La révolte vient de loin : où va l'alliance des Bonnets rouges ?

Point de vue publié le 3/12/13 16:36 dans Politique par Christian Rogel pour ABP
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Manifestation sous la neige au péage de la A 11, à La Gravelle, aux portes de Bretagne, contre l’écotaxe, alors appelée taxe Borloo, le 4 février 2009.

Les Bonnets rouges ne sont pas nés en 2013, mais, en 2008

L'Agence Bretagne Presse est l'une des meilleures bases d'archives contemporaines sur la Bretagne, car elle est accessible en permanence et gratuitement.

Chacun peut vérifier que le 12 octobre 2008, un conseiller régional de l'Union démocratique bretonne (UDB) pointait les inconvénients de l'écotaxe pour la Bretagne (voir notre article).

Christian Guyonvarc'h écrivait : "Région maritime excentrée et, qui plus est, péninsulaire, la Bretagne n'est pas un territoire de transit pour le transport terrestre. De ce fait, elle se retrouve absente des schémas européen et français du fret ferroviaire ou fluvial. Et comme le cabotage maritime ne bénéficie d'aucune politique publique de soutien un tant soit peu substantielle..., la Bretagne est aujourd'hui... dans l'incapacité matérielle de reporter une part significative du fret routier vers le rail et la mer... ".

Il proposait un report et la prise en compte du facteur territorial. Pourtant, l'UDB, parti autonomiste de gauche, a de nombreux élus obtenus par des alliances avec le Parti socialiste et les Verts.

Le même jour, le Parti breton-Strollad Breizh a publié un communiqué du même genre (voir notre article).

D'où venait ce tir groupé ?

Du fait que, le 8 octobre, d'importants responsables économiques bretons reçus à l'Élysée, n'avaient pas été écoutés à propos de la nocivité de l'écotaxe pour la Bretagne (voir Ouest France du 9/10).

Ces visiteurs étaient la Chambre régionale d'Agriculture, la Chambre régionale de Commerce et d'Industrie, la Chambre régionale des Métiers et de l'Artisanat, l'Union Interprofessionnelle Patronale 29, l'UPIB-MEDEF, l'Association Bretonne des entreprises de l'Agroalimentaire, Produit en Bretagne et Investir en Finistère.

Le 17 octobre 2008, Gérard Gautier, ancien conseiller régional indépendant, faisait un point sur la situation et écrivait à Pierre Méhaignerie, président de commission à l'Assemblée nationale, qu'il demandait « la mobilisation générale des Bretons » (voir notre article).

Le 27 octobre 2008, le Groupe Vert du Conseil régional de Bretagne, suite au vote de la loi sur « l'éco-redevance pour les poids-lourds », la justifie en souhaitant l'accompagnement des entreprises du transport routier dans la transition (voir notre article).

Les sénateurs socialistes bretons s'émeuvent fin novembre et proposent des amendements à la loi en arguant de la périphéricité de la Bretagne et de l'importance de l'agro-alimentaire. Aucun amendement n'est retenu.

Le 2 février 2009, sous le titre, « Taxe Borloo : vers une confrontation en Bretagne », l'ABP relate la conférence de presse tenue à Rennes par le « Collectif des acteurs économiques contre la taxe Borloo en Bretagne » qui appelle à une manifestation qui aura lieu le 4 février 2009 au péage autoroutier de la Gravelle, à l'entrée de la Bretagne (voir notre article).

À l'appel des chambres régionales de commerce et d'agriculture et d'une fédération de transporteurs, un millier de personnes (agriculteurs, transporteurs, distributeurs) et quelques élus y seront présents, dont Christian Troadec, conseiller régional et conseiller général, maire de Carhaix, qui déclare : "Ce n'est pas une question de droite ou de gauche, ni même d'écologie... La Bretagne commence à s'unir dans le combat qui commence aujourd'hui..." (voir notre article) (vidéo).

Le même jour, le député socialiste de Concarneau, Gilbert Le Bris, demande que l'écotaxe ne soit pas appliquée en Bretagne, car il craint que des entreprises ne quittent la région (voir notre article).

On ne comprend pas comment des politiciens ou des commentateurs aient pu prétendre qu'aucune sonnette d'alarme n'a été tirée avant 2013 !

Pourquoi les 50 % de ristourne sur l'écotaxe consentis par le gouvernement socialiste n'ont pas apaisé la colère bretonne ? Les 1.200 km de voies express et la concentration des usines agroalimentaires faisait prévoir que 10 % en seraient payés par les transporteurs bretons. En divisant par deux, nos brillants inspecteurs des finances pensaient avoir rétabli l'équité. Mais une règle de calcul n'est pas automatiquement une règle applicable. À moins 50 %, l'injustice structurelle n'est que légèrement atténuée.

L'an I des Bonnets rouges

Sautons au 31 mai 2013 : avant les élections législatives, cinq organisations agricoles bretonnes proposent aux candidats une pétition contre l'écotaxe et le futur député du Finistère, Jean-Luc Bleunven, agriculteur lui-même et membre de la Confédération paysanne, refuse de la signer et attaque les syndicats agricoles majoritaires pour leur « immobilisme » et leur « sclérose ». La guerre entre le PS et les organisations professionnelles agricoles bretonnes majoritaires commence ce jour-là. Son alliance avec les Verts et avec la mouvance paysanne de gauche en est le carburant.

Le mouvement anti-écotaxe breton va s'accélérer en six dates clés :

- Appel du 18 juin 2013.

Réunion d'entrepreneurs à Pontivy qui mettent en avant le slogan "Pour une Bretagne belle, prospère, solidaire et ouverte sur le monde" et fustigent L'hypercentralisme français, la multiplication des rouages administratifs et la complexité des règlementations (qui) font que désormais, 56 % sont consacrés au fonctionnement de l'État et précisent : "Nous croyons aux valeurs du travail et nous sommes les bons élèves de la République" et "La Bretagne est honnête, et refuse de choisir entre tricher ou mourir" (allusion au rapport de la Cour des Comptes qui relève que l'économie souterraine en Bretagne est beaucoup plus rare que dans le Midi ou en Île-de-France) (voir notre article).

L'appel à tous les Bretons reprend la célèbre affiche du 18 juin 1940 avec le texte : (Après l'écrasement de l'ennemi par des forces immenses), "Il faut que ce jour-là, la Bretagne soit présente à la victoire. Alors, elle retrouvera sa liberté et sa grandeur". Galéjade bretonne et riposte humoristique aux manipulations habituelles de l'Histoire de France (voir notre article).

Il est créé un Comité de convergence des intérêts bretons (CCIB) qui est clairement dans la filiation du [[Célib]], l'alliance bretonne victorieuse des années 50-60.

- 2 août 2013

Destruction du portique écotaxe de Guiclan (près de Morlaix). C'est le jour décisif, car l'alliance est élargie aux salariés des professions de l'agriculture et des transports et à ceux des usines menacés de fermeture (Doux, Gad et Marine Harvest).

Mais surtout, entre dans la lutte la fédération départementale des syndicats d'exploitation agricoles du Finistère (FDSEA29) en relais de sa fédération régionale, peu aguerrie pour les opérations coup de poing.

- 16 octobre 2013

Alerte au feu ! lancée par Produit en Bretagne et l'Institut de Locarn pour demander que les alarmes incendie soient déclenchées dans la matinée dans les entreprises. Quelques hypermarchés font sortir leurs clients pendant 1 heure (voir notre article) .

- 26 octobre 2013.

Des manifestants, coiffés de bonnets rouges et se réclamant de la nouvelle alliance qu'on dénommera « agri-ali-transport », veulent détruire le portique de péage de Pont-de-Buis défendu par la police. Il y a trois blessés, dont deux graves, ce qui soulève une grande émotion.

- 2 et 30 novembre 2013.

Des rassemblements pacifiques font converger des dizaines de milliers de gens à Quimper, puis à Carhaix.

Ils comportent une dimension que certains voient comme « régionaliste », mais, il serait plus juste de parler de demande de « relocalisation de procédures de décision » en Bretagne : (voir notre article) et (voir notre article).

Malgré le contre-feu inefficace des syndicats ouvriers liés au pouvoir (manifestations ratées du 2 (voir notre article) et du 23 novembre (voir notre article), celui-ci est sommé de changer son attitude condescendante et réductrice.

Les alliances doivent-elles avoir la permission des gouvernants et des média ?

Les média parisiens ont caricaturé un mouvement dont ils ne peuvent, ni ne veulent faire l'analyse (voir notre article).

Ils sont trop immergés dans le schéma d'un pouvoir qui n'a de légitimité qu'à Paris, pour croire que des organisations régionales, sans lobbyistes dans la place, puissent perturber les règles du jeu.

Quoi qu'ils prétendent, le fait que les entreprises de presse écrite soient fortement subventionnées n'est pas sans les influencer (voir notre article), or la presse écrite (média froid) régente les média chauds (radio, TV et même Internet).

Dès le début, ils ont déclaré l'alliance bretonne, « contre-nature ». De la théologie dans l'analyse politique ? Ben, oui, tout le monde a appris à l'école que les patrons sont des « salauds de capitalistes » et les salariés de malheureux esclaves qui tentent, désespérément, de leur résister.

Mais, si les salariés comprennent qu'ils sont licenciés sur la demande d'un actionnaire ou d'un Conseil européen lointains, vont-ils se mettre, stupidement, à taper sur leur patron proche ? C'est leur refuser l'intelligence politique, comme il est fait pour les paysans bretons de 1675.

Les Bonnets rouges du XVIIe

Ceux-ci, en s'attaquant aux demeures de leurs seigneurs savaient qu'ils touchaient au coeur le pouvoir royal dont les suzerains locaux, laïcs ou religieux, étaient les agents « naturels ». De manière moderne, les Bonnets rouges attaquent les portiques, envahissent les places, les sous-préfectures et les routes nationales, car l'information devient alors européenne, voire mondiale, et atteint le gouvernement en retour.

Un patron de PME n'est pas un agent autonome, il est soumis à des règles absurdes, qui le dépassent et avec des sanctions en cas d'écart. Si ses salariés le voient comme un ennemi, c'est que, soit il est très mauvais, soit ils ont peu de jugeote.

Un manager breton d'élite est caricaturé par la presse

Un bon exemple est Daniel Sauvaget, le p.-d. g de Tilly-Sabco, abattoir de poulet pour l'exportation (332 collaborateurs, 132 M d'euros de chiffre d'affaires), à Guerlesquin (Finistère). L'entreprise avait une réputation de dialogue social faible avant sa reprise en 2008. Les machines ont été remplacées, une race de poulet de meilleure qualité a été mise au point, 2 M d'euros sont investis chaque année et le personnel a été envoyé en formation.

Le plan d'adaptation prévoit de se passer des aides européennes, malgré la concurrence du Brésil, mais il demande que les aides ne disparaissent pas du jour au lendemain, alors que la mutation n'est pas achevée. Son plan prévoit l'embauche de 150 salariés (remplacements pour retraite compris) jusqu'en 2017. L'entreprise a été caricaturée en symbole de l'agroalimentaire incapable d'évoluer, d'autant que le PDG ne joue pas selon les règles de la bien-pensance parisienne : il manifeste en compagnie de ses salariés avec un bonnet rouge (1).

On pourrait croire à une consigne patronale : un journaliste, dans un journal de gauche (Le Monde ou Libération) semble ne pouvoir que décalquer les propos des patrons de la CGT et de la CFDT. Le Figaro semble moins suiviste par idéologie et par esprit d'opposition.

La question ne doit pas être : les alliances nouées sous le parapluie du Collectif Vivre, décider et travailler en Bretagne sont-elles légitimes ? Mais : comment fonctionnent-elles ?

Ensuite, on s'interroge sur leur capacité à évoluer, à obtenir des résultats et à durer.

L'Histoire politique de la Bretagne, c'est du sérieux

Lors de la crise de 1931-32, qui avait vu la hausse des tarifs douaniers sur les importations bretonnes (charbon gallois) et les exportations (conserves), une fraction de petits commerçants et de petits industriels s'étaient montrée sensible aux thèses du Parti national breton, avant qu'une partie de celui-ci ne dérive vers un extrémisme qui tenait, le plus souvent, d'un opportunisme irréfléchi que d'une adhésion à l'extrême-droite. La guerre a cassé toute idée de rassemblement sur des thèmes raciaux et autoritaires et c'est tant mieux.

Le [[Célib]] des années 50 et 60 était le fruit d'une alliance entre régionalistes, centristes démocrates-chrétiens et certains secteurs économiques pour obtenir la modernisation de la Bretagne. Après avoir gagné, grâce à une faiblesse momentanée de l'État, qui voulait acheter des votes en 1968, il s'est étiolé. Des lois de décentralisation, dont on voit qu'elles n'entament ni le coeur du pouvoir, ni l'arrogance des gouvernants, ont servi de leurre pour procurer un vernis de concertation à côté de programmes hors du champ de la démocratie (les centrales nucléaires, par exemple).

Le Collectif Vivre, décider et travailler en Bretagne, c'est qui ?

Comme indiqué plus haut, l'alliance agri-ali-transport (c'est nous qui la baptisons ainsi) s'est constituée lentement sur cinq années, mobilisant d'abord les organisations consulaires (chambres) et patronales, dont les ressortissants voyaient les dangers concrets de l'écotaxe.

Pour faire circuler l'information, la Bretagne dispose de deux outils incomparables, et liés entre eux.

- L'Institut de Locarn est l'étage intellectuel qui fonctionne, à la fois comme un think tank et une mini-université technique, car, c'est un lieu de conférences et de formation. Il est basé à Locarn (535 habitants), commune située à 14 km de Carhaix, loin des villes, mais au centre déshérité du pays.

- Le second étage est Produit en Bretagne qui rassemble un nombre limité d'entreprises (323), mais, qui a deux particularités, la diversité (il y a une section pour les entreprises culturelles) et la coopération limitée, mais réelle entre les producteurs et la grande distribution (deux des réseaux les plus connus en France sont nés en Bretagne). Les principaux managers sont des régionalistes affichés et le président, Jakez Bernard, très connu dans le milieu de la musique bretonne, est devenu l'un des porte-paroles du CCIB. Certains ont vite fait de ces deux cercles patronaux, des officines d'agitation, mais, les thèses complotistes peuvent envahir les meilleurs esprits.

Il est plus intelligent de regarder l'acceptabilité du thème de la régionalisation et de l'autonomie. Il s'opère un glissement progressif qui a beaucoup à voir avec les insuffisances et les incompétences du gouvernement. L'agitation sarkozienne qui promettait des crédits et des lois tous les deux jours n'a pas peu fait pour faire réfléchir sur la gouvernance. Et quand le gouvernement suivant, à son corps défendant, revient sur les promesses imprudentes (les TGV partout, le ferroutage), l'État est nu et les belles paroles ont du mal à calmer les déceptions. Les annonces de taxes à répétition deviennent alors un marqueur d'incompétence, accusation la plus grave qui puisse peser sur un dirigeant.

Autour de Christian Troadec, homme d'un abord simple, parlant de manière compréhensible par tout le monde, mais, ferme sur ses convictions de base (pouvoir régional, fin du maquis administratif, libération des énergies), se sont réunies des personnalités diverses qui ne forment pas un parti, même si certains ont pu se former dans une dépendance du mouvement breton.

L'un des plus proches a été emprisonné et condamné par principe (2), sans que des preuves matérielles aient été réunies, alors que son métier de journaliste justifiait largement qu'il rencontre des activistes basques clandestins : cela aussi discrédite l'État, qui a voulu instrumentaliser la Justice et cela se sait.

Vers la relocalisation des décisions en Bretagne et ailleurs

Après les deux buts marqués contre le gouvernement, l'intention de la galaxie Troadec n'est pas de créer, immédiatement, une organisation politique. Des comités locaux sont en voie de constitution, afin de montrer que c'est par une alliance intercatégorielle, hors ceux des syndicats ouvriers qui se sont suicidés et les politiciens sans leviers, qu'il est possible d'obliger le pouvoir à réformer ses pratiques autocratiques.

Comme expliqué à Carhaix par Thierry Merret, si des productions sont à arrêter ou à développer, ce n'est pas dans un obscur cabinet ministériel que les solutions seront élaborées. La Bretagne (et les autres régions qui le voudront) peut résoudre ces questions localement et pas forcément dans les palais préfectoraux et ministériels.

La nouvelle alliance est, peut-être, le modèle nouveau d'une société bretonne, moins complexée et plus sûre de sa légitimité, et donc prête à se passer des bureaucraties parisiennes, y compris syndicales. La gauche parlementaire est, par nature, centraliste, mais, de même qu'elle s'est débarassé de l'antisémitisme qu'elle a initié (voir les idées de Jaurès), elle devra s'adapter.

Il serait logique que se développe un syndicalisme ouvrier breton, mais, la loi, qui est faite pour consolider un face-à-face à Paris, est un obstacle, sauf, en cas d'une syndicalisation massive, peu probable à court terme. Le bras d'honneur qu'ont adressé les sections syndicales FO de Doux et de Gad à leurs camarades bureaucrates est pourtant significatif.

il est clair que l'alliance agri-ali-transport est aujourd'hui bien plus large qu'il y a 4 mois.

Romain Pasquier, analyste politique breton, a émis, très tôt, un doute fort sur la durabilité de l'alliance (voir notre article), mais, comme le remarque Xavier Guilhou (voir notre article) : "Les vraies pages stratégiques ne sont pas encore écrites ou perceptibles. Nous sommes dans l'admonestation sociale et économique du côté des Bonnets rouges et dans la réponse distante et froide du pouvoir. Le 4 décembre risque d'être un point de rencontre sans saveur, les deux s'autobloquant vraisemblablement dans leurs positions et certitudes respectives". Le 4 décembre était la date prévue pour dévoiler un « Pacte d'avenir de la Bretagne ».

Le Collectif ripostera en janvier 2014, par la synthèse des cahiers de doléances rédigés à Carhaix et ailleurs.

Transformations en demande politique et influence sur les élections

Les revendications, d'abord catégorielles, puis, plus larges, seront peu à peu unifiées par une mouvance qui n'est pas encore incarnée par un pack de politiciens.

Dans un échange privé, à Carhaix, le 30 novembre, Christian Troadec reconnaissait que le mouvement est parti sur des demandes différentes, mais, que peu à peu, les partenaires vont avancer ensemble.

Une fraction de l'opinion en Bretagne demande des comptes aux gouvernants parisiens pour leurs défaillances et leurs insuffisances structurelles. Cette orientation bretonne est bien accueillie dans certaines couches de la population, y compris les plus jeunes (voir la prolifération de bonnets rouges sur Facebook).

Une grande partie des Bretons n'est pas convaincue, mais, témoin des insuffisances criantes de la classe politique française, elle est de moins en moins dupe des invectives idéologiques, et elle peut saisir les élections à venir pour regarder une autre offre.

Il n'est pas sûr que les élus socialistes et Verts bretons qui ont défendu l'écotaxe en criant haro sur tout patron, artisan ou agriculteur qui se plaint des impôts et qui accueille les ouvriers en lutte contre le chômage, puissent compter à nouveau sur les électeurs pris à partie. En tout cas, les Bonnets rouges ne sont pas solubles dans le Front national.

Cela va colorer les élections municipales et européennes de 2014 et influer sur les législatives de 2017.

L'État ne sera pas seulement interrogé sur sa capacité à aménager les territoires, mais sur celle d'en faire des entités politiques adultes, comme partout en Europe. Certains se contenteront de demander le transfert de quelques compétences au conseil régional de Bretagne (eau, enseignement, langue bretonne...)

D'autres demanderont, ni plus, ni moins que le statut de la Bavière ou de la Galice. La réunification de la Bretagne sera aussi demandée.

Le débat sur l'organisation de la France (et le risque de son implosion par excès de centralisme) est ouvert et, comme à l'habitude, cela a commencé en Bretagne (voir notre article).

Notes

(1) Daniel Sauvaget a obtenu gain de cause, puisque le ministre de l'Agriculture a du aller à Bruxelles pour obtenir l'aide temporaire demandée, ainsi qu'une autre aide de l'État.

(1) Charlie Grall

Christian Rogel


Vos commentaires :
Lundi 29 avril 2024
L'ami Pierre a tout compris (et depuis longtemps) du fonctionnement de «l'oligarchie jacobino-collectiviste» français comme l'appelle Jean Cévaer, ancien Pt du collectif B5, qu'il connait bien.
-Oligarchie où la même élite issue de l'ENA se partage le pouvoir par cooptation ou «fait du Prince».
-Jacobine: cela n'est plus à démontrer.
-Collectiviste: car avec un prélèvement du PIB national proche de 58%, nous «sommes le dernier pays communiste d'Europe» comme disait Vaclav Avel ancien Pt de la Tchécoslovaquie qui critiquait notamment le dirigisme de la gouvernance française.
Quoi de plus facile, dès lors d'utiliser ce 58% pour exercer du clientélisme à grande échelle par «nos» élus dits «représentatifs».
Et cà marche, les bretons comme les autres français appliquant à la lettre l'adage «On sait ce qu'on perd, on ne sait pas ce que l'on gagne», se contentent de pleurnicher tout en se gardant bien de remettre en cause cet Etat-Providence, fût-il moribond.
Et «nos» dirigeants le savent bien.
D'ailleurs, malgré une médiatisation, pour une fois considérable par les poids lourds tels BFMTV et I-Télé, et même de la 1 et de FR3, y a t'il eu une moindre réaction, un moindre commentaire de la part du pouvoir et des partis nationaux sur la manif du 13 avril à Nantes...Rien.
Seules les manifs de Quimper et de Carhaix organisées par les Bonnets Rouges ont semblé émouvoir en haut lieu.
Il ne faudrait pas que la désertion de quelques figures du mouvement tel Olivier Le Bras rappelé à l'ordre par son syndicat FO (devenu «National-Trotskiste» depuis presque 20 ans) entame la dynamique de la «nouvelle société» qu'il ont initiée.
D'ailleurs ont-ils d'autres choix ?
Ce ne sont pas les «partis révolutionnaires», avec leurs idéologies du XXè, NPA, Lutte Ouvrière, FG...qui ont le pouvoir, voire même le désir de le faire à leur place.
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