Le printemps turc est un printemps pourri

Communiqué de presse publié le 26/06/12 16:14 dans Politique par André Métayer pour André Métayer

Le dernier mois du printemps 2012 a été particulièrement éprouvant pour les Kurdes.

24 mai - Leyla Zana, députée BDP : condamnée à 10 ans de prison pour soutien au PKK et à A. Öcalan.

25 mai - Aysel Tugluk, députée BDP : condamnée à 14 ans de prison pour « propagande » envers le PKK.

30 mai - Ibrahim Ayhan, député BDP emprisonné depuis octobre 2010 : 10 ans de prison requis pour « appartenance » au PKK.

30 mai - enquête contre 103 avocats défenseurs dans le procès des « 151 » de Diyarbakir.

31 mai - six députés (Selahattin Demirtaş et Gültan Kışanak, co-présidents du BDP, Ahmet Türk et Aysel Tugluk, co-présidents du DTK, Nursel Aydogan, Emine Ayna, Sebahat Tuncel et Ayla Akat Ata) accusés d'être « membres de l'organisation KCK » : demande de levée de leur immunité parlementaire.

1er juin - Nejdet Atalay, maire de Batman, emprisonné depuis 2009 dans l'affaire de KCK : condamné à 1 an et 8 mois de prison pour avoir qualifié A. Öcalan de « leader du peuple kurde ».

2 juin - Sinan Uysal, maire de Basverimli, district de Silopi : mis en état d'arrestation.

6 juin - 6 maires, dont Bekir Kaya, maire de Van et 19 militants BDP : placés en garde à vue.

16-18 juin - mutinerie dans les prisons surpeuplées : 13 morts, des dizaines de blessés. Selon le rapport annuel de l'IHD, le nombre de détenus s'élève en février 2012 à 130.617, dont 2.309 enfants. 90,94 % de ces derniers sont en détention provisoire, soit 2.100 enfants. Le nombre de détenus était un peu moins de 60.000 en 2002, année de l'arrivée au pouvoir de l'AKP, parti du Premier ministre R. Tayyip Erdogan.

Rappelons que, depuis avril 2009, quelques semaines après le succès historique du parti kurde lors des élections municipales, près de 8.000 membres actifs du BDP ont été jetés en prison dans le cadre de l'affaire dite du «KCK», sans parler de milliers d'autres arrestations sous prétexte de « lutte contre le terrorisme ». Parmi eux figurent 32 maires et six députés BDP, une quarantaine d'avocats et autant de syndicalistes, des centaines d'étudiants et 500 militantes du BDP, plus de 90 journalistes et des centaines d'enfants. Cette liste grossit chaque semaine avec l'arrestation de dizaines d'autres.

19 juin - combats dans l'extrême sud-est de la Turquie : 32 morts et de nombreux blessés.

20 juin - raid aérien contre les bases kurdes de Qandil (Irak).

Veille permanente devant le conseil de l'Europe à Strasbourg

Une veille permanente va débuter devant le Conseil de l'Europe jusqu'à la libération d'Abdullah Öcalan, leader du peuple kurde enlevé le 15 février 1999 et détenu sur l'îlot prison d'Imrali, en Turquie. Depuis le 27 juillet 2011, Abdullah Öcalan est maintenu dans un isolement complet, nul ne peut entrer en contact avec lui, ni sa famille, ni ses avocats dont 36 d'entre eux ont été interpellés et incarcérés. Le nombre des prisonniers politiques kurdes ne cesse d'augmenter en Turquie. La situation est urgente.

Bernard Revollon, président des Amis du peuple kurde en Alsace, rappelle qu'un groupe de quinze Kurdes avait débuté le 1er mars 2012, à l'Église Saint-Maurice de Strasbourg, une grève de la faim afin de dénoncer la situation urgente et alarmante du peuple kurde et de son leader. Elle avait pris fin au bout de 52 jours. Cette veille permanente est la continuité de cette action.

Condamnation de Leyla Zana : protestation indignée du MRAP

Le MRAP rappelle que « Leyla Zana qui a déjà passé 10 années en prison (de 1994 à 2004), a reçu le prix Andrei Sakharov pour les Droits de l'Homme et a été nominée deux fois pour le prix Nobel de la Paix. Il s'indigne de cette nouvelle condamnation d'une femme qui a toujours lutté pacifiquement pour les droits légitimes du peuple kurde.

[La nouvelle condamnation de Leyla Zana] s'inscrit dans la politique de répression du peuple kurde : des milliers d'arrestations parmi lesquelles des élus, des avocats, des journalistes, des femmes, des enfants. La France et le Parlement européen se doivent d'intervenir pour exiger la libération de Leyla Zana et des prisonniers politiques kurdes et turcs ».

Condamnation de Leyla Zana : l'UDB écrit à François Hollande

Naig Le Gars, Conseillère régionale UDB (Union démocratique bretonne) s'est adressée directement au nouveau président de la République française, François Hollande, pour lui faire part de ses préoccupations concernant « le sort de la députée Leyla Zana, condamnée à 10 ans de prison par le tribunal de Diyarbakir, le 24 mai 2012 » au moment où les relations entre la France et la Turquie, un moment distendues, semblent vouloir repartir sur de nouvelles bases.

La reprise du dialogue ne doit pas faire l'impasse sur les nombreuses violations des droits de l'homme dont se rend coupable le gouvernement turc, notamment à l'encontre des Kurdes. La répression contre les organisations kurdes, et particulièrement contre les femmes, s'est à nouveau renforcée. Près de 500 femmes, et des centaines d'élu(e)s sont aujourd'hui emprisonné(e)s, comme le sont également des syndicalistes, des journalistes, des enfants, des militants des Droits de l'Homme, ainsi que de nombreux avocats.

Rappelant que de nombreux Bretons ont tissés des liens avec le peuple kurde et que la ville de Rennes entretient une coopération étroite avec la ville de Diyarbakir, Naig Le Gars conclut :

« en intervenant auprès du gouvernement turc, vous vous montreriez fidèle à votre éthique, Monsieur le Président, fidèle à la politique de promotion et de protection des Droits de l'Homme [qu'enfin devraient avoir] la France, l'Union européenne et l'ONU ».

Pınar Selek, victime d'une nouvelle campagne de harcèlement

La Plateforme «Nous sommes tous témoins (Turquie)» dénonce la campagne de presse haineuse dirigée contre Pinar Selek, exilée à Strasbourg, qui, blanchie à plusieurs reprises, doit être néanmoins pour la énième fois rejugée à Istanbul pour « actes de terrorisme ». Cette femme, devenue le symbole des dérives du système judiciaire turc, risque la prison à perpétuité.

Nous savons que Pınar est simplement l'une de celles et ceux qui, depuis des années dans ce pays sont sanctionnés, écrasés, livrés à eux-mêmes pour leur défense, non pas tant pour leurs écrits ou leurs actes, mais parce qu'ils franchissent certaines lignes rouges, en particulier s'intéressent de trop près à la question kurde.

Le public connaît bien Pınar Selek, par ses écrits, ses travaux, et sa lutte contre la violence et la guerre. Elle a lutté, et continue de lutter pour ces valeurs, sans préjugés, avec toutes les composantes de la société. Un temps, elle a écrit, ouvertement, pour le journal Gündem, sans se retenir de le critiquer autant que d'apporter son soutien. Est-ce pour cela qu'on veut l'inculper ? Tout ce qu'elle a fait, écrit, entrepris, elle l'a fait en toute clarté, ouvertement, sous les yeux de tous, sans dissimulation.

Nicole Kiil-Nielsen, Eurodéputée Verts-ALE, a présenté la candidature de Pinar Selek, au prix des Droits de l'Homme (« La Tulipe des Droits de l'Homme ») décerné par le gouvernement néerlandais.

Pinar Selek est venue à Rennes, invitée par son collectif de soutien dans le cadre de la semaine de Solidarité internationale organisée par la Maison internationale de Rennes.

André Métayer

Quizz :

Combien de détenus sont, dans le monde, accusés de « terrorisme » ? - réponse : 35.117

Combien de détenus sont, en Turquie, accusés de « terrorisme » ? - réponse : 12.897

(Source : BDP)


Vos commentaires :
marc iliou
Vendredi 27 décembre 2024
Et que va faire la France pays soit disant des droits de l'homme sur ce problème ? ne rien faire au nom de «l'intégrité territoriale» de la Turquie ou dénoncer le terrorisme turc ? A suivre pour voir quelle sera la réponse du parti socialiste français...

Michel Prigent
Vendredi 27 décembre 2024
Je pense que déjà la réponse de la France est toute faîtes.
Il me semble avoir vu il y a peu Hollande serrer la main au Président de Turquie.
Quand au génocide arménien, tout le monde est bien content que ce projet de loi ai été retoqué par le Conseil Constitutionnel.
On ne va pas se fâcher entre collègues partisans d'un état laïc, un et indivisible, monolingue et centralisateur, ce serait mauvais pour le business.
Et bien entendu, l'UE est d'accord.

Jean-Loup LE CUFF
Vendredi 27 décembre 2024
Je ne sais plus où j'ai lu que des émissaires turcs étaient venu en France voici quelques décennies pour voir comment la «république des droits de l'homme» avait réglé son problème des minorités et langues minoritaires par l'éducation obligatoire et monolingue de Jules Ferry, afin de s'en inspirer contre leur minorité Kurde... Les génocideurs turques (contre les Arméniens) et français (contre le Sud Bretagne et Vendée) sont unis la main dans la main dans l'ethnocide de leurs minorités encore vivantes! Ainsi, la Turquie ne doit pas entrer en Europe, au vu de la charte européenne des langues minoritaires et celle du droit des enfants à parler la langue de leurs parents, et la France qui n'a toujours pas signé et ratifié ces documents qu'elle impose aux autres pays entrant en Europe, (Roumanie, Bulgarie, ...) devrait en sortir !!!

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