Lettre ouverte à M. Le Drian
Telgruc-sur-Mer, 25/10/2005
Copie adressée aux responsables associatifs, économiques et politiques de la Bretagne historique
Monsieur le Président,
Nous avons appris de manière indirecte, il y a quelque mois, le lancement d’une revue consacrée à la vulgarisation des travaux universitaires menés en Bretagne, financée par le Conseil régional, par le biais d’une Association pour la revue Bretagnes, créée à cet effet.
Vous n’êtes pas sans savoir qu’ArMen, revue lancée il y a 20 ans, sans aides publiques s’attache depuis 149 numéros à diffuser les travaux d’universitaires et de spécialistes sur de nombreux aspects de la civilisation bretonne, y compris les sciences sociales, l’économie, le mode de vie, la géographie, l’urbanisme. Ces axes étant ceux annoncés par les collaborateurs de la future revue Bretagnes, nous ne pouvons que nous inquiéter de l’arrivée d’une nouvelle revue, entièrement portée par des subventions, sur un terrain où ArMen a creusé un sillon, respecté et envié, au-delà de nos frontières.
Nous avons appris que cette revue serait vendue en kiosque et sur abonnement, qu’elle aurait un format et une pagination proche d’ArMen, que son budget, ses locaux et équipement, ainsi que ses salariés seraient entièrement payés par le Conseil Régional, qui en plus conforterait d’emblée sa subsistance en préachetant de nombreux numéros. Dès la préparation du premier numéro de votre nouvelle revue, un auteur proche d’ArMen s’est vu commander un article dont la publication était déjà convenue dans ArMen, ce qui a renforcé nos craintes. L’annonce que la revue proposerait des rubriques livres et expositions devrait à juste titre inquiéter d’autres revues bretonnes au-delà d’ArMen.
Nous avons plusieurs interrogations : pourquoi lancer une nouvelle revue entrant en concurrence avec d’autres, financée par l’argent des contribuables ? Un Conseil régional a-t-il vocation à publier une revue d’information dans un secteur concurrentiel ? Pourquoi n’avoir à aucun moment rencontré les professionnels du secteur pour évoquer des synergies possibles, avec les éditeurs de revues existants ? Compte tenu des difficultés rencontrées il y a quelques années par l’entreprise qui publiait ArMen, des efforts de relance, couronnés de succès, menés par l’entreprise actuelle, nous demandons au Conseil Régional de veiller à ce que dans l’avenir cette revue ne mette pas en péril les publications existantes. Au regard de notre travail, nous demandons également à bénéficier du même soutien que celui accordé à la future revue et à certaines publications sur la Bretagne (pré-achat de numéros, encart publicitaires du Conseil régional…). Nous demandons au Conseil régional de faire appel, pour la préparation de cette revue, aux professionnels reconnus, qui contribuent au maintien en Bretagne d’industries culturelles précieuses pour l’économie du pays.
Enfin, nous nous étonnons, eu égard aux ambitions affichées par le Conseil Régional sur le rapprochement de la Bretagne administrative et de la Loire-Atlantique, que la future revue Bretagnes se donne comme cadre une Bretagne tronquée. Nous trouvons là, il est vrai, une vrai différence de ligne éditoriale, qui sera appréciée par nos lecteurs respectifs.
En comptant sur votre bienveillance pour tenir compte des inquiétudes exprimées dans cette lettre ouverte, nous vous précisons d’accepter Monsieur le Président du Conseil régional de Bretagne, l’expression de nos sentiments distingués.
Jacques Fitamant, Directeur de publication d’ArMen, Directeur des Editions Fitamant
Yann Rivallain, Rédacteur-en-chef d’ArMen
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