À l'issue de deux années de travaux, le Mémorial de l'abolition de l'esclavage a ouvert ses portes au public, à Nantes, dimanche 25 mars, à 15 h, à l'endroit même où 43 % des 4.100 expéditions négrières françaises prirent le large. Ce mémorial, une première en Europe, est l'un des monuments les plus importants au monde consacré à la traite négrière, à l'esclavage et à son abolition.
Conçu par l'artiste polonais Krzysztof Wodiczko et l'architecte américain Julian Bonder, ce mémorial se veut également «une oeuvre artistique», comme l'explique Françoise Vergès, présidente du comité pour la mémoire et l'histoire de l'esclavage (voir le site) de Ouest France du 23 mars 2012. Nous avons visité ce monument aux dimensions impressionnantes, en arpentant la galerie souterraine de 90 m de long, sur la berge de la Loire, au regard du quai de la Fosse.
Au delà des piliers et structures en béton, le fleuve coule, majestueux. Une paroi constituée de 2.000 plaques de verre gravé, chacune consacrée à une expédition, rappelle à notre mémoire que Nantes, aux XVIIIe et XIXe siècles était, sur la façade atlantique, avec Bordeaux et Liverpool, l'un des hauts lieux du commerce triangulaire. Plus de 450.000 Africains auront ainsi été déportés, principalement vers les Antilles françaises. En même temps que ces plaques de verre dédiées à la traite proprement dite, des citations d'hommes de lettres et historiens nous appellent à méditer. Selon le souhait du concepteur, «les visiteurs éprouveront l'enfermement que ressentaient les esclaves lors de leur transport maritime».
Ce lieu de mémoire du quai de la Fosse est le point de départ d'un parcours de 1,5 km, qui s'étire à travers Nantes, jalonné de onze lieux emblématiques, dont la dernière étape est le Château des Ducs de Bretagne, le musée d'Histoire possédant plusieurs salles exclusivement consacrées au commerce triangulaire nantais.
Nous nous devons de considérer que ce mémorial symbolise l'acceptation par tous de l'histoire de la traite, tant pour les Européens que pour les Africains et les Américains. Pour mieux bâtir l'avenir et appréhender le présent, la connaissance du passé est indispensable.
Seul bémol qui pourrait être mis lors de l'inauguration en grande pompe de ce mémorial, ce serait son coût qui paraît prohibitif. En effet, l'investissement cofinancé par Nantes-Métropole, le FEDER (Fonds Européen de Développement Régional), les Pays de la Loire et la ville de Nantes se monte à 7,9 millions d'euros TTC. Une somme très importante en cette période de crise où toutes les collectivités bretonnes se serrent la ceinture et ferment le robinet à toutes les subventions (voir notre article), alors même que le Mémorial a connu près d'un million de dépassement de son coût, initialement prévu à 6,9 millions d'euros.
Gilbert Engelhardt
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