Une salle comble, près d'une heure et demie de débat. Avec deux millions d'entrées, ce film caracole en tête du box office depuis quelques semaines. A Quimperlé, Simone de Bollardière, venue en voisine, commente le film et précise quelles ont été les relations entre le général de Bollardière et la communauté de Thibirine.
Le général et Christian, le responsable du monastère de l'Atlas, se sont rencontrés lors d'une période où leur vie n'était pas en danger, les moines recevaient des personnes en retraite, et leurs liens avec la population étaient très forts. Elle a beaucoup parlé de non violence et des conséquences terribles de la guerre d'Algérie, autant pour les Algériens que pour les soldats qui en sont revenus meurtris. Elle citera l'association d'appelés qui s'est créée pour reverser leur pension afin de reconstruire les villages détruits, de creuser des puits, de payer un car pour emmener les petites filles à l'école, comme un devoir de réparation.
Emmanuell Audrain, documentariste breton de l'île de Groix, est à la naissance de ce film : c'est en lisant en 1996 un article sur l'assassinat des moines qu'il va rencontrer, minutieusement, des membres de la famille des moines, va avoir accès aux lettres et au journal de Christian, il se rendra à Tibhirine, filmera les lieux et en fera un documentaire qu'il a montré en 2007 dans cette même salle de Quimperlé. Il porte un jugement enthousiaste sur le film, car pour lui, Xavier Beauvois a été fidèle à l'histoire des moines, et a respecté la personnalité de chacun des moines à travers le choix des acteurs et le travail mené en amont avec eux (séjour dans un monastère, apprentissage du chant avec un maître de choeur).
Dans la salle, beaucoup de questions, d'interventions : «les prêtres qui sont toujours en Algérie sont très intéressés par le Coran, tout comme l'était le frère Christian». D'autres dénoncent le prolongement du colonialisme dans cette façon d'évangéliser une population. Certains évoquent le fait que trois des moines avaient fait la guerre d'Algérie.
Simone conclut en disant que peut-être, la plus belle réussite des moines est d'avoir fait de Tibhirine un des rares villages algériens où les groupes extrémistes et violents n'ont pas réussi à recruter de jeunes dans leurs formations armées dans les années de troubles qu'ils connaissent. La non violence des moines, à l'écoute du village (qui s'est créé au début à cause de la présence de ce monastère qui assurait une protection aux gens qui venaient y habiter, ainsi que des soins - le frère médecin est admirablement interprété par Mickael Lonsdale) y est sans doute pour quelque chose ...
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