur demande d’anticiper une future réglementation en exigeant dès maintenant de leurs fournisseurs un étiquetage d'origine sur les produits transformés. Comme il s’agit d’une demande forte et constante du citoyen consommateur[1] et des agriculteurs français, les GMS ont tout intérêt à jouer le jeu.»
L'étiquetage de tous les produits agricoles bretons bruts ou ingrédients est très important pour l'agriculture et l'agro-business bretons car il permettrait aux Bretons de capitaliser sur la qualité d'un terroir reconnu internationalement jusqu'en Chine. L'association [[Produit en Bretagne]] avait compris ça dès 1995 et a fait un travail remarquable à ce sujet. On ne peut que saluer aussi des entreprises bretonnes comme le Pâté Hénaff qui va jusqu'à mettre la photo de l'éleveur de porcs sur la boîte de pâté. «Nous avons été des pionniers dans la traçabilité».
Il est inacceptable que la charcuterie corse soit faite avec du porc breton sans que le consommateur le sache ou même que les Italiens mangent du jambon sans savoir qu'il est issu de porcs bretons, ou que le lait utilisé dans tel ou tel beurre ou fromage soit d'origine bretonne sans que le consommateur ne le sache. Il est aussi dommageable qu'un consommateur breton achète une boîte de raviolis sans savoir que le boeuf est roumain. Finalement, il serait intéressant de vérifier que dans les contrats qui ont été signés à Carhaix avec le chinois Synatra, une clause a bien été introduite pour que le label «lait breton» soit bien inscrit sur les boîtes de lait en poudre qui seront vendues dans les supermarchés chinois.
En 2013, l'opinion publique avait été alertée en force, les Britanniques avaient retrouvé de la viande de cheval produite en Pologne dans leurs hamburgers et les Français de la viande de cheval dans des lasagnes, le hachis parmentier et le moussaka, tous labellisés pur boeuf. Auchan, Leclerc, Carrefour et Picard ont tous vendu ces produits. Depuis l'Angleterre a imposé l'étiquetage. Pas la France.
Le constat est amer et dépasse de loin le problème de l'agriculture. Il montre que les décisions de Bruxelles, ou l'absence de décisions, ne sont pas dans l'intérêt des consommateurs donc des citoyens mais bien représentent la somme des intérêts économiques des États qui composent l'union. Certes, l'intérêt des États n'est pas forcement négatif. Ne pas se faire la guerre en est un qui a son poids et l'Europe a réussi ce pari. Nous vivons en paix depuis ans 75 ans. Certes, mais si des pays comme la France continuent à se désindustrialiser et à se désagricultariser, et donc à s'endetter, qui peut garantir sa sécurité ?
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