LBDH : Que reste-t-il de l'État de Droit dans l'État français ?

Communiqué de presse publié le 17/08/10 12:40 dans Justice et injustices par Michel Herjean pour Michel Herjean

Le ministre de l'Intérieur vient d'inventer une nouvelle définition dans le Droit français : « Présumé coupable ». Il s'est défendu d'avoir voulu interférer avec la Justice. Pourtant c'est ce qu'il a fait au moment même où l'individu qu'il présentait comme coupable était placé en garde à vue.

C'est à l'inverse des principes du Droit français, selon lequel on est présumé innocent tant que n'a pas été établie la culpabilité. De nombreux textes juridiques font en effet mention du principe de présomption d'innocence, à l'instar de l'article 9 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, de l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ou de l'article 9.1 du code civil. Le ministre de l'Intérieur a violé la loi. Il cherche à se faire juge à la place des juges. Il pourrait être poursuivi pour cela.

C'est aussi ce qui s'était passé avec Yvan Colonna. Le 4 juillet 2003, jour de l'interpellation de l'assassin présumé du préfet de Corse, Nicolas Sarkozy, alors place Beauvau, s'était félicité lors d'une réunion publique de l'arrestation de « l'assassin du préfet Érignac ». C'est aussi ce qui s'était passé au lendemain de l'attentat de Quévert quand la procureure de la section anti-terroriste du parquet de Paris avait désigné des coupables, déclarations reprises par certains médias se rendant ainsi complices de l'atteinte à la présomption d'innocence.

Pour la Ligue Bretonne des droits de l'Homme, la violation de la présomption d'innocence n'est pas un fait nouveau de la part de responsables politiques de l'État Français. Ce qui est inquiétant, c'est que cette fois-ci le terme « présumé coupable » a été réitéré et justifié par le ministre de l'Intérieur. Un pas de plus du dédain de certains responsables politiques français de haut niveau pour l'État de droit.

M. Herjean, LDBH


Vos commentaires :
Per LeMoine
Vendredi 27 septembre 2024
En 1944 la France n'est pas redevenue un Etat de Droit : elle est restee une Republique dictatoriale . Preuve de la «continuite » : le Decret nazi de partition de la Bretagne est toujours en place ..

Pascal Dazin
Vendredi 27 septembre 2024
L'expression «état de droit» ne garantit absolument pas la qualité des relations sociales et politiques entre citoyens. Nous sommes indéniablement dans un état de droit, et plus précisément dans un état de droits (sous-entendus: discriminés et normalisés). Le candidat Sarkozy avait d'ailleurs promis de faire «une grande profession de droit» et ce sera la seule promesse importante (socialement néfaste, selon moi) qu'il tiendra à peu près pour complaire au lobby dont il est issu et dont il a un besoin manifeste.
Nous nous enlisons comme inexorablement, sans véritable résistance active, dans un état de droit qui singe de façon de plus en plus grossière la République telle que nos idéaux la prévoyaient dans la Constitution française. Il est amusant ou navrant (suivant que l'on décide d'avoir la politesse du désespoir chère à Boris Vian ou la sagesse du philosophe)de constater par exemple que l'on jette dans l'arène les gens du voyage, comme un os à ronger, comme une procédure de diversion dans l'arène judiciaire omniprésente, en ces temps où les conflits d'intérets aux plus hauts niveaux sont tellement évidents, et que l'on assiste à l'auto-protection organisée des gens de justice en Bretagne, comme si l'article 1 de la Constitution française pouvait être violé impunément ou réprimé à grands renforts de publicités médiatiques, suivant qu'on est puissant ou misérable...
Je suis étonné que personne ou presque ne dénonce que nous sommes dans un état de moins en moins social, neutre et bienveillant, dans un étouffoir jurocratique, normalisant et réprimant les libertés d'épanouissement (post-colonial et post-miltaire, exactement comme l'aristocratie avait pouvoir et autorité sans faire autorité dans les années 1780...
De De Gaulle à Sarkozy, nous sommes pasés de l'oppression militaire et catholique collaboratrice, à l'oppression judiciaire et psychologique agréée...sans tompber dans la nostalgie, je ne vois aucun progrès, mais juste une transformation des ficelles de la perversité d'un pouvoir tout sauf démocratique...

Paul Chérel
Vendredi 27 septembre 2024
Le vrai problème, à côté duquel passent généralement tous les défenseurs des DROITS de l’homme, même les Bretons donc, c’est que la tendance est toujours de parler et revendiquer des droits sans évoquer les obligations qu’ils impliquent vis-àvis des autres. Il en résulte une frénésie d’élaboration de lois qui sévit dans les assemblées dites nationales où chacun veut mettre son nom sur une proposition ou un amendement, la plupart du temps avec des vues électoralistes. Il est significatif de voir l’assemblée des députés s’être transformée peu à peu en assemblée purement législative. Il n’est pas inutile de rappeler que le petit coup d’Etat de juillet 1789, s’est traduit tout d’abord par un grand désordre, auquel il a fallu remédier successivement par une assemblée constituante, puis législative, puis conventionnelle pour aboutir finalement à directoire (monarchie plurielle) consulat plus restreint et dictature monarchique. L’Etat de droit, ce qui veut dire que l’Etat s’arroge tous les droits, c’est à dire encore que le droit de l’Etat prime sur le droit des collectivités qu’il dirige et des individus qu’il gouverne et manipule à souhait, est une véritable dictature juridique où le bon sens n’a plus cours. En outre, cette “legislativomanie” qui ne sait même pas faire un peu de ménage dans les textes antérieurs, aboutit à une complexité et même à des contradictions qui font la joie, le bonheur et le gagne-pain des avocats. Paul Chérel

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