Il voulait conduire huit stagiaires sur le chemin des haikus : vingt apprentis poètes sont partis avec Alain Kervern.
Dans la petite salle de la médiathèque, l'ambiance est studieuse. Petit cours sur le haiku, les premiers haikus traduits en français, la marche à suivre : tout oublier de la poésie occidentale, pas de rimes, une souplesse relative pour le rythme 5/7/5 pieds, et «no concept, only perception».
Il faudra se laisser aller à regarder, en allant sur la place st Michel toute proche, suivre le chien, observer les gens qui passent, la petite fille, le gendarme, la fleur fanée...
Ils (ou elles plutôt, un seul homme se prêtant à l'aventure) sont partis et reviennent, un à un. Ils se mettent à écrire, mettent leurs papillons dans la boîte, puis recopient tous les haikus, chacun une série. Les choisissent sans savoir qui a écrit. Et les commentent. Puis les améliorent, surpris de voir ce que le groupe a produit, avec simplicité et beaucoup de plaisir.
L'envie de continuer se fait jour, on échange des adresses, on ira peut-être dans la maison d'une telle, on ne veut pas laisser partir cette belle énergie. Ce nouveau regard sur les choses.
L'écran de la ruelle
au loin sur la colline
les maisons blotties
Bois mort sur volets muets
hiver en mots tus
et mousse cousue.
Elle monte les marches
un gros livre sur son coeur
la bonne soeur.
Au creux des pierres humides
le vert mousse des fougères
froisse le gris du ciel.
Un chien attaché
au poteau interdit
attend son tour.
Graffitis tout blancs
sur toit l'hiver
parking de goélands.
Stationnement interdit
l'épaule contre le panneau
le jeune homme attend.
Sur la place aux cochons
aucun animal ne grogne
qui s'en plaindra
La place st Michel
si différente d'autrefois
mon coeur se serre.
■