Gilles Servat, le cd Ailes et îles

Musique publié le 13/12/11 14:21 dans musique par Gérard Simon pour Gérard Simon
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Gilles Servat
Medley extraits sonores du Cd Ailes et Iles Gilles SERVAT - Coop Breizh

Irlande, Asturies, Acadie… Bretagne !

Engagement, satire, interceltisme, émotion, chaleur et... poésie !

Voici quelques-unes, seulement, des couleurs permettant à ce brillant peintre des mots de créer les paysages contrastés qui illustrent avec acuité, pertinence et beauté les pages de ce nouvel opus de 13 titres (+ 1).

« Ailes et îles » se nomme ce CD qui, par ses inspirations cosmopolites, se teinte naturellement de « world » au fil des couplets chantés en français, asturien et breton.

« Ailes et îles, parmi vous je vis. La flamme est en moi ».

Ces mots, presque discrètement, annotés, au dos du livret, par l'auteur décrivent, à eux seuls, l'état d'esprit de notre loyal et épidermique chanteur breton dont la flamme reste, effectivement, fort vive, mais qui s'apaise du cri strident des goélands, du vol ample des ibis, ou des postures échassières du héron cendré qui veillent sur les marais noirs ou blancs… et les îles. À chaque nouvelle parution, nouvelle œuvre, la poésie de Gilles Servat, toujours plus contemporaine semble temporiser les « colères » de l'artiste, donnant à ses réflexions, observations ou indignations la force des sages.

Ce disque est abouti, objectif, crédible et superbe… parce qu'il est lui.

Les thèmes multiples qui y sont abordés, apparaissent, sans grand doute, comme quelques-uns des essentiels qui font le monde, les mondes, de Gilles Servat.

Loin de nous l'idée de faire, ici, la visite exhaustive et commentée de ce 21e album, ceci pour plusieurs raisons !

- Notre article serait trop long, tant chaque titre mérite attention… Pourquoi ne pas le dire d'entrée, dans cet album, tout est bon !

- D'autres l'ont déjà fait, notamment sur le web, et Gilles mérite l'éternelle et fébrile découverte plus que le « catalogue annoté ».

40 ans sur les petites et grandes scènes on fait de lui, en et hors Armorique, un représentant reconnu de la belle chanson à textes, l'auteur dont on attend les mots et les musiques et qui consolide, à chaque création, l'édifice de notre expression syntaxique française faite des subtiles nuances des mots qu'il sait si bien distiller.

Ah, bien sûr, nous avons été immédiatement touchés, dès l'ouverture du CD, posée sur des notes traditionnelles de musique irlandaise, par la virile et paternelle tendresse exprimée, « bras ouverts » pour son fils Edern (« C'est mon gars »), en plage 4, par le sincère hommage rendu aux bénévoles qui, de fait, « font », notamment, les festivals d'été (« Sur le front des bénévoles »).

Que dire de la réflexion quasi philosophique chantée et parlée sur les « Hiérarchies » établies et pour quels profits, notamment, dans le contexte du rapport homme-nature, ou celles qui négligent la sécurité des ouvriers au début de l'exploitation minière ? « J'emmerde les contremaîtres, les actionnaires et les jaunes, dans le puits Maria Luisa, sont morts quatre mineurs ». (« Santa Barbara Bendita », traditionnel asturien, chant populaire du mouvement ouvrier).

Suivent « Le nain charmant », caricature pamphlétaire, sur un petit ambitieux devenu roi aux bras d'une princesse chanteuse, sous les auspices d'un affairiste enchanteur, puis, « Voici l'insouciance », ode au détachement, à la désinvolture, à ce « souffle divin » que « tant de rois attendent, en vain » et que Gilles « mesurant sa chance », semble, parfois, côtoyer… Ne sont-ce pas les « ailes » et les « îles » qu'il affectionne ?

Réalisme et humour noir fusionnent, à nouveau, dans la voix de Gilles qui dénonce, en suite, les lâches « couvertures » sanctionnant, à peine, les crimes ecclésiastiques de pédophilie. (« La paroisse de Prêchi-prêcha »).

Sur le célèbre traditionnel irlandais « The Wild Rover », voici « Le cul cousu d'or », chanson de forban traitant de la perversité et l'ambiguïté de la relation mercantile.

Au-delà de ces chansons, ci-dessus, brièvement décrites, dont nombre d'entre elles ont été rodées sur scène, avant leur enregistrement en studio, nous avons beaucoup aimé :

- « Je pense à toi, je pense aux tiens », dédié à Roland Gauvin, chanteur acadien que Gilles a rencontré au Festival Interceltique de Lorient, rappelant la terre d'accueil que furent la Bretagne et, particulièrement, Belle-Île en Mer, pour ses compatriotes chassés de leur pays par les Anglais, lors du « grand dérangement » de 1755. Ce crescendo vocal et poétique contenu par l'émotion du paysage qui crée les pensées est subtilement et pudiquement enjolivé par les claviers, flûtes guitare et accordéon. Il nous emmène entre Quiberon et Le Croisic, là où, escorté par les îles d'Houat et Hoëdic, le vaisseau amiral qu'est Belle Île, suscite « dans l'or que les flots réfléchissent », le rêve de retrouvailles vocales pour les deux chanteurs.

Dans le prolongement de cette ambiance intimiste, soudain installée, nous retiendrons, aussi, « Na gousk ket » où, à tout jamais, les convictions linguistiques et identitaires de Gilles resurgissent, sous la mélodie d'une berceuse saupoudrée d'accordéon qui inciterait à l'effet contraire de sa prime vocation : « Si tu dors, si tu dors, ils voleront ta langue et le monde né d'elle ».

Gardons, précieusement encore quelques instants, cette chaude poésie dont Gilles Servat nous gratifie pour mettre, également, en lumière « Conamara », le nom gaélique du Connemara.

Tout, dans ces couplets, y est velouté, apaisant, pictural et la flûte d'Arnaud Ciapolino y ajoute les couleurs nostalgiques et irlandaises de l'imaginaire.

Nous vous laisserons le loisir de découvrir et d'apprécier à sa juste valeur le sublime hommage à Youenn Gwerning, poète breton, disparu en 2006, longtemps émigré aux États-Unis, chanté en breton « Kenavo Youenn Vras » et ce qui fait l'envoi de ce véritable poème contemporain qu'est cet album, « Toujours la mer nous unira » dont les chœurs ne sont autres que les Tri Yann qui ont accueilli Gilles, dans leur studio de Savenay (44-Bretagne sud), pour cet enregistrement capté, mixé et masterisé en avril et mai 2011, par Pascal Mandin et Nicolas Quémener.

Saluons la qualité véloce et raffinée des musiciens : Nicolas Quémener, guitare et direction artistique ; Hilaire Rama, basse ; Jean-Marie Nivaigne, batterie ; Ronan Pellen, cistre ; Philippe Turbin, claviers ; Arnaud Ciapolino, flûtes ; Yannig Noguet, accordéon diatonique ; Jean-Michel Mahévas, cornemuse ; et Christophe Mahévas, bombarde.

Procurez-vous, au plus vite, cet excellent cru que l'on attendait… depuis 6 ans ! La vinification littéraire et mélodique est excellente.

Merci, Monsieur Servat pour cet ample spectre poétique qui n'altère en rien la pertinence de vos propos…

En quelque sorte, une fois encore : « Qu'en termes choisis ces choses-là sont dites ! … ».


Gérard Simon


Nous vous proposons d'écouter un medley de 3 extraits de l'album « Ailes et Îles », au-dessus de la photo.

« Je pense à toi, je pense aux tiens », « Na gousk ket » et « Toujours la mer nous unira » (avec Tri Yann).

01 - C'est mon gars (3:47)

02 - Je pense à toi, je pense aux tiens (3:17)

03 - Na gousk ket (3:04)

04 - Sur le front des bénévoles (3:21)

05 - Hiérarchies (5:30)

06 - Santa Barbara Benita (4:08)

07 - Le nain charmant (5:06)

08 - Voici l'insouciance (4:00)

09 - La paroisse de Prêchi- Prêcha (4:33)

10 - Le cul cousu d'or (3:40)

11 - Kenavo Youenn Vras (3:37)

12 - Conamara (4:16)

13 - Toujours la mer nous unira (3:54)

14 - Bonus (1:56)

CD «Ailes et Îles » :

Parution : octobre 2011

Édité chez : Coop Breizh : (voir le site)

Réf : Coop Breizh 4015527


Vos commentaires :
Byn Walterss
Jeudi 26 décembre 2024
Ah bon, 'The Wild Rover' est une chanson Irlandaise, depuis quand?

Byn Walterss
Jeudi 26 décembre 2024
Ni 'Dirty Old Town', ni 'Wild Rover' est une chanson Irlandaise, pas comme 'The Town I Loved So Well',

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