A l'étonnement de beaucoup, le Parti socialiste subit une défaite dans ce qui semblait un bastion, les Côtes d'Armor où une partie du «Trégor rouge», autour de Guingamp, est emportée par la Droite. L'expliquer par une éventuelle désunion de la gauche est hypothétique, vu les faibles résultats des écologistes et la chute continue du «communisme rural».
On note deux points de résistance du PS, Callac et Rostrenen, car, dans le deuxième canton, très rural, la jeune pousse socialiste, Sandra Le Nouvel, élevée en pépinière, mais originaire de Saint-Gilles-Pligeaux, fait 66,85% et semble même recevoir une fraction du vote FN. Le non-désistement accompagné d'un communiqué défiant de l'UDB locale n'empêche pas un report partiel des voix. Un chassé-croisé des électeurs est aussi probable.
Tout l'Est du département, conquis par la génération de Charles Josselin, retourne à la droite qui emporte même l'un des cantons de Saint-Brieuc
Sur cinq départements, le PS passe de 4 à 2 et échappe de peu à la catastrophe. Il suffirait que l'affaire du tract diffamatoire visant le binôme de Christine Le Tennier sur le canton de Concarneau aboutisse à un recours victorieux et un résultat inversé pour que Nathalie Sarabezolles, Nantaise bien peu bretonne, voit sa présidence interrompue (voir notre article).
Les cantons emportés par les socialistes sont très majoritairement urbains et souvent fortement peuplés d'obligés directs ou indirects de l'Etat ou de fonctionnaires territoriaux.
L'Ille-et-Vilaine résiste beaucoup mieux que prévu à la poussée de l'Union de la Droite et du Centre, en particulier au Sud-Ouest, mais le PS est sauvé par les électeurs de la métropole rennaise. Le PS perd des positions dans le Morbihan, en particulier à Lorient et à Vannes, consacrant une majorité de droite encore plus forte.
Les cantons ruraux ou péri-urbains ont accueilli une poussée du Front national qui approche 20% au 1er tour. Marc Le Fur, actuel leader de la droite en Bretagne administrative, voit dans la défaite socialiste la protestation contre l'avantage indû donné aux métropoles par rapport aux petites villes et gros bourgs qui sont les centres multiples de l'activité et de la sociabilité en Bretagne. On ne voit pas qui pourrait le contredire.
La réélection de Christian Troadec dans le canton de Carhaix et celle de son compère du Mouvement Bretagne Progrès (MBP), Christian Derrien, dans le canton de Gourin, fait apparaître une zone du Centre Bretagne, irréductible au clivage droite ou gauche parlementaire. Baptisés régionalistes, les deux «Bonnets rouges» ne manqueront pas de se faire remarquer en revendiquant un groupe politique pour leurs binômes.
A noter que le président du MBP, André Lavanant, n'a pas aussi bien réussi, puisqu'il n'avait obtenu que 7,34% des voix dans le canton de Plabennec, résultat honorable malgré tout (voir notre article).
Les alliances sous le label électoral, «Nous te ferons, Bretagne», conclues entre le MBP, le Parti Breton, Breizh-Europa et même l'UDB (Gourin) ont donné des résultats plutôt décevants (sauf Gourin, 55%) qui n'ont pas reflété la percée qu'avait faite la liste de Christian Troadec aux Européennes.
Les résultats de l'indépendant Lionel Henry à Montfort-sur-Meu et, à Quimper, de Jérôme Abassene (liste d'intérêt local) montrent que label NTFB doit encore acquérir une vraie notoriété, bien qu'en définitive, seule importe l'implantation des candidats et leur capacité à mener une campagne, le label n'étant qu'une aide externe.
L'habileté de Christian Troadec et de ses soutiens est de ne pas fixer un horizon à la résurrection de la Bretagne comme entité politique propre. Des pouvoirs de décision locaux sont réclamés sans définir précisément une «roadmap» et un mécanisme constitutionnel.
Ce flou est, depuis l'effacement des régionalistes depuis 1940, celui du mouvement breton qui ne veut pas se mêler des affaires des autres composantes de la République française. Celle-ci n'est plus une depuis qu'elle mis en place des gouvernements outremer et un statut dérogatoire pour la Corse.
Pour différentes raisons (populations non bretonnes, solidarité efficace avec les autres mouvements régionalistes, le mouvement breton devra se (re)poser la question du fédéralisme en France.
Cette question pourra intéresser, non seulement les Alsaciens, les Basques, les Catalans et les Corses, mais, aussi, les Bourguignons et les Normands réunifiés, les Savoisiens ainsi que les Occitans.
Toutes les régions, pourvu qu'elles soient basées sur des liens forts, seraient concernées au degré qu'elles souhaitent.
L'indépendance ne peut pas être une chance à Vannes et un impensé à Rennes, comme un jeu en solo de la Bretagne est de moins en moins soutenable. Cela pose le problème du devenir du courant indépendantiste qui gardera une aura certaine, mais, la radicalité n'est pas forcément une clé.
Christian Rogel
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■Sur la France en général, il est à noter aussi la montée des régionalistes, montée passée sous silence dans les commentaires. Il n'est de pire aveugle celui qui ne veut pas voir...
Le mouvement breton doit quant à lui en effet se définir non pas de droite ou de gauche, mais comme étant fédéraliste (ce qui sous entend que nous continuerons à être français) autonomiste, ou indépendantiste, et se donner les moyens d'y arriver.
Mais alors une question se pose: Doit-il viser l'autonomie en la considérant comme un premier pas vers l'indépendance? Ou viser l'indépendance pour avoir au minimum l'autonomie, au risque de laisser de coté ceux qui ne veulent que l'autonomie?
Suivant les sondages, 20 à 25% de la population seraient favorable à l'indépendance. Ajoutons à cela le désaveu des partis politiques classiques et une forte abstention.
Nous avons là un terreau favorable. Mais saurons-nous en profiter? Pouvons-nous en profiter si nous sommes nous même dans le flou et présentons 36000 partis plutôt qu'un seul?
En effet, ces élections ont mis en lumière l'écart croissant entre des métropoles qui croient vivre heureusement la mondialisation et qui échappent au vieilles provinces qui en sont exclues. La réponse à apporter me semble la métropolisation, pour séparer institutionnellement les métropole des espaces où un discours régionaliste peut encore porter.
Il est clair que la gauche paie ses trente ans de diabolisation de l'enracinement local, puérilement flétri du nom de fascisme. La réaction est là. Dans la France centrale enfin unifiée autour de la civilisation morbide du pavillon, elle apparaît sous les espèces du FN. Nous devons cependant respecter les électeurs de ce parti maladroit et dangereux. Ce sont des gens honnêtes qui ne demandent rien de plus qu'un État protecteur qui reparle enfin de la nation.
Là où l'unification de la France n'est pas totale, la réponse régionaliste semble enfin émerger. En tant qu'homme de gauche, je pense qu'il faut s'emparer des questions que la gauche n'ose plus traiter : État protecteur et exaltation de l'identité locale.
J'ignore si nous pourrons jamais obtenir un fédéralisme institutionnel, mais en ces temps de questionnement sur l'identité française, il nous faut parvenir à un fédéralisme sentimental et revenir aux vieilles conceptions de petite et de grande patrie. Nous devons faire accepter à tous qu'un Français est un descendant des anciennes nations provinciales qui ont fait la France : Bretagne, Provence, Alsace...
Monsieur Le Drian qu'est-ce que vous attendez pour réunifier notre Bretagne, nous les nantais-es, nous avons marre d'attendre, il suffit d'un décret présidentiel. Cordialement.
Monsieur Le Drian qu'est-ce que vous attendez pour réunifier notre Bretagne, nous les nantais-es, nous avons marre d'attendre, il suffit d'un décret présidentiel. Cordialement.