Les scientifiques disent : la mer est le futur de la Bretagne

Reportage publié le 23/02/13 20:07 dans Science et Technologie par Philippe Argouarch pour ABP
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La soupe de végétaux marins sur la côte bretonne. Le chaudron magique de Taliésin ?
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Déjections d'arénicoles sur une plage bretonne. Au fond des trous des vers qui savent faire de l'hémoglobine !
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Marie Bérangère Troadec jeune biologiste du CNRS de Rennes - Institut de Génétique et de Développement. Elle revient d'un séjour de deux ans à l'université de l'Utah où elle a assisté au sauvetage de l'hôpital devenu économiquement viable. Pour Marie Bérangère :"Tout est possible si l'on remet tout en cause"

L'Institut de Locarn organisait vendredi 22 fevrier sa première journée scientifique annuelle, en hommage à Jean-Paul Moisan, professeur de médecine, fondateur de l'Institut Génétique Nantes Atlantique, vice-président de l'Institut de Locarn et décédé accidentellement l'été dernier.

Sur le thème "Bretagne, usine à solutions, la recherche en synergie avec le territoire", le think tank avait invité une panoplie de chercheurs, d'innovateurs et d'entrepreneurs qui se sont succédés pour présenter recherches et projets. Parmi la douzaine d'intervenants, plusieurs Nantais.

Environ 200 personnes concernées par le futur de la Bretagne et impliquées d'une façon ou d'une autre, ont assisté à cette journée qui embraya avec les recherches et les réalisations de Jean-Paul Moisan sans oublier son héritage humain composé de modestie, de simplicité, et de coopération couplé d'une tenacité bretonne et d'une efficacité dans l'innovation et la réalisation qui avaient fait l'admiration de tous. Au cours de l'hommage rendu au généticien et biologiste de synthèse, Joseph Le Bihan, co-fondateur de l'institut, a déclaré devant la famille qui avait été invitée pour cette occasion : "Ton esprit demeurera éternellement à l'Institut de Locarn". Une salle de conférence portera bientôt son nom.

La mer, source d'innovation et de développement économique

Les deux principaux axes du futur industriel breton en dehors de l'agro business sont les matériaux (les céramiques et les composites) et les biotechnologies marines. Cette biologie et ses applications en Bretagne représentent une lueur d'espoir et d'optimisme au sein du marasme économique ambiant et d'une crise qui touche tous les secteurs de l'agriculture bretonne. Enfin un truc à nous. Un pétrole breton ? L'or breton est bleu et vient de la mer. Ce sont les 200 000 espèces de microalgues, et les douzaines de macroalgues et autres algues brunes et bleues qui peuplent le plateau continental. Même les algues vertes qui polluent nos plages ont des applications industrielles.

Sous la plage, des vers miraculeux

Franck Zal, ancien chercheur au CNRS, a découvert les extraordinaires capacités moléculaires d'un… ver marin, l'arénicole, capable de synthétiser de l'hémoglobine. Basée à Morlaix, Hémarina, sa startup, a déposé dix brevets internationaux pour différentes applications thérapeutiques. Hémarina est aussi en discussion avec des fabricants de pansements, car sa protéine marine a la capacité d'accélérer la cicatrisation et pourrait être utilisée pour traiter des plaies externes. « C'est une molécule que les médecins cherchaient depuis 40 ans et qui était sous nos pieds, ces vers marins ayant colonisé les plages bretonnes », souligne Franck Zal. Dommage que le chercheur n'ait pas pu trouver des terrains en Bretagne pour y lancer la culture de l'arénicole. Il a du aller voir ailleurs, des écologistes ayant bloqué au dernier moment une option d'implantation à Crozon. Alors que le contrat était presque signé, "un individu, un seul, a déclaré avoir découvert des empreintes de loutres de mer sur la plage" a expliqué le chercheur-entrepreneur médusé. Trouver un terrain a été "la croix et la bannière et deux ans de perdus" a déploré le Dr Zal qui doit acheter des vers bretons élévés en Hollande et en Angleterre.

La dernière frontière : les lipides marins

Pour Jean-Paul Cadoret, directeur d'une équipe de recherche sur les microalgues à Ifremer, Nantes, et fondateur d'une startup Algénis, "ce qui est étonnant avec les microalgues, c'est leur diversité fabuleuse". Les microalgues sont les ancêtres de tous les végétaux terrestres. Leur richesse biologique et moléculaire dépasse l'entendement. Une sorte d'Amazonie pour sa diversité. D'une dizaine de microns de longueur, les microalgues sont tellement denses qu'elles peuvent changer la couleur de l'océan. Leur développement naturel est étonnant : elles se reproduisent par divisions tous les jours. On sait les cultiver et elles peuvent produire 10g de matière sèche par m2 --chaque jour.

Les microalgues contiennent des huiles et ces huiles sont naturellement riches en acides gras polyinsaturés à longue chaîne moléculaire. Elles sont connues pour leur effet protecteur des maladies neuro-dégénératives, du système cardiovasculaire et la prévention des cancers. Quant à l'énergie : plus de 20 milliards sont investis mondialement en ce moment dans la recherche d'un hydrocarbure produit avec des microalgues.

Créer une filière industrielle microalgue en Bretagne

Les microalgues sont une nouvelle filière industrielle avec des applications dans la cosmétique, la santé, l'alimentaire, l'énergie. Il s'agirait surtout de substituer les microalgues aux poissons comme sources d'huiles grasse riches en omega 3 et aux propriétés quasi magiques. Plus de 10 000 tonnes sont produites par an dans le monde mais seulement 200 tonnes en France pour le moment.

La région Bretagne est, en France, déjà la première région pour la biologie marine (6 600 emplois, c'est autant que la pêche) et la 4ème région en recherche biologique.

Jean-Paul Cadoret, Marc Hemon, CEO fondateur de ISLAB molécules marines à Quimper, Vincent Gelamur, directeur Innovation Meralliance – Quimper, Marc Hemon, pharmacien entrepreneur et Vincent Gelamur ont révélé une excellente coopération entre recherche, innovation et startups. Toutes les entreprises se sont regroupées dans une association Bretagne Bio Science créée en 2010 pour rassembler les acteurs de la biotechnologie en Bretagne.

Le projet Algomega vise à développer un nouveau modèle économique de production de microalgues en intégrant dans la chaîne de production des innovations scientifiques et technologiques permettant de réduire les coûts de production et d'améliorer les teneurs en acides gras polyinsaturés. On a aussi appris qu'un élevage de saumon va être créé au Guilvinec avec une base alimentaire purement marine. 60% du saumon d'élevage français étant déjà produit en Bretagne.

Le président de l'Institut de Locarn, Alain Glon, avec la clairvoyance qui le caractérise a su résumer la mutation industrielle qui pointe à l'horizon et la nouvelle donne de la recherche "Autrefois, la science marchait par l'argent et le pouvoir--or, il y a plus d'argent et le pouvoir est en train d'être remplacé par la compétence".

Pour en savoir plus :

(voir le site) du Club Bretagne Bioscience

(voir le site) de BREIZH'ALG

(voir le site) de IDEALG

(voir le site) de ALGOMEGA

Philippe Argouarch


Vos commentaires :
Samedi 27 avril 2024
Je répète depuis des années
Nous avons des instruments de pensée économique,nous avons la «crème » des décideurs pour un essor breton en termes de filières ,d'approche des nouvelles donnes.....Alors quant allez vous influencer la deuxième partie du binôme de la décision bretonne,dont le but reste et restera la réunification de l'espace B5( notre économie peut s'étendre sur la proche Armorique,mais la base est «chez nous»)
Je fais donc appel à LOCARN - B32)
Allez y.
Nota ,un des premiers points à regarder est l'osmose des CCI ( je pense à celui de Nantes)
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