Élections régionales 2015 - Un pari et un parti pour la Bretagne

Chronique publié le 12/06/15 23:56 dans Politique par Yves-François Le Coadic pour Yves-François Le Coadic

Dans les années 1970, de l'autre côté de l'Atlantique, au Québec, province du Canada, le pari fait par un nouveau parti politique, le Parti Québécois (PQ), de l'émancipation du peuple québécois et d'une indépendance du Québec pouvait sembler utopique. Peut-on faire le pari que, de façon analogue, l'année 2015 verra, à l'occasion des élections régionales, une nouvelle coalition politique entraîner la Bretagne sur la même voie ? Au Québec, deux conditions ont été à cela nécessaires : une mutation identitaire et une alliance nationalitaire.

La mutation identitaire

Alors que la province du Québec existait depuis longtemps dans un Canada fédéral (1867), les Canadiens de langue française continuaient de s'appeler « Canadiens Français ». Minoritaires dans l'ensemble canadien, les « nègres blancs d'Amérique » vivaient mal la domination anglo-saxonne qui faisait, par exemple, de Montréal la première ville française de langue anglaise au monde ! Et donc, comme dans toute lutte de libération nationale, naquirent des mouvements « souverainistes » non-violents et un mouvement indépendantiste qui eut sa branche armée, le Front de Libération du Québec (FLQ). L'assassinat du ministre du Travail de la province en octobre 1970 précipita la prise de conscience nationale au Québec et vit le Canadien Français ne plus vouloir s'appeler comme tel mais vouloir s'appeler Québécois. Avec en arrière-plan, bien entendu, le désir de se réaliser pleinement en allant vers l'indépendance d'avec le Canada, par des voies pacifiques.

En Bretagne, pareillement, la colonisation des esprits par la doxa française est encore bien vive. Cette colonisation fait que tout Breton de Bretagne est Français et Breton i.e Franco-Breton. Mais il est surtout Français, Français dans sa culture, Français en société et Français en politique. Le Franco-Breton n'ose parler que d'autonomie de la Bretagne. Alors qu'aujourd'hui, en Ecosse, en Catalogne, on parle sans fard d'indépendance, le Franco-Breton va évoquer une possible émancipation politique, sociale et culturelle de la Bretagne.

De fait, jamais une formation politique française en Bretagne n'a envisagé d'accoler à son intitulé le qualificatif « Breton » ou « Bretagne »: pas de Parti Socialiste Breton, un éphémère Parti Communiste Breton, pas reconnu, même combattu par son équivalent français, pas de RPR, d'UMP Bretagne, pas de MODEM breton, pas de VERTS bretons…Les seules formations actuelles à avoir ce qualificatif sont le Parti Breton, le Mouvement Bretagne Progrès, l'Union Démocratique Bretonne, Breizhistance-Parti Socialiste de Bretagne et Breizh Europa.

L'alliance nationalitaire

Le Parti Québécois s'était construit en regroupant plusieurs mouvements souverainistes et indépendantistes qui étaient apparus une dizaine d'années auparavant quand la revendication identitaire avait vu le jour. Parti progressiste, il rassemblait majoritairement, en termes de sensibilité politique, ce qu'en France, on appelle les sociaux-démocrates de gauche et de droite : une sorte d'union des nationalitaires québécois, les «Péquistes ». La cohabitation était apparue indispensable pour gagner la « guerre» de l'indépendance. Une fois cette dernière obtenue c'est-à-dire la « paix » gagnée, les deux sensibilités se seraient probablement séparées. Ce scénario n'a pas vu le jour car les deux référendums posant la question de l'indépendance ont rejeté cette option. Et le Parti est resté à l'identique et a malgré tout été en charge des destinées de la province pendant plusieurs mandatures. Son action s'est révélée très importante, redonnant aux Québécois la maîtrise de leur économie, de leur culture et en particulier de leur langue, le franco-québécois.

En Bretagne, peut-on faire le même pari d'une coalition politique construite sur la même équation politique rassemblant les sociaux-démocrates bretons de gauche comme de droite ? Faire le pari d'un regroupement de toutes les forces démocratiques bretonnes acté par un pacte unitaire « pour aller faire la guerre aux Francs » ! et gagner la paix de l'indépendance.

À l'heure de l'Europe et de l'effacement de la grande puissance des Etats-nations, la Constitution européenne étant adoptée, il est urgent de profiter de cette opportunité de renaissance des peuples européens opprimés. Les combats nationalitaires manifestent la construction d'envies collectives de vivre. Et malgré la France, cette envie est toujours vive en Bretagne.


Vos commentaires :
Donbzh
Vendredi 15 novembre 2024
Très bonne comparaison, sachant que le seul indépendantisme supporté en hexagone est l'indépendantisme Québecois..
Et qu'en Bretagne, certains supportent l'indépendantisme Ecossais mais pas l'indépendantisme Breton???

Qu'appelez-vous nationalitaire plutôt que nationaliste?


YF LE COADIC
Vendredi 15 novembre 2024
nationalitaire = individus défendant la cause d'une nation sans Etat (Pays Basque, Catalogne, Ecosse, Québec, Corse, Bretagne, Kurdistan, Kabylie)

nationaliste = individus défendant l'unité d'un Etat, l'Etat français par exemple!


YF LE COADIC
Vendredi 15 novembre 2024
nationalitaire = individus défendant la cause d'une nation sans Etat (Pays Basque, Catalogne, Ecosse, Québec, Corse, Bretagne, Kurdistan, Kabylie)

nationaliste = individus défendant l'unité d'un Etat, l'Etat français par exemple!


Daniel Houguet
Vendredi 15 novembre 2024
Et nous en Loire-Atlantique ? Que devient-on ?

alan charpiat
Vendredi 15 novembre 2024
Daniel, nous sommes en Bretagne evel just!

Paul Chérel
Vendredi 15 novembre 2024
Très bon article, très mobilisateur, même si la socio-démocratie est une tarte à la crème sans grande signification. Hélas ! Peu de chances d'y arriver. Le Franco-breton domine de très loin. Celui qui ne l'est pas a peur de l'inconnu. L'actuel essai de liste unique des petits groupuscules se réclamant de la Bretagne n'est-il pas mort-né en voyant la première dissension sur le choix de la tête de liste ? Le Français et ses assujettis manquent totalement d'esprit d'indépendance et de liberté. Paul Chérel.

PIERRE CAMARET
Vendredi 15 novembre 2024
J'ai habite 5 ans Montreal .Evidemment les identites ont evolue.Les Quebecois sont Quebecois et non plus Canadiens Francais .
Il y avait eu un referendum , juste avant que j'arrive et l'affaire semblant gagnee pour les independandistes.... la Consequence : Une tres grande partie de l'economie ( Sieges Sociaux , Societes internationals etc....) est partie s'installer a TORONTO ...... et le Quebec en a souffert . Un de ses aeroports a ferme a MONTREAL .
Le QUEBEC jouit actuellement d'une tres , tres large autonomie et si pour l'instant , nous avions cela en Bretagne , je m'en contenterai.
Le Quebecois est francophone , mais son esprit est AngloSaxon ( Education ).Le Quebec est une Nation .
Les Canadiens appelent aussi,d'ailleurs les Indiens , les premieres Nations dans la Terminologie courante .
Je vois peu de comparaison avec la Bretagne .

PIERRE CAMARET
Vendredi 15 novembre 2024
Daniel HOUGUET et Alan CHARPIAT.

Vous avez tort . Je suis de la Presquile Guerandaise et je suis helas ! helas ! helas ! dans les Pays de Loire.
Les Annees passent et je suis toujours PDL avec maitres a Penser : AUXIETTE - JM AYRAULT - GROSVALET .
RIEN DE BOUGE , Defiles , manifestations .... tu parles , amusez vous les gars . Pour nous vous etes Pays de Loire , Region Maritime ( sic) .Circulez , il n'y a rien a voir .


Paul Kerguelen
Vendredi 15 novembre 2024
«En Bretagne, peut-on faire le même pari d'une coalition politique construite sur la même équation politique rassemblant les sociaux-démocrates bretons de gauche comme de droite ?»

Joseph Le Bihan : «On est entouré de conservatismes, de trouille, de paralysie et de vieux précoces», à quoi je rajouterai une RÉELLE volonté d'obtenir la souveraineté!

Hormis cela, oui nous le pouvons. Encore faut-il le vouloir et s'en donner les moyens.

Si on ne peux dénier que beaucoup de Bretons sont devenus français, il y à cependant un travail de fond qui se fait. Avec une offre claire, beaucoup seront prêt à nous rejoindre.

Mais encore faut-il la faire!...


J-J PAGE
Vendredi 15 novembre 2024
Votre liste de partis ou mouvements est incomplète, plusieurs autres formations politiques utilisent le qualificatif «breton» dans leurs dénominations : Le Parti Fédéraliste Européen - Bretagne/Breizh (PFE-BZH), l'Alliance Fédéraliste Bretonne, En-Avant-Bretagne...

MANSKER
Vendredi 15 novembre 2024
Pierre Camaret, bonjour, j'ai un passeport français, cela ne fait pas de moi un français. J'ai aussi un passeport breton et il a bien fait rire des douaniers la dernière fois que je suis passé à un contrôle. Idem L.A, à eux de savoir prendre le train en marche... ou végéter dans une zone riche, oui, mais impersonnelle et dépourvue d'identité. Kenavo !!

PIERRE CAMARET
Vendredi 15 novembre 2024
MANSKER . C'est un autre rapport et c'est une volonte .
J'ai un passeport NeoZelandais ( ce qui m'autorise a vivre en Australie ) J'ai jure fidelite a la Reine , et je me sens engage vis a vis de la NZ .
La LA cela fait 70 ans ??????? et nous sommes au meme point ???? alors :
- En fait les Bretons s'en foutent .
- On s'y prend mal .
- Tout est cloture de l'autre cote et nous ne savons pas ouvrir .
Il y a multiples causes . Je suis legaliste.La LA est Pays de Loire et je n'en suis pas heureux .Je crois au Pays reel et non virtuel.
J'ai essaye de mon cote de faire quelque chose pendant 56 ans maintenant . J'ai echoue .
Nous n'avons pas encore reussi a retourner le rapport de force... en partie a cause de la trahison de notables Bretons ( tres classique ).
Je me suis donne l'écheance des Regionales... pour mesurer la tendance . Les Partis ( sic) Bretons ne donnent que peu de signes d'unite , a ce sujet . Preferent fricotter dans de fumeuses alliances electorales . Desole ce n'est pas mon approche .

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