A propos des récents attentats de Paris

Communiqué de presse publié le 17/11/15 14:03 dans Cultures par Simon Alain pour Université Populaire de Philosophie Bretonne (UPPB)
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Si nous avons une pensée, voire une prière, pour toutes les victimes des attentats parisiens du vendredi 13 novembre dernier (y compris les terroristes kamikazes), il nous faut aussi “réfléchir” aux attentats eux-mêmes, c'est-à-dire à leur "signification". Ce qu'aucun média parisien ne semble prendre la peine de faire, flattant au contraire, et à outrance, la pure “réaction” (nationaliste à souhait).

Le plus choquant dans ces attentats du 13 novembre 2015 est le manque total de compréhension de l'événement, et donc de réflexion de la part des médias (pour la plupart parisiens) censés en rendre compte. Ou plutôt : le manque total de réflexion et donc de compréhension, si “réfléchir” c'est "comprendre" (du latin "prendre avec"), c'est-à-dire “embrasser le plus large spectre possible de significations”. Ce que les Grecs entendaient dans l'Antiquité avec leur terme de “legein”. Un verbe signifiant “recueillir” ou “ cueillir”, et qui a donné “Logos” (traduit en français par “logique”, et qui a donné “raison”). Fameuse “raison” dont on affuble le pauvre René Descartes, et qui caractériserait sa fameuse “méthode”.

Or, comme nous ne cessons de le dire depuis 2012, la "méthode" de Descartes consiste moins à “raisonner à la française” qu'à "réfléchir" (et on osera dire : en un sens breton..., puisque Descartes "viendrait de Bretagne", ainsi que nous l'ont appris les parisiens eux-mêmes au 19ème siècle). En effet, le mot “méthode” provient du grec “méta-hodos” (“l'au-delà du chemin”, entendant par “chemin” celui de la réflexion, soit “le retour en arrière”, pour mieux comprendre les événements, et non “le bond en avant de la raison”).

Revenons donc sur ce terme : réfléchir consiste à “faire retour sur un événement”. Non pour "l'analyser de l'extérieur" (à partir de la réaction ou du réflexe que cet événement provoque - en l'occurrence, dans le cas des attentats parisiens, la légitime révolte -), mais pour en extraire "toute la signification de l'intérieur" (de quoi l'événement témoigne-t-il, c'est-à-dire de quelle réalité non perçue “a priori” et que la réaction primaire ne prend justement pas en compte?).

Nous devrions tous, et plus encore en tant qu'occidentaux, profondément nous remettre en question, et donc réfléchir, à l'occasion de ces attentats (inédits par leur ampleur et leur signification, au point que la planète entière se sente concernée). Or, les médias sont au contraire dans la pure réaction, flattant un populisme et un simplisme absolument pas à la hauteur de la véritable horreur : petites caricatures, petits dessins, petits slogans ou petits logos (“l'amour contre la haine”, “aimons-nous les uns les autres”, “nous sommes tous Paris”…). Comme si nous étions incapables de comprendre que ces actes terroristes témoignent de toute cette horreur qui se joue ailleurs (notamment en Syrie). Horreur dont nous ne savons au fond strictement rien, et dont nos gouvernants sont, en partie et depuis des années, responsables.

La philosophie nous apprend donc que vivre véritablement “ce qui se passe” (l'événement) ne revient pas à y réagir de l'extérieur, mais à le comprendre de l'intérieur. En l'occurrence, personne ne semble vouloir comprendre à Paris que, dans cette tragédie, le premier ennemi, c'est soi-même, c'est-à-dire celui qui, précisément, réagit (et dont il faut en premier lieu se méfier). L'attentat n'est en ce sens que le symbole de notre incapacité foncière à nous remettre en question et à réfléchir. Pour le formuler autrement, l'Etat Islamique ou Daesh, n'est qu'une conséquence indirecte de notre comportement d'occidental depuis des années ! Les parisiens ne semblent pas vouloir le percevoir, embrigadés qu'ils sont dans leur “bulle médiatique et idéologique”, si confortable et à l'air, hélas, artificiel...

Daesh en 2015, c'est aussi et d'abord l'expression de la misère, de la désespérance et de la souffrance de toute cette “périphérie occidentale ” comme le formulait en 2004 Jean-Christophe Rufin dans son roman intitulé “Globalia” (cf infra). “Périphérie”, ou “province”, qui ne comprend pas que l'on puisse vivre en 2015 à Paris dans de si beaux et si grands appartements, aller régulièrement à des concerts ou à des matchs de foot, et prendre des verres en terrasse “comme si de rien n'était”. Alors que le reste du monde souffre tant la misère, au point de se faire littéralement exploser sous nos fenêtres, à l'instar de ces moines vietnamiens qui se faisaient enflammés vivants devant les forces américaines dans les années 1960...

Il s'est peut-être moins agi vendredi dernier d'“un attentat contre la France” que d'un attentat contre Paris (et contre son insolente “joie de vivre” dans une année noire comme 2015). Mais après tout, la France (ou l'idée que l'on se fait de la France) n'existe aussi qu'à Paris… Paris d'argent, d'inconscience et d'arrogance (que tout le monde confond à l'étranger avec “l'ensemble du territoire”). Personne n'est donc plus “à l'abri” nulle part : à Paris et sur “le reste du territoire” (que les parisiens osent encore appeler “province”, comme si celle-ci n'était pas française comme eux...). Nulle part à l'abri, et surtout pas derrière nos écrans de télévision, nos smartphones et autres "journaux nationaux" qui ne nous disent plus rien de ce qui se passe en réalité, ni de nous-mêmes. Allant même jusqu'à trahir ce qu'il faudrait ressentir face à l'événement (l'urgent besoin de "réfléchir", et non de "réagir") !

Ainsi que le formulait l'intellectuel récemment disparu (le 4 novembre dernier), René Girard (qui n'avait rien d'un “illuminé”), nous sommes définitivement entrés dans une phase apocalyptique de nos sociétés, soit "l'engendrement de la violence par la violence". Comme Girard l'expliquait fort à propos, nous désirons tous la même chose et, dans le même temps, nous refusons de prendre en compte nos différences réelles (croyant ainsi être tous les mêmes). Soit la définition de "l'Enfer sur Terre" : l'incapacité à reconnaître l'autre dans sa réelle différence. Ainsi qu'en témoigne l'idéologie française (ou parisienne) depuis des siècles, notamment en ce qui concerne la spécificité bretonne. Une spécificité qui est d'âme ou d'esprit, avant d'être “culturelle” ou “sociologique”. Paris préférera donc disserter à foison, en ce mois de novembre 2015, sur ces notions “philosophiquement abstraites ” que seraient celles de “Mal, de Néant ou d'Injustice” plutôt que de remettre en question son manque total de connexion à ce qui s'appelle en philosophie "la réalité" (qui est avant tout, comme le rappelle de manière géniale René Descartes, "une exigence de notre esprit").

Pour l'UPPB-BI,

Simon Alain.

a) Le cycle de l'automne 2015 de l'UPPB est toujours en cours : (voir le site)

b) "Globalia" (un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre) est un roman d'anticipation développant une dystopie (ou contre-utopie) écrit par Jean-Christophe Rufin et publié en 2004.

Une sorte d'État mondial, Globalia, assure à ses citoyens la sécurité, la prospérité et une certaine forme de liberté à partir du moment où ils ne remettent pas en cause le système. Les zones sécurisées sont principalement situées dans l'hémisphère nord, tandis que les non-zones, essentiellement dans l'hémisphère sud, sont réputées inhabitées et servent de refuge à des populations que le pouvoir central qualifie de « terroristes ». Baïkal, un jeune Globalien, cherche à fuir cette société qui lui pèse. Ce jeune homme se fait enrôler dans une machination que Ron Altman a inventée. Celle-ci consiste à créer un ennemi public numéro un pour allier les globaliens contre cette menace extérieure des "non-zones".

Grands points de réflexion :

•Le besoin d'un ennemi pour la cohésion d'une société et la dérive totalitaire au nom de la lutte contre celui-ci.

•La faiblesse du pouvoir politique face au pouvoir économique

•La difficulté de concilier liberté et sécurité (bulles/Protection Sociale).

•Les risques de l'étude historique et de la mémoire historique pour la paix en société.

•La société a-t-elle le droit d'exclure des individus au nom de son bien-être (non-zones).

•L'infantilisation des masses au nom de leur bien-être (Fête de la pluie).

•Les risques de la jeunesse pour la société (Contrôle des naissances et crainte des déviances).

•Le rôle des médias dans la perception de la société et sa cohésion (Mise en scène des attentats/moniteur).


Vos commentaires :
Samedi 4 mai 2024
Nous ne sommes pas une terre d'Islam. Dans la France qui travaille dur, qui éduque et transmet, on ne brûle pas les voitures. Dans ce cadre, si des Français peuvent être de confession musulmane, c'est à la condition seulement de se plier aux moeurs et au mode de vie que l'influence grecque, romaine, et seize siècles de chrétienté ont façonné. Chez nous, on ne vit pas en djellaba, on ne vit pas en voile intégral et on n'impose pas des mosquées cathédrales.
Qui n'a pas vibré au sacre de Reims et à la fête de la Fédération n'est pas vraiment Français.
Oui! Oui! et Oui!
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