Après avoir légèrement augmenté en février, surtout en Ille-et-Vilaine et dans le Morbihan (voir notre article), le chômage poursuit sa hausse en Bretagne, dans tous les départements sauf les Côtes-d'Armor, sur fonds d'inquiétudes pour l'industrie navale et l'usine de Chartres-de-Bretagne.
Fin mars 2012, il y a 172.262 chômeurs de catégorie A (aucune activité) en Bretagne, soit 1.486 de plus que le mois précédent. La Loire-Atlantique, département le plus productif de la Bretagne dont il représente entre 40 et 45 % du PIB, représente aussi le tiers des chômeurs bretons. Hormis les Côtes-d'Armor, qui enregistrent une baisse de 0,50 % du nombre des chômeurs du département (soit environ 108 de moins), le nombre des chômeurs augmente de 0,72 % en Loire-Atlantique (+366), de 0,80 % dans le Morbihan, de 1,30 % en Ille-et-Vilaine et de 1,60 % dans le Finistère. En Loire-Atlantique, le chômage augmente pour toutes les catégories, mais touche surtout les plus de 50 ans, tant hommes que femmes. La même tendance se retrouve aussi dans tous les départements bretons pour les catégories A, B et C du chômage (activité réduite ou partielle pour les catégories B et C).
Hors de nos frontières, en France, le chômage augmente de 0,6 %, le nombre de chômeurs ayant augmenté de 35 % depuis 2007 et l'arrivée au pouvoir de l'actuel président Nicolas Sarkozy. Depuis ce même moment aussi, la France s'est enfoncée dans une crise dont elle n'est toujours pas ressortie, alors que nos voisins européens et la Bretagne ont connu une brève mais réparatrice rémission entre 2010 et 2011. Depuis, les politiques de rigueur mises en place presque partout (sauf en Allemagne qui les a anticipées sous Schröder) en réponse unique aux crises des dettes obligataires nationales ont douché les frêles prévisions de croissance et entraîné un début de stagnation économique générale dans le Vieux Monde, à l'exception du nord de l'Europe et des pays de l'Est. La France a fin mars 2.712.238 chômeurs, si on exclut ceux de Bretagne. Et ce cycle destructeur de l'emploi n'est pas près de s'enrayer, à voir le gouvernement actuel minimiser le phénomène ( c'est tellement pire ailleurs, a déclaré Henri Guaino, conseiller spécial de Nicolas Sarkozy et l'opposition bien placée par les sondages pour remplacer l'actuel locataire de l’Élysée ne faire qu'instrumentaliser le problème à des fins électorales. Par ailleurs, la polémique sourd toujours sur les pratiques mises en place par l'éxecutif actuel pour tenter d'endiguer la hausse du chômage (voir notre article)
Les dernières semaines ont été, en Bretagne, agitées d'inquiétudes quant au devenir de la filière navale. Hyper-dépendante de la bonté de l’État-providence et peu habituée à la concurrence, très concentrée aussi autour des Chantiers de l'Atlantique (STX) à Saint-Nazaire, elle s'est retrouvée le bec dans l'eau après que ces Chantiers aient perdu deux commandes de paquebots et ont annoncé 11.000 heures de chômage partiel. Il n'est pas nécessaire d'être sorti de Harvard pour comprendre qu'un tel fonctionnement, somme toute normal pour des secteurs industriels entiers en France, ne l'est absolument pas dans des conditions d'une mondialisation par ailleurs bien intégrée en Bretagne, dont les derniers secteurs aux mains des bras armés de l’État jacobin devront s'adapter… ou disparaître, puisque ce même État n'a plus d'argent pour éponger l'éternel déficit de cet aménagement du territoire industriel. A Chartres-de-Bretagne, la mairie et les pouvoirs locaux ont décidé de prendre à bras-le-corps le risque de fermeture de la plus grosse unité industrielle bretonne, qui emploie 5.800 personnes sur le même site. (voir le site) Une démarche qualitative avec certification de territoire, c'est original, mais que peut faire une commune ou une communauté de communes face à l'organisation d'une entreprise mondialisée, qui a supprimé, entre la fin de l'an dernier et aujourd'hui, 147 postes en production, 79 en recherche et développement et muté 80 autres vers d'autres sites, ramenant le nombre d'emplois total en-dessous de celui de 1967 (voir le site) Enfin, si actuellement aux Chantiers navals du Rohu à Lorient, qui dépendent aussi de Saint-Nazaire, le travail ne manque pas, la direction ayant sucré tous les ponts et utilisant les heures supplémentaires à outrance à un tel point que la CGT-Navale propose de faire venir les ouvriers nazairiens au chômage pour prêter main forte à leurs collègues lorientais, le spectre du chômage partiel resurgit après juin si aucune commande n'est faite.
Malgré ces sombres horizons, nous persistons à croire en une reprise bretonne entre la fin du printemps et la fin de l'été 2012. En Bretagne, il y a une capacité industrielle que la France n'a pas, une culture de l'entreprise et de l'économie à laquelle notre voisine d'outre Couesnon n'est plus habituée, et, bien que la situation incite à la morosité, les offres d'emploi collectées par Pole Emploi repartent à la hausse. Exemple en Loire-Atlantique où 233 offres d'emploi durables (+ de 6 mois) et 1.491 précaires ont été collectées en plus en mars par rapport à février 2012. Cinq ans de sarkozysme triomphant n'ont pas réussi à détruire l'économie bretonne, donc tout espoir est permis pour la Bretagne.
Louis-Benoît GREFFE
■