En France, il est d'usage de critiquer les gouvernants politiques, de quelque bord qu'ils soient, car ils refusent, nous dit-on, le dialogue, la concertation, le débat. Mais le débat est-il possible et peut-il être productif dans un pays dont le système éducatif l'exclut intrinsèquement ?
En France, on apprend, on récite, on bachote, on passe des examens et des concours selon des méthodes magistrales, mais on n'apprend guère, même à des niveaux supérieurs, à réfléchir, à faire des recherches personnelles ailleurs que dans des ouvrages conseillés par les maîtres et dans le cadre étroit de l'obtention d'un diplôme. Il en résulte une certaine inaptitude aux débats assez particulière qui peut étonner les observateurs des pays voisins.
Une des raisons, en ce qui concerne les sujets traitant de politique est évidemment le fameux clivage droite/gauche qui oblige les uns à essayer de conserver la place qu'ils ont acquise de justesse après des élections aux scrutins peu démocratiques et les autres à essayer de leur ravir cette place si convoitée. Si un débat est organisé, personne n'écoute personne, chacun présente ses arguments au moyen de postulats, formules creuses, slogans, opinions bien arrêtées, sans études prospectives ni bilans chiffrés et l'on quitte la table dite des négociations en disant que la partie adverse n'admet pas la concertation. Il n'existe pas de protocole, même de désaccord, signé immédiatement par les deux parties à la fin des “discussions” et rendu public. On se contentera alors de vagues comptes rendus élaborés par l'une ou l'autre des parties, ou de propos recueillis et diffusés plus ou moins fidèlement par des journalistes à la sortie du “spectacle” et facilement démentis aussitôt si, par hasard, ces propos ne sont pas bien accueillis par l'opinion publique. Les non-débats sur les systèmes de retraites et leur réforme nécessaire illustrent bien ce qui précède.
En ce moment, on commence à entendre parler d'un autre débat qui s'avère nécessaire au sujet de l'expansion horizontale désastreuse d'une population en croissance constante qui cherche de l'espace pour se loger ou exercer ses activités commerciales, industrielles ou de loisirs. Et alors, on déplore la disparition de terres agricoles, l'invasion des franges côtières, l'augmentation des prix des terrains qui chasse les autochtones, etc. Sur une radio anciennement appelée périphérique, j'ai entendu ce mois-ci évoquer, bien timidement, la nécessité de construire des bâtiments de grande hauteur que la France appelait autrefois des gratte-ciel et que l'on appelle aujourd'hui communément des “buildings”. Aussitôt, un écologiste lambda est intervenu pour soutenir que ces bâtiments étaient encore plus dévoreurs d'espace que les constructions horizontales. Donc, beau débat en perspective, qui sera tout aussi bâclé que celui des retraites. Pourtant, mais à la différence des quelques “tours-dortoirs“ à la française ou encore tours, propriétés de lobbies industriels ou de compagnies d'assurances, des tours de très grande hauteur abritant ensemble, logements, bureaux, commerces, petits ateliers artisanaux, cabinets d'avocats, tribunaux, officines ministérielles, avec batteries d'ascenseurs et parkings souterrains appropriés n'apporteraient-elles pas une solution à cette expansion territoriale dévoreuse de terrains et productrice de CO2 du fait des transports automobiles accrus nécessaires ?
Cet article est extrait de la lettre n°36 de Dihunomp !
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