Gallo : une longue route pour la reconnaissance

Dépêche publié le 12/11/12 9:46 dans Langues de Bretagne par Anne-Edith Poilvet pour ABP
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Depuis de nombreuses années, le gallo se bat pour être reconnu langue de Bretagne, aux côtés du breton. A l'occasion de la manifestation costarmoricaine "Le Gallo en scène" organisée par Bertaeyn Galeizz et des 30 ans de la DPLO (Défense et Promotion des Langues d'Oïl), un débat a permis de parler de l'avenir des ces langues dites minoritaires.

La route est longue et les intervenants de ce débat qui s'est déroulé à Plaintel l'ont souligné : qu'il s'agisse d'enseignement ou de place dans les médias, le gallo a du mal à s'imposer. Sur l'ensemble des départements gallésants, on ne compte que 4,5 postes d'enseignants équivalent temps plein et 2 500 élèves. Cela n'empêche pas ses défenseurs de se battre et d'espérer. Il a été rappelé le rôle important joué par Gilles Morin qui avait réussi dans les années 80 à obtenir une option gallo au baccalauréat ainsi que l'espoir de la création d'une licence, avant qu'on ne s'aperçoive que le gallo ne faisait pas partie des langues officielles de France.

Aujourd'hui, les choses ont un peu évolué et l'introduction du gallo dans le plan linguistique du Conseil régional de Bretagne en 2004 précisant "le gallo, langue romane spécifique à la Bretagne fait partie au même titre que le breton de son patrimoine culturel" a été une étape importante.

Lena Louarn, vice-présidente du Conseil régional en charge des langues de Bretagne, l'a dit : "L'avancée de ce dossier dépendra de l'Acte III de la décentralisation. La Région travaille en interne sur le sujet pour faire des propositions".

Bien sûr, il a beaucoup été question de la ratification de la Charte des langues pour laquelle Marc Le Fur, député UMP des Côtes d'Armor, a assuré qu'il n'y avait plus d'obstacle constitutionnel mais que le jacobinisme était le pire ennemi. Paul Molac, nouveau député écologiste qui a la particularité de parler à la fois breton et gallo, a appelé au travail collectif et à la nécessité pour les défenseurs du gallo de se mettre d'abord tous d'accord."Le groupe 'langues régionales' va être remis en place ; j'en serai l'un des vice-présidents", a-t-il annoncé.

L'avenir n'est donc pas écrit. Chacun doit continuer de se battre pour qu'enfin la diversité culturelle et linguistique soit reconnue.


Vos commentaires :
Samedi 18 mai 2024
@Louis Le Bars

Tout à fait d'accord.
N.-B. : Je n'ai pas avancé une 'thèse', seulement quelques remarques. J'ai dû négliger l'aspect «territorial». Il s'agissait surtout de faire le point sur les parlers romans.

1) Une langue ne survit comme langue pleinement vivante que si elle a la «taille critique». Le breton a perdu cette taille entre 1950 et 1960.

2) Elle ne survit que si elle a un bon «taux de reproduction» (= langue maternelle). Vers 1950, celui-ci était encore d'environ 30 % (avec de grosses disparités locales) ; aujourd'hui il est proche de zéro (mais pas zéro : quelques familles militantes ; des écoles mais dont il faudrait évaluer séreusement l'influence ; des cours du soir).

3) Elle ne vit que si elle est qualitativement solide : souci des locuteurs à la maintenir en état, à l'enrichir, à la bien parler. De ce point de vue, le breton s'est dégradé avec la disparition des dernières commnunautés réellement monolingues, il y a plusieurs décennies déjà. La pente peut être remontée chez des néo-locuteurs bien formés.

4) Elle ne vit que si ses locuteurs le veulent et se battent pour leurs droits linguistiques (par exemple, si les manifestants et les pétitionnaires pratiquent réellement la langue, hum).

5) Elle ne subsiste qui si elle a l'enracinement territorial suffisant. La densité d'un réseau de locuteurs est liée à la distribution spatiale. Pour des raisons effectives, mais aussi symboliques. Les conditions de la vie moderne permettent une compensation relative mais insuffisante par elle-même.

6) Elle ne survit que si elle possède une forme suffisamment unifiée pour permettre les relations dans des cercles plus larges que le canton. Dialectes et koinè se complètent et se soutiennent mutuellement.

Donc, pas de breton sans référence à une communauté vécue sur le long terme, et à une terre.

La France, personne morale et individu historique, a enfin réalisé l'unité linguistique de son territoire. Ce qui subsiste est bien peu. (C'est son projet : fabriquer une humanité nouvelle, éclairée par la Raison. Cette entreprise utopique efface la mémoire des peuples fondateurs, qui devront s'effacer devant la citoyenneté commune, seule perspective historique. Quand à la part de rêve, rien ne lui est plus étranger).

La Bretagne est une nationalité qui ne doit plus jamais exister, et les Bretons doivent tolérer la disparition de leur peuple. Cocus contents, tolérants masochistes. Emgasoni.
Face à ce rouleau compresseur , «il subsiste une âme bretonne» (Ch. De Gaulle, 'Mémoires', I). C'est bien ce qui fait problème.

Nous ne savons pas ce qu'il en sera du breton dans cinquante ans (ni du français d'ailleurs). Nous pouvons 'préparer' la situation, pas la programmer. Mais ce n'est pas la question : il n'est pas nécessaire de toujours réussir pour entreprendre, ni pour se battre (avec pragmatisme quand il le faut). La langue bretonne est le signe majeur de l'identité bretonne, indissociable de la conception globale de la Bretagne aujourd'hui. Ce n'est pas exclusif du gallo.

Bref, au centre du débat, se trouve comme toujours la Bretagne comme nationalité dégradée, francisée jusqu'au trognon. Mais quand l'activisme refuse le pseudo-folklore et sort des étroites limites admises, alors se réveille l'anti-Bretagne, de tous les points de l'arc politique et moral. Et ça va durer !

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