Breizh Kabar : une musique bretonne à la croisée de deux cultures revendiquées

Musique publié le 14/07/14 21:04 dans Cultures par Philippe Argouarch pour Philippe Argouarch

Steve Jobs disait «la créativité, c'est connecter les choses». Ceci est, bien sûr, valable pour la science mais aussi pour l'art et donc la musique. C 'est ce qu' a fait le bagad Kevrenn Alré (bagad d'Auray) avec son spectacle «Breizh Kabar», qui réunit musique bretonne et musique de la Réunion. Autant le dire, ils ne sont pas forcément les premiers à tenter ce genre de métissage. Alan Stivell l'avait déjà fait -- tout particulièrement avec son album 1 Douar et Dan ar Bras avec «Les Perches du Nil».

Présenté dimanche après-midi à Pont-l'Abbé pour le 60e anniversaire du Festival des Brodeuses, Breizh Kabar fut un spectacle époustouflant de bout en bout, tant par la richesse des sons que des costumes. Breizh Kabar est le mariage de la musique bretonne des bagadoù avec la musique créole. En fait, Breizh Kabar est la réunion de Firmin Viry, un chanteur réunionnais qui fait vivre l'ancienne tradition musicale des champs de canne à sucre, plus connue sous le nom de [[maloya]] (1), du jeune groupe réunionnais Saodaj' et du bagad [[Kevrenn Alré]].

On se souvient que la musique et les danses traditionnelles bretonnes sont issues du monde rural et des travaux agricoles. Il y avait les danses pour tasser la terre sur les nouvelles aires à battre, mais aussi les festivités qui étaient communautaires, puisque le travail l'était au moment des récoltes. De la même façon, à l'autre bout du monde, au milieu de l'Océan indien, il existait une musique similaire qui s'était développée autour la récolte de la canne à sucre. D'ailleurs, «Kabar» est un mot créole dont l'équivalent en breton est fest-Noz, nous explique Tangi Saout, administrateur du projet Breizh Kabar.

C'est à l'occasion du 350e anniversaire du peuplement de la Réunion, l'année dernière, que le Bagad Kevrenn Alré, invité par l'Amicale Bretagne Réunion (ABR) pour commémorer les relations particulières entre la Bretagne et la Réunion, que l'idée a germé, parmi les musiciens du bagad, d'explorer plus loin des symbioses possibles pour une évolution créatrice de la musique bretonne traditionnelle, un peu comme, mais, sans prétention aucune, la musique folk américaine a profité du jazz et de l'électrique pour donner le rock and roll.

Le morceau «Fierté», joué hier soir, va plus loin. Il met en avant la lutte commune des Bretons et des Réunionnais pour revendiquer leur identité face au centralisme politique et culturel issu de la colonisation, d'une part, et, d'autre part, face à la dilution uniforme qu'engendre la mondialisation de l'économie et des produits culturels.

Breizh Kabar se produira sur la plage de Quiberon le 21 juillet et sera présenté au festival de Lorient le 9 août au Grand Théâtre. Kabar aura aussi un stand sur les quais et une exposition au Grand Théâtre de Lorient. Un pique-nique réunionnais aura lieu à la Taverne le 7 août.

(1) C 'est grâce à Firmy que le maloya a été inscrit au patrimoine de l'Humanité de l'Unesco. Cette musique revient de loin, puisqu'elle était interdite en place publique à la Réunion jusqu'en 1981. Il n'y a malheureusement pas eu de collectage comme avec [[Dastum]] en Bretagne comme le mentionne Tangi Saout.

Philippe Argouarch


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