“Il manque à nos élus la culture de l'anticipation”

Interview de Liam Fauchard, spécialiste du monde économique.

ABP- Liam, de quoi vas-tu parler lors du Café Économique de Pont-Aven programmé à Mellac ce jeudi 19 janvier ?

Liam Fauchard - Pour tracer quelques scénarios « Pays de Quimperlé 2025 », il faut partir des contextes, des éléments factuels de cadrage... puis examiner les ruptures principales (exogènes et endogènes) qui peuvent survenir dans les quinze ans qui viennent et qui modifieront les perceptions que nous avons. De même il faut s'interroger sur les capacités des acteurs et des facteurs structurants à anticiper sur les mutations à venir. In fine, je poserai les questions de l'organisation de la gestion publique du territoire et de ses articulations avec les mutations socio-économiques. Le Pays de Quimperlé fut, industriellement, un Pays de Cocagne ; ce n'est plus le cas.

ABP- Penses-tu que la Bretagne fait les bons choix en matière économique en ce moment ?

Liam Fauchard - S'il s'agissait de la Bretagne, je serais assez optimiste ; cela signifierait que les décideurs (politico-économico-sociaux) ont accès aux manettes qui régulent les tubulures du Pays (référence à Paol Keineg). Avec la RAB et ses atermoiements je suis moins rassuré. Je connais trop d'entreprises bretonnes qui créent des joint-ventures en Thaïlande, au Vietnam, au Mexique, au Brésil... faute d'être épaulées chez nous. La crise globale risque d'être amplifiée chez nous par la faiblesse des investissements productifs créateurs de valeur ajoutée pendant que, dans le même temps, des fonds publics (contribuables) ne sont pas investis de manière optimale. La pertinence de l'allocation de ressource se posera avec acuité.

ABP - Que manque-t-il à nos élus pour pouvoir bien manoeuvrer la barque de la prospérité économique, culturelle et sociale ?

Liam Fauchard - La culture de l'anticipation, la compréhension du Monde actuel (économie numérique, sociologies en mouvements, culture du ET, priorité à la création d'entreprises, attente des jeunesses ...etc.). Par ailleurs, la moyenne d'âge des élus et la multiplicité des mandats (cas unique en Europe) sont préoccupants ; dans les Pays nordiques, rien que dans les Parlements il y a entre 25 % et 45 % de moins de 40 ans. En France, c'est 4 % ! La variété des itinéraires sociaux ne se retrouve plus dans les assemblées délibérantes, ce qui handicape les visions plurielles des sujets et qui amène des orientations souvent conformistes.

Et les idéologies réductrices, type “Développement Durable”, ne favorisent pas l'émergence de réflexions prospectives fécondes.

ABP - Une illustration, poétique ou autre ?

Liam Fauchard - « Il n'est pas nécessaire d'aimer le monde qui vient pour accepter de le voir » [François-René de Châteaubriant]