Le sage s'interroge : comment des années si courtes se fabriquent-elles avec des journées si longues ? Bien que soumise à la contrainte de durabilité, l'année 2010 ne sera pas plus longue que celles qui l'ont précédée. Peu importe le résultat des élections régionales, il y aura toujours trois sortes de gens : ceux qui courent et demandent des décorations, ceux qui les créent et qui les distribuent, et ceux qui demeurent indifférents à cette pitoyable société du spectacle.
On aurait pourtant apprécié de savoir ce que les candidats proposent pour construire une Bretagne prospère dans une France en déclin. Savoir si ce défi est du domaine du possible. Il s'agit évidemment de sortir de la seule incantation.
La France entraîne la Bretagne dans une spirale infernale du déclin économique. On trouve ici aussi « ces inerties sociologiques et culturelles qui entravent l'adaptation des institutions et des modes de pensée aux conditions nouvelles prévalant dans l'économie mondiale. »(B. Mafféï-N. Amenc)
Les auteurs de « L'impuissance publique : le déclin économique français depuis Napoléon » ajoutent : « les responsables français se satisfont d'une simple extrapolation des tendances passées et se contentent de quelques modifications incrémentales et marginales qui ne remettent pas en cause les intérêts et les positions acquises ».
Il y a près de cinquante ans, le M.O.B (Mouvement pour l'Organisation de la Bretagne) s'était lucidement prononcé pour le fédéralisme. Le mariage du singulier et du pluriel, de l'autonomie et de la solidarité, vaut davantage qu'une simple construction européenne. Il vaut pour notre organisation institutionnelle.
Que d'années perdues pour des chimères ! Que d'occasions manquées, que de blocages ! Que de représentations erronées !
Dans un monde qui produit des relations comme on produit des voitures, qui produit des livres comme on produit un soda, dans cet univers de recyclage conjoncturel, l'inspiration profonde du fédéralisme évite l'arbitraire.
A la mode et aux cycles, il préfère les qualités intrinsèques.
Au Breton de l'année (il y a la voiture de l'année, le livre de l'année) il oppose être Breton toute l'année, tout simplement, sans être livré à l'actualité, sans recherche de postérité.
Il y aura toujours des Bretons qui seront plus bretons que les autres, parce qu'ils ont quelque chose à vendre ou un profit à retirer : on n'a pas de salon de l'automobile mais on a des salons du livre pour sacrifier à la mode de la consommation de la culture ; on a des instituts associatifs pour lesquels dire seulement brezhoneg du bout des lèvres vaut contrepartie pesante en subsides publics : la Région Providence !
Et si le Breton de 2010, c'était en fait la Bretagne elle-même, parce que c'est elle qui doit relever ses propres défis, exorciser ses démons et conjurer ses peurs ?
Bloavezh Mat
Le 31 décembre 2009
Jean-Yves QUIGUER
Président du Mouvement Fédéraliste de Bretagne
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