Le Larzac, Plogoff, NDL : même combat

Chronique publié le 10/01/13 11:46 dans Cultures par Jean-Charles Perazzi pour Jean-Charles Perazzi

Le Larzac, Plogoff, NDL…

Lettre ouverte à Pierre Maille, Président du Conseil général du Finistère et à Michel Duthoit, Président de l'Association pour le développement des relations sociales

Toutes mes excuses aux lecteurs de cette chronique. Il y a peu, je leur annonçais que j'y mettais un terme, pour un temps du moins, trop pris par d'autres occupations. Et voilà que deux articles dans un quotidien que je connais bien, m'incitent à me remettre au clavier. Pas de gaieté de c½ur. Juste pour exprimer mon étonnement, mon incompréhension, une certaine colère aussi.

Le breton, langue morte ?

5 janvier. Dans les colonnes départementales (Finistère) d'« Ouest-France », Pierre Maille ravale le breton au niveau du grec (ancien) et du latin. En résumé : on soutient le breton, mais juste ce qu'il faut : comme une langue morte. Pas comme un moyen de communication sociale. Et tant pis pour tous ceux qui, au même titre que d'autres pour toutes les langues minoritaires de la planète, ont entrepris sur le terrain leur sauvetage. Souvent même, chez nous… avec l'aide financières des départements bretons, de la Région. Erreur ? Malentendu ?

Pour l'avoir vu à l'oeuvre dans différentes assemblées bretonnes, je tiens Pierre Maille pour un homme honnête, intègre. On peut supposer qu'il aura voulu dire tout haut ce que certains pensent tout bas. Auquel cas il faut regretter qu'il ne se soit pas exprimé plus tôt, de cette manière, sur le sujet. Il est vrai que cela n'aurait fait que reculer la polémique que ses propos vont susciter. Il reste à souhaiter qu'elle restera, si c'est possible, dans les limites d'un débat « républicain », utile et nécessaire. Après tout il a été promis (une sorte de remise à plat), par les amis du Président finistérien au sommet de l'Etat.

Et, cerise sur le gâteau, dans le même article, Pierre Maille se prononce en faveur de la construction de l'aéroport de Notre-Dame des Landes. En assortissant son souhait d'une réserve : que cette réalisation s'accompagne de la réduction du temps de trajet du TGV Paris-Quimper et Paris-Brest. A la faveur de rectifications des lignes. Passons.

La loi du plus fort

8 janvier. On a du mal à s'en remettre. Et voici que dans un « point de vue » qu'il donne régulièrement dans les colonnes du même journal, deux jours plus tard, Michel Duthoit, Président de l'Association pour le développement des relations sociales, y va d'un skud sans appel, si l'on peut dire, en direction des « Sans-culottes de l'aéroport ». Pour un peu il les mettrait dans le même sac que les gens qui se sont battus contre l'implantation d'une centrale nucléaire à Plogoff, l'agrandissement d'un terrain militaire au Larzac. Mais corrige aussitôt : « Ce n'est pas le cas ici, estime-t-il. Les protagonistes sont principalement des radicaux de la contestation, en guerre permanente contre la société… »

Quelle société ? Celle où la loi du plus fort, du plus puissant, de l'argent dicterait aux élus de tous bords leur loi ou… obtiendraient leur complicité par des moyens appropriés pour obtenir leur accord?

Désolé, Michel (nous nous sommes connus quand, sur les bancs du Comité économique et social de Bretagne, tu menais un combat courageux contre les lobbies de tous poils tentant d'imposer des projets pharaoniques aux Bretons) (1), le tir est mal dirigé.

Retour sur Plogoff et le Larzac : « C'était une autre époque, dira-t-on, et les gens défendaient leur terre. Voire. »

Tout est dans ce « Voire ». C'était bien avant tout le combat du petit peuple de Plogoff et de celui des éleveurs de moutons du Larzac. Je te concéderai, pour en avoir été le témoin direct, que des « casseurs professionnels », des « chevelus » se mêlaient à l'occasion, dans la cité du Cap Sizun, aux locaux. Mais Jean-Marie Kerloch, maire héroïque, savait les tenir à distance : « Ce combat est le nôtre. S'ils veulent nous aider, c'est leur affaire. Mais c'est d'abord à nous de défendre notre terre. » J'ose croire que tu ne traites pas par le mépris les gens de Notre-Dame des Landes, engagés en première ligne à leur tour pour sauver leur sol, leurs champs, leurs bois. Contre des forces qui leurs sont infiniment supérieures. Que tu respectes les convictions de défenseurs d'une nature chaque jour un peu plus agressée, chez nous et sur le reste de la planète.

Pour finir, je livre à ta méditation l'extrait d'un petit ouvrage collectif « Plogoff-la-Révolte ») que nous avons écrit au lendemain d'évènements qui firent l'objet d'un vaste soutien aussi populaire que justifié : « Productivité, rentabilité, les nouveaux dieux d'une société dont l'énergie est le progrès et le progrès un bulldozer pour niveler, mâter, écraser si besoin est ».

Jean-Charles Perazzi

(1) Pour mémoire : tous les Conseils généraux, le Comité économique et social et le Conseil régional, les organisations économiques avaient donné le feu vert à la construction de la centrale de Plogoff.

Quelques années plus tard, malgré son opposition, la majorité du Conseil régional de l'époque votera une subvention qui permettra à un avion gros porteur de s'envoler tous les mois durant un an et demi de Brest à Boston, pour alimenter le marché nord-américain en… salades, artichauts et autres légumes. A l'arrivée, un beau déficit financé par les contribuables !


Vos commentaires :
Pierre CAMARET
Vendredi 22 novembre 2024
J'aime la nature , mais je ne suis pas dutout «ëcologiste» .Je ne defends pas PLOGOFF , je ne defends pas le LARZAC , je ne defends pas NDDL.Je suis contre des projets idiots et mal definis , mais comme Ingenieur je suis pour les projets bien menes rentables , qui creent des richesses pour tous . Alors l'idee : defendre ma terre , ne tient pas pour moi , si l'interet general est en question .
L'activite economique est ma priorite .C'est le plein emploi , des gens heureux qui batissent leur foyer , leur famille , prennent des vacances .
Ce que j'explique a mon fils la vie est une serie de compromis , il faut aller au mieux .
Si les bretons veulent rester ruraux , bio et chomeurs et bien qu'ils y restent . C'est peut etre pour cela que les bretons dynamiques quittent le pays et viennent s'installer en Australie ( j'habite l'Australie ).

Bertrand Leiris
Vendredi 22 novembre 2024
très peiné de lire dans cet article la soi-disant méfiance de Kerloch, admirable maire, à l'égard des«chevelus»qui ont menés la lutte au service des «gens du cap», d'un bout à l'autre et sans aucune arrière pensée. j'en étais, en tant que quimperois et citoyen
solidaire d'une population que l'état s'apprêtait à spolier. cette lutte populaire a été exemplaire par la
probité de ses acteurs. je ne comprends pas les insinuations de votre article et vous fait état de ma
profonde déception

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