Alors que les envoyés des Amitiés kurdes de Bretagne rencontraient à Diyarbakir une délégation du Kurdistan syrien venue de Kobanê, des affrontements violents se produisaient dans ce canton, géographiquement vulnérable, victime d'attaques fréquentes des combattants djihadistes de l'Etat Islamique en Irak et au Levant (EIIL). Le silence international, à ce sujet, est impressionnant, comme si la déstabilisation du Kurdistan occidental était, pour certains, l'objectif majeur à atteindre.
Ibrahim Kurdo, qui a le titre de ministre des Affaires étrangères du canton de Kobanê, ne décolère pas : «la Turquie alimente l'idée que nous soutenons le régime de Bachar El-Assad au motif que nous nous défendons contre les attaques des djihadistes. C'est absolument faux ! Ni les uns ni les autres ne sont démocrates». Il fustige également la position de certaines forces internationales et des Etats régionaux qui, selon lui, veulent détruire le mode de gouvernance institué dans ce Kurdistan occidental, ce Kurdistan syrien, nommé en kurde «Rojava».
«Rojava s'est doté d'une autorité démocratique et autonome» déclarent les représentantes de «l'Assemblée législative». Le mode de gouvernance adopté reconnait trois langues officielles (kurde, arabe, syriaque) inclut les Kurdes, les Arabes, les Arméniens, les Assyriens, les Tchétchènes, mais aussi les différentes religions comme l'islam, le christianisme, le yézidisme. Aux termes de la constitution (appelée contrat social), la région kurde est divisée en trois cantons : Djezira (le canton le plus peuplé comprenant notamment la ville de Qamişlo), Kobanê et Efrin. Chaque canton est habilité à se doter de structures autonomes de gouvernance selon le modèle défini par la constitution. Il est à noter que les femmes sont fortement représentées dans les gouvernements de ces trois cantons. C'est d'ailleurs une femme qui est à la tête du canton d'Efrin.
Une des difficultés à surmonter est l'isolement des cantons : deux corridors d'une soixantaine de km prennent en sandwich Kobanê, le canton situé au centre. Ces corridors, sont sous contrôle djihadiste. Pour circuler d'un canton à l'autre, les populations kurdes sont contraintes de passer par l'Irak et la Turquie qui, de son côté, a mis en place un embargo sur toute la région.
Mais les Kurdes syriens, qui peuvent compter sur la solidarité des «Kurdes de Diyarbakir», sont déterminés comme le déclare Ibrahim Kurdo
«Cette révolution qui a remonté le moral des peuples est la seule option offrant une perspective de coexistence basée sur l'égalité et la liberté. Elle est contestée par certaines forces internationales et les Etats régionaux qui veulent la détruire, notamment la Turquie et certains pays arabes oligarchiques qui apportent un soutien politique, logistique, financier et militaire à des groupes comme Al-Qaïda, l'EIIL et Al Nosra. Quel que soit le prix à payer, nos unités de défense sont prêtes à servir de boucliers humains pour faire échouer les plans de l'EIIL. Aucune force ne pourra résister à cette révolution»
André Métayer
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