La première contradiction touche à l'égalité devant la loi et met Manuel Valls en porte-à-faux avec les principes mêmes de la République. La loi s'applique à tous et de la même façon. Ce fut même le gain majeur de la révolution de 1789. En contradiction avec le président de la République, Manuel Valls ne veut pas faire une proposition de loi privant de nationalité n'importe quel Jihadiste de citoyenneté française. Il veux réserver cette déchéance aux seules personnes ayant deux «nationalités». ««Nous ne pouvons pas créer des apatrides»», a expliqué le Premier ministre.
Les cafouillages, l'indécision du gouvernement, viennent du fait de la confusion, voulue en France, entre nationalité (une appartenance à un groupe, héritée, consciente ou pas) et la citoyenneté (des droits et des devoirs encadrés par la loi, comme le droit de vote). Si la France reconnaissait les nationalités des gens - même devenus citoyens français -, on ne parlerait que de déchéance de la citoyenneté et la problématique de personnes apatrides ne se poserait même pas. En entretenant la confusion entre nationalité et citoyenneté, Valls tombe dans le piège qui ne pouvait que se refermer sur lui, le grand champion des valeurs de la République, tant l'abus du langage a été violent, outrancier, et d'une perversité sans égal dans l'histoire politique du monde depuis 225 ans. Les mensonges ou les injustices internes des États finissent toujours par se confronter à la dure réalité de la politique étrangère ou de révoltes violentes comme celle de la guerre d'Algérie. La guerre d'Algérie n'est que l'effet boomerang d'un jacobinisme forcené. L'apparition du terrorisme en France à les mêmes raisons.
Les Jihadistes ont aussi des droits et ils ont le droit de choisir leur nationalité, leur nation (ici choix veut dire redécouverte dans le sens que lui avait donné Morvan Lebesque), donc leur appartenance, citoyens français ou pas. Du fin-fond de leurs cellules de délinquants dans une prison de la grande banlieue, un jour, il font une découverte à la [[Morvan Lebesque]], mais eux se découvrent arabes et personne ne peut les en empêcher...
Un combattant de DAESH, né en France, citoyen français uniquement ou citoyen aussi de la Tunisie ou du Maroc, a parfaitement le droit de choisir et de revendiquer la nationalité arabe dont il a hérité des parents. Islam ou pas en bonus. En allant combattre avec DAESH, il n'est certainement pas «apatride» car sa nouvelle patrie est le Califat établi en Syrie et en Irak. Qu'il n'ait pas un passeport reconnu par la communauté internationale ne doit pas être un facteur de réserve car avec le temps ils finiront par avoir cette reconnaissance...
Les tapis de bombes, guidées ou pas, russes américaines, ou françaises, ne pourront pas changer le fait que des Français, des citoyens français, nés en France ou pas, ont décidé, et continueront à décider, un beau matin, qu'ils appartiennent à la nation arable et pour certains à la nation de l'Islam. Rien ne pourra changer ces choix et ce droit fondamental. Rien de pourra changer le sentiment de révolte devant la contradiction majeure de la République : une laïcité pour les religions omniprésente et une absence de laïcité pour les cultures. Il y a entre l'Etat Français et la culture française le même favoritisme que sous la monarchie avec l'Église. Il y a un double standard, une contradiction majeure que tous les discours des politiques ne pourra effacer pour ceux qui sont capables de raisonner et d'aller au-delà des simples émotions patriotiques et du nationalisme d'État.
Même une victoire temporaire de la coalition, même des valeurs de la République martelées dans les caboches depuis le biberon, ne pourront empêcher des citoyens de faire allégeance à des nations et pour reprendre une expression de Jean-Pierre Le Mat «donner du sens à leur vie» en s'inscrivant dans une appartenance et en assumant un héritage.
Les frontières du Moyen-Orient ont été tracées à coups de crayon sur une table - comme la réforme territoriale française de 2014. Elles ont été finalisées au Traité de Sèvres en 1920, laissant de côté les Kurdes, les Arméniens, divisant l'Arabie en protectorats français et britanniques qui devenaient Syrie, Liban et Irak. Ce fut une grande insulte aux droits fondamentaux des peuples à avoir un État. La République n'était pas du tout en contradiction avec ses principes -- car elle faisait seulement au Moyen-Orient ce qu'elle avait toujours fait en France depuis la Révolution : nier les autres nationalités ou peuples de son territoire métropolitain ou de ses colonies.
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