Carnet d'un Bonnet Rouge N°1 : Au delà des anciennes revendications...

Chronique publié le 18/08/14 20:23 dans Editorial par Jean-Pierre Le Mat pour JPLM
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Les scandales financiers et sociaux accréditent l'idée que les patrons ne pensent qu'à leurs intérêts personnels. Cette thèse, même si elle n'est pas vraie pour beaucoup de petits patrons, correspond à une vérité statistique qui permet d'expliquer les ressorts du capitalisme.

Ce qui est vrai pour les décideurs économiques est également vrai pour les décideurs politiques et institutionnels. James M. Buchanan, prix Nobel d'économie en 1986, a montré que la maximisation des intérêts personnels explique, de façon statistique, les comportements de tous les décideurs, et pas seulement le comportement des décideurs économiques. A la différence du capitaliste, l'intérêt personnel de l'acteur public n'est pas d'accumuler un capital, mais de se rendre indispensable. Dans le privé, réussir, c'est faire fortune. En politique, c'est se faire réélire ou obtenir des mandats plus importants. Pour un haut fonctionnaire ou le chef d'un service public, c'est rendre son administration incontournable, quel que soit le service apporté.

Buchanan a analysé le fonctionnement réel des services publics. On est bien loin de l'État protecteur, juste et impartial, représentant le bien commun. Le décalage entre l'idéal et la réalité est comparable au décalage qui existe dans le monde économique entre le fonctionnement réel du capitalisme et la théorie libérale. La redistribution des richesses est largement conditionnée par l'égoïsme des décideurs.

Le poids de la bureaucratie est devenu insoutenable et les réactions de refus se multiplient. Dans les entreprises, travail au noir, délocalisations, ou refus de se soumettre à des déclarations légales se sont banalisés. Chez les plus défavorisés, plus d'un million de foyers qui pourraient accéder au RSA n'en font même pas la demande. Les procédures sont ressenties comme des entraves. A chaque nouvelle réforme, qui part souvent d'une bonne intention, la tutelle administrative s'alourdit. Les premiers concernés sont largués. Le chef d'entreprise doit faire appel à un expert-comptable pour comprendre et réclamer ses droits. Le jeune en galère est tributaire des calculs et des conseils de l'assistante sociale. Le citoyen se perd dans des "droits" qui sont théoriquement les siens, mais qui, du fait de leur complexité, ne lui appartiennent plus.

Les mouvements sociaux du XXe siècle revendiquaient un salaire décent et des conditions de travail satisfaisantes. Ces revendications étaient vues comme un droit élémentaire, simple à comprendre. On savait qui était le propriétaire de l'entreprise.

Les Bonnets Rouges du XXIème siècle élargissent à la sphère administrative les revendications populaires, jusque-là limitées à la sphère économique. Ce n'est pas étonnant. Le chômage de masse est venu perturber les droits liés au travail. Pour avoir des droits, la condition préalable est d'avoir un statut social que l'on peut assumer soi-même, sans être sous la tutelle de ceux qui le comprennent ou le contrôlent. Avoir un statut ou obtenir des droits ne dépend pas d'un patron bien défini quand on est chômeur, intérimaire, salarié d'une entreprise en difficulté, paysan, autoentrepreneur, travailleur indépendant, artisan, salarié de certaines associations, coopératives ou filiales lointaines de multinationales. Nous sommes nombreux dans ces catégories. La machine administrative peut bloquer nos droits, les rendre incompréhensibles, ou compliquer la façon de les obtenir.

Les décideurs publics, élus ou non, se sont assuré une place indispensable, en multipliant les procédures et les contraintes administratives. Ils se sont rendu incontournables, non par les problèmes qu'ils résolvent, mais en imposant une manière bureaucratique de les poser. Ils font partie du problème. Il n'est pas sûr qu'ils fassent partie de la solution.

Jean Pierre LE MAT


Vos commentaires :
Vendredi 3 mai 2024
@ MANSKER- Je suis globalement en accord avec votre analyse. Juste deux réflexions : Les administrations françaises ont-elles déjà été au service du Public ? Quant aux banques françaises, elles n'ont de banques privées que le nom ...
@ Ar Vran- Air France, c'est de notoriété publique depuis de nombreuses années. Il y a aussi EDF (le procès des escrocs-CGTistes du comité d'entreprise d'EDF est en cours. Les journalistes évitent d'en parler car les peines seront dérisoires)
On peut parler de la SNCF qui est un véritable scandale sur rails, de l'Education Nationale, des hôpitaux publics...des gouffres financiers !
@ Gilbert JOSSE. Je ne saisis pas votre raisonnement. Il est normal qu'une société saine fonctionne en se basant sur les meilleurs et les plus performants. Un pays, c'est le cas de la France, qui passe son temps à favoriser les nuls (ou à les élire),à flatter les fainéants et à transformer les délinquants en héros victimes d'une société injuste court au désastre.

Quant aux intérêts particuliers, ils sont le moteur de l'évolution. Vous travaillez gratuitement en oubliant vos intérêts et ceux de votre famille ? moi pas.
Avoir des intérêts particulier n'empêchent pas d'être soucieux du bonheur de la collectivité mais c'est l'intérêt qui fait marcher l'économie.

Ce sont les battants qui améliorent le sort des faibles et des pauvres, pas les gens qui pratiquent la démagogie tout en vivant aux crochets des autres.

L'industrie automobile, aéronautique, informatique, téléphonique, de la plomberie, de l'électro-ménager, ou des couches-culottes (un grand pas pour l'Humanité) ne se sont pas développées par désintéressement mais parce que ça rapportait du fric.
Dans le même temps, nous vivons mieux et plus longtemps qu'il y a deux siècles.

Abandonnons la mentalité CGTiste à la française ! on sait où elle nous a conduit sur le plan économique.

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