Depuis l'automne 2008 le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) s'est installé sur le territoire de la communauté urbaine de Brest pour y développer un centre technique d'appui aux régions du monde dans l'élaboration de leur plan climat territorial. Ce centre, dénommé ClimSAT, est une première mondiale; la Bretagne est ainsi devenue le laboratoire de partenariats innovants entre l'ONU et le niveau régional.
Depuis deux ans la construction de ClimSAT s'est faite de façon empirique entre le PNUD, la Région, le Conseil général du Finistère, Brest Métropole Océane et le Technopôle Brest Iroise qui a servi de base d'accueil. Aujourd'hui le temps est venu de sécuriser la structure sur un plan juridique pour lui permettre de consolider ses nombreux partenariats institutionnels mais aussi scientifiques et économiques. Pour ce faire un Groupement d'intérêt public (GIP) devrait se créer d'ici 2011. L'association de préfiguration de ce GIP, dont le Conseil régional a voté les statuts lors de sa séance plénière du 25 juin, sera installée le 9 juillet à Brest. Je voudrais saisir l'occasion de cette installation pour rappeler les circonstances dans lesquelles j'ai pu négocier l'implantation de ClimSAT en Bretagne.
ClimSAT s'est installé à Brest parce que dans le cadre du mandat de préparation du Sommet mondial des Régions sur le changement climatique de Saint-Malo que Jean-Yves Le Drian m'avait confié, j'ai saisi l'opportunité de rencontrer à Genève, en 2007, le bureau Europe du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Cette rencontre m'a également permis d'entrer en contact avec l'association des Bretons qui travaillent pour les Nations Unies, l'association ONU Breizh. Ce sont ces deux rencontres qui ont permis d'identifier le projet qu'avait le PNUD de développer des partenariats avec les régions du monde sur la question climatique en créant avec elles un outil technique destiné à accompagner la création et la mise en oeuvre de Plans Climat Territoriaux Intégrés (PCTI) dans les pays dits en développement ou émergents.
Cette volonté du PNUD partait d'un consta t: 50 à 80% des actions concrètes visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre ou à adapter les territoires aux conséquences du changement climatique sont conduites à un niveau infra-étatique. Ce constat, le secrétaire général des Nations Unies l'a repris à son compte depuis septembre 2009.
Cette démarche à Genève je l'ai faite seul et de ma propre initiative, sans autre élu ni agent administratif. J'en assume donc la paternité.
Je voulais faire ce rappel historique car il souligne deux choses :
- d'abord l'intérêt d'une diplomatie bretonne. J'ose le mot même si cette diplomatie n'en a pas le statut.
Le budget que la Région Bretagne consacre aux relations internationales est faible, à peine 0,3% de ses dépenses. Pourtant certains de nos compatriotes doutent de l'utilité de ces dépenses. L'implantation de ClimSAT en Bretagne est une réponse en soi ;
- second enseignement: tout l'intérêt qu'il y a à mieux structurer nos relations avec la diaspora bretonne.
Cette diaspora, la façon dont elle s'organise et se manifeste est une des expressions de l'existence du peuple breton. La Bretagne doit savoir saisir cette chance que beaucoup de territoires lui envient.
Si ClimSAT s'est installé en Bretagne c'est aussi parce que les collectivités bretonnes en ont compris les enjeux et ont su se montrer réactives : la Région, le conseil général du Finistère et Brest Métropole Océane. J'ai rapidement identifié Brest comme le lieu adéquat pour cette implantation en raison des compétences scientifiques et techniques qui s'y retrouvent dans les domaines de la climatologie, des télécommunications, de l'océanographie et de la biologie. Ma première rencontre avec les responsables de Brest Métropole Océane, pour leur exposer le projet, est intervenue le 11 juin 2008 et dès le mois de septembre Brest accueillait le premier fonctionnaire du PNUD. Marc Labbey, vice-président de la communauté urbaine et président du Technopôle Brest Iroise, a été un acteur décisif au plan local pour permettre la réalisation du projet.
Il faut aussi se réjouir de l'attitude du Ministère des affaires étrangères, et tout particulièrement du délégué général aux coopérations décentralisées, Antoine Joly, qui a été un facilitateur tant politiquement que financièrement dans la phase d'amorçage.
Avec le partenariat inédit du PNUD, ClimSAT offre à la Bretagne une triple opportunité:
1) d'abord développer ses actions de coopération internationale. D'ailleurs ClimSAT a déjà pris l'initiative de contractualiser avec France Volontaires, l'ex-Agence Française des Volontaires du Progrès, pour permettre à de jeunes Bretons en fin d'études de
connaître une première expérience professionnelle dans le cadre des Plans Climat Territoriaux Intégrés (PCTI) que le PNUD accompagne ;
2) la deuxième opportunité que ClimSAT offre à la Bretagne c'est d'aider ses collectivités à élaborer leur PCTI. Or, les deux lois issues du Grenelle de l'Environnement prévoient que toutes les collectivités ou intercommunalités de plus de 50000 habitants devront élaborer un PCTI d'ici 2012. Les responsables onusiens de ClimSAT ont confirmé la disponibilité de la structure pour conseiller les collectivités bretonnes ;
3) la troisième opportunité pour la Bretagne c'est de faire travailler en synergie les formateurs, les chercheurs et les entreprises de différents secteurs d'activité qui ne se connaissent pas toujours: TIC, agriculture, mer, transports, urbanisme. D'ailleurs l'équipe de coordination de ClimSAT s'est déjà attelée à réunir un large tour de table où ces familles d'acteurs sont représentées. Bien entendu, ClimSAT, de par sa vocation internationale, doit être ouvert aux partenariats stratégiques et opérationnels avec des acteurs autres que bretons.
Il faut donc voir dans ClimSAT une sorte de cluster global, du moins en puissance, un cluster global au service d'une internationalisation solidaire et durable de la Bretagne. Les enjeux sont à ce niveau.
Aujourd'hui relégué au Conseil régional dans le rôle d'un opposant constructif, je souhaite que l'exécutif de la Région ait le souci de préserver la dynamique initiale du projet en gardant à l'esprit que sa vocation est de fédérer les compétences et les bonnes volontés, sans exclusive.
Christian GUYONVARC'H
conseiller régional de la Région Bretagne
ancien vice-président chargé des affaires européennes et internationales (2004-2010)
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