L'éolien en France est un sujet de tensions contradictoires entre des intérêts divergents et, aussi, un bon exemple de cafouillages étatiques.
Pour développer une activité économique, le minimum à espérer est une stabilité de la réglementation, une transparence des décisions et qu'il n'y ait pas d'intervention outrancière des monopoles ou d'oligopoles.
Depuis 2003, l'éolien a donné lieu à un maquis impénétrable de lois, une variation des conditions économiques de base et l'opportunité offerte à des sociétés para-étatiques (EDF, GDF-Suez, Alstom) de se nourrir des dépouilles des PME que l'Etat avait fragilisées.
Le tarif d'achat de l'électricité éolienne est mis en cause par les ministères concernés , seulement deux jours avant que le Premier Ministre n'annonce, à la conférence environnementale des 14 et 15 septembre qu'il va mieux aider l'éolien terrestre.
Les experts du gouvernement préconisent les appels d'offres, soit-disant, pour donner de la visibilité aux industriels, en fait, pour favoriser, en douce, les prétendus champions nationaux. Ce serait un ènième changement de cap et une belle opération de com, façon rideau de fumée.
Dans un premier temps, l'Etat comptait sur l'éolien terrestre pour remplir ses engagements vis-à-vis de l'Europe en matière de développement durable, ce qui ne passe pas par le nucléaire (déchets dangereux et de mise en coupe réglée de pays fragiles).
Sans oublier l'impossible démantèlement de gigantesques bouilloires contaminées exposées aux dangers naturels et humains, alors qu'on manque de moyens financiers et techniques.
Après le 11 septembre 2001, l'armée a été contrainte d'établir des batteries antimissiles près des centrales, et la note a été adressée aux usagers et aux contribuables.
A l'époque, aucun scénario n'avait prévu la chute d'un gros avion. Les Japonais n'avaient pas, non plus, prévu de tsunami énorme. Et comme le répète le président de l'Autorité de sûreté nucléaire, André-Claude Lacoste, il est impossible de dire qu'un accident grave ne puisse jamais survenir.
L'éolien, pour les régions ventées, comme la Bretagne, apparaît comme pouvant produire une énergie décentralisée, évitant les pertes en ligne (15 à 20% de l'électricité nucléaire se perd dans les câbles à haute tension), plutôt propre, économe en espace et créatrice d'emplois plus ou moins locaux (construction et entretien), un retour à la situation du début du XXème siècle, quand chaque arrondissement avait sa compagnie d'électricité.
Le réseau électrique en France est maillé, ce qui permet de de répartir la production, mais il date, car il est mal adapté pour faire coexister les unités géantes avec les unités à taille humaine.
On le rénove en créant des couloirs de lignes à très haute tension qui multiplient les dangers et les nuisances, et gare aux habitants qui ne veulent rien comprendre à la toute-puissance des ingénieurs des Mines, cette caste à la gestion anachronique, trop bien insérée dans le coeur de la République.
En Allemagne et en Scandinavie, on a tout de suite compris l'intérêt des sources décentralisées de production (éolien, photovoltaïque, biogaz), plus souples et moins chères. L'Allemagne et la Suisse, ainsi que le Japon ont décidé de renoncer à l'électronucléaire.
En France et, encore plus en Bretagne, dont la population est beaucoup plus dispersée, on aurait intérêt à cesser de croire que plus c'est gros, plus c'est beau et plus c'est rentable. C'est, ainsi que le directeur de l' Agence de l'Environnement et de la maîtrise de l'Energie (Ademe) essaie de ménager la chèvre et le chou en disant que l'éolien terrestre serait utile à court terme, avant de le démanteler pour faire de l'éolien en mer.
Autrement dit, les redevances que reçoivent les communes accueillant des parcs éoliens leur seraient retirées, parce qu'encore une fois, l'Etat aurait changé de stratégie. Serait-il possible d'avoir des dirigeants qui sachent diriger, au lieu de peser pour aller dans une direction, puis, repartir dans une autre?
Evidemment, on ne peut pas laisser implanter des éoliennes de 150 mètres tous les 2 kilomètres, et rechercher des sites à des distances raisonnables des habitations est impératif. Pour les impacts sonores (basses fréquences) sur les habitants et sur les animaux, il apparaît quasiment impossible de les évaluer, car, il n'y a personne pour financer les études.
Les huit éoliennes installées en 2003 à Plougras (22) provoquaient des bruits insupportables pour les riverains, mais, il semble qu'ils étaient les victimes d'une fabrication approximative par un grand nom de la filière nucléaire en mal de reconversion partielle.
Pas étonnant que ce soient les Danois, les Allemands et les Espagnols qui soient considérés comme meilleurs en la matière !
Les petites sociétés bretonnes sont rachetées par les mastodontes industriels qui préfèrent que le minimum d'éoliennes soit fixé à 5 (décision du Grenelle 2) plutôt qu'à 3 comme le demandent les moyens entrepreneurs.
Il y a des schémas régionaux de développement éolien, mais, dès qu'une zone de développement éolien est visée par un projet, la contestation s'enflamme, coordonnée le plus souvent par l'association «Vent de colère», mais, pas toujours sans rapport avec le phénomène NYMBY (d'accord pour l'éolien, mais, seulement, chez le voisin).
Comment se fait-il qu'on ne puisse avoir un projet acceptable dans les zones les moins peuplées, comme en Poher (permis de construire refusé en août au Moustoir/Maël-Carhaix), alors que c'est un endroit où le vent souffle presque toute l'année? Il est vrai qu'avec le croisement entre la protection des couloirs de faune et la protection visuelle des monuments historiques (une petite pierre, voire un champ de fouille serait un motif de refus), le préfet conserve des marges pour accorder ou ne pas accorder une autorisation en fonction du «bruit» local..
Une modeste, mais, réjouissante, alternative est que les particuliers et les entreprises cherchent à produire eux-mêmes leur énergie et cessent d'être les jouets de politiques instables, dont on sait qu'elles feront que le prix de l'énergie électrique va considérablement augmenter.
Aucune autorisation n'est requise pour mettre une éolienne de moins de 11 mètres dans son jardin et un producteur de céréales d'Ergué-Gabéric (29) vient de mettre en service une éolienne de 24 mètres qui le rendra autonome pour ses bâtiments et son moulin à farine bio.
Plus fort encore, une usine de Châteaubourg (35) est équipée d'une éolienne de 87 mètres pour couvrir 10% de ses besoins (coût : 1 million d'euros). A ce prix, on a du soigneusement calculer la rentabilité, bien que l'Etat puisse la détruire, sans qu'on lui demande des comptes.
Il faudrait aussi que la règlementation sur les petites centrales électriques soit plus souple, surtout dans un pays où l'eau courante est abondante. Il y aurait encore mieux à attendre des hydroliennes (centrales électriques immergées dans la mer pour profiter des courants marins).
Christian Rogel
Notes :
La Bretagne compte 105 parcs éoliens (15 dans le Nantais) , dont la puissance théorique est d'environ 800 Mégawatts (source : le site sur le suivi de l'éolien consulté le 160912 (voir le site) ).
L'éolien terrestre en France a vu son développement considérablement freiné depuis 2011. Il faudrait huit ans, en moyenne, pour ouvrir un parc éolien.
Au Chéfresne (Mayenne), tout près de la Bretagne, beaucoup d'habitants contestent la ligne à très haute tension qui doit acheminer l'électricité nucléaire produite à Flamanville (Manche).
■L'éolien est en mesure d'apporter une importante contribution à la production d'électricité, contribution qui augmente chaque année. Le solaire fait encore mieux en rythme de croissance, photovoltaïque et thermodynamique.
Pour le coût effectif de l'éolien terrestre, voir :
Voir le site
Celui-ci est tout à fait compétitif avec le coût futur (2016-2017) de l'électricité nucléaire de l'EPR, lorsqu'il sera terminé (2016-2017).