De quel progressisme, la liste bretonne aux régionales sera faite ?

Chronique publié le 1/07/15 18:51 dans Politique par Christian Rogel pour ABP
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Christian Troadec, conseiller départemental et maire de Carhaix (Finistère), a dévoilé clairement son intention de mener une liste régionaliste aux élections régionales de 2015 et à l'élection présidentielle de 2017.

Les forces bretonnes en présence

Par hypothèse, seuls peuvent modifier le destin de la Bretagne que les formations, clubs et autres groupes qui y réfléchissent et agissent pour cela. Cela s'est toujours émietté en reflet de la bigarrure bretonne.

Après guerre, une vision conservatrice dominait dans le faible « mouvement breton » avec une forte minorité qui valorisait le Parti national breton (dissous en 1944), malgré son inclination vers les régimes très autoritaires. Nombre d'élus de droite régionalistes firent un bout de chemin avec les nationalistes bretons dans le Célib.

Dans un contexte européen et même mondial, une aile jeune reprenait, en 1964, l'option « progressiste » et fédéraliste de la Ligue fédéraliste de Bretagne, restée inaudible dans les années 30. Ces aspirations à une révolution sociale voulaient s'appliquer aux salariés (les travailleurs), dont le nombre était, alors, en forte croissance.

L'Union démocratique bretonne (UDB) voulait s'écarter des formations bretonnes existantes et singeait la rhétorique en vigueur dans les « partis ouvriers » qu'étaient encore la SFIO (futur PS) et le Parti communiste, appelant à la saisie des moyens de production.

Passés le bouillonnement des années 70 et l'expérience, faite d'espérances fracassées, du PS mitterrandien au pouvoir, il ne reste qu'une vague notion de redistribution et quelques libertés individuelles et sociales pour caractériser le progressisme. L'écologie politique de gauche a proposé une remise à jour, mais, le fonctionnement nomenklaturiste du PS force les partis écologistes à construire des machines bancales, incapables de canaliser les inévitables divergences et qui renient leurs idées régionalistes.

L'UDB, qui fut la plus forte organisation avant 1990, s'est rétractée en nombre de militants et émiettée en diverses fédérations ou groupes locaux en partie autonomes. Cela s'est traduit aux dernières cantonales par des alliances bariolées. Le contenu du discours général devenu de plus en plus convenu et est réduit à une autonomie peu définie et à une orientation progressiste de moins en moins mesurable.

Les autres forces bretonnes qui ne sont guère que des clubs (le Parti breton et et Breizh-Europa ne ne paraissent importants que, parce qu'ils sont des nains un peu plus grands) ne sont guère vaillantes, mais, elles peuvent avoir l'impression d'apercevoir un peloton udébiste moins dominateur et d'arriver à combler l'écart.

Le dilemme de Christian Troadec

Christian Troadec fait le grand écart politique en conservant une image de gauche non socialiste dans la région de Carhaix tout en s'alliant avec des formations qui se disent apolitiques (Parti Breton et Breizh Europa) ou avec des agriculteurs et des artisans (mouvement des Bonnets rouges initié par la FDSEA 29, un syndicat patronal de routiers et… Force ouvrière 29).

Ce mouvement n'avait pour but que de redéfinir un fonctionnement politique, hors des « diktats parisiens » et des jeux électoraux stériles. Animé par des petits entrepreneurs et des anciens membres de formations bretonnes, il ne peut qu'avoir de la méfiance pour l'UDB du fait de ses compagnonnages avec le PS et de sa tendance à délivrer une parole politique péremptoire.

Christian Troadec qui a su porter dans les médias parisiens la parole anti-jacobine, mais, qui est un homme politique candidat à diverses élections se trouve devant un dilemme : conserver son image de centre gauche nécessaire pour battre le PS aux législatives ou appeler à un rassemblement ou front plus large basé sur une perception d'une Bretagne, plus évolutive et plus agile, car libérée de la chape de plomb parisienne et combattant par tout les moyens la fusion avec les Pays-de-la-Loire.

À six mois des élections régionales, la liste régionalistes peine-t'elle à se mettre en place ?

Le 8 mai, l'UDB faisait un pas vers Christian Troadec en annonçant qu'elle allait prendre langue avec lui, reconnaissant ainsi son statut de figure politique majeure en Bretagne (voir notre article).

Le 19 juin est tombée l'annonce d'un accord entre le Mouvement Bretagne Progrès, club politique du maire de Carhaix, et l'UDB (voir notre article) et (voir notre article), mais, Breizh Europa faisait alors savoir qu'il ne participerait pas à un accord pour le motif mystérieux de « (n'avoir pas été convié) à aucune table ronde pour évoquer le fond du projet ou la stratégie électorale » (voir notre article).

Au contraire, le Parti Breton, réuni en convention extraordinaire le 27 juin, se montrait prêt à participer aux listes (il y en 4, 1 pour chaque département de la Bretagne amputée).

L'UDB, bien qu'elle parle de « rassemblement des forces progressistes en Bretagne » ne semble pas exclure le Parti Breton, puisque la version en breton du communiqué du 19 juin précisait : « pas de signature du Parti Breton pour le moment, mais elle pourrait venir dans les jours prochains » (N'eus emglev ebet, evit ar poent, gant Strollad Breizh, met gall' a rafe bezañ sinet an devezioù o tont.) (voir le site) .

Christian Troadec parle bien de « rassemblement basé sur l'esprit d'une plate-forme pour tous les progressistes de Bretagne qui ont envie de changer les choses sur le terrain » (Bretons, juin 2015), mais, on voit mal l'UDB, affaiblie par les mauvais résultats des départementales, capable d'empêcher Christian Troadec de faire alliance avec ses alliés de toujours.

Une liste régionaliste, pourquoi faire ?

Cela fait 16 mois que Christian Troadec a annoncé réfléchir à une candidature à la présidentielle et il a concrétisé cette intention en allant en Alsace et en obtenant une promesse de parrainage d'un maire rural bien implanté. Pour la régionale comme pour la présidentielle se dessine un axe de politique française : faire barrage au Front national et offrir une possibilité de contester, sans se jeter dans les bras d'autres menteurs professionnels, les gestions calamiteuses des Jacobins en proposant de « redonner la parole aux gens et aux territoires ».

Pour la Bretagne, comme pour les autres territoires, il faut créer les conditions « pour aller de l'avant,…entreprendre, imaginer de nouvelles politiques » (Bretons, juin 2015).

Ce programme est volontairement flou et demande à être précisé pour chacune des deux élections. Lors de la présidentielle, il s'agira vraiment de proposer une autre organisation territoriale de la France et de mobiliser les déçus des socialistes et des sarkozistes.

À l'élection régionale (on ignore qui peut faire campagne en Loire-Atlantique) rectificatif du 2-07 : une liste, genre Front breton a été annoncée, la question importante sera bien celle d'un large front breton où des tendances politiques cohabiteraient malgré leurs divergences.

Il se dessine un Christian Troadec, figure rassembleuse qui fait taire les dissensions et les polémiques agitant quelques dizaines de personnes. Réussira-t'il à tenir tous les fils ?

Christian Rogel

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Vos commentaires :
Lundi 6 mai 2024
@8tt!g. Tour à fait d'accord et je l'ai déjà dit à Christian Troadec à une autre occasion (les européennes) Une liste «BRETAGNE» présente dans TOUS les départements des Pdl aurait permis ou permettra de voir à quel point, TOUS ces départements sont peuplés de Bretons ou amoureux de la Bretagne. Il n'est que de voir les immatriculations des voitures , 53, 44, 37; 49 au moment des vacances.
@Christian Rogel et JP. Touzalin. Ca a commencé avec le FRONT populaire en 1936. Les Espagnols utilisente Frente. Avez-vous quelques références à me donner en allemand ; en anglais, en Suédois ou autre pour me dire OU le mot Front a une autre consonnance que marxiste ou, si vous préférez "gauchistes apparentés communistes. Le F National français esr-il autre chose ? Paul Chérel
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