Désormais incontournable à Rennes, en Bretagne et désormais au Parti Socialiste comme secrétaire nationale auprès de Martine Aubry, Sylvie Robert tisse sa toile et impose une certaine idée de la culture. Une certaine idée de la Bretagne sans doute aussi, pour la vice-présidente du Conseil régional guère inspirée par le possible retour au bercail de la Loire-Atlantique et de Nantes où elle est née.
Malgré le torticolis dont elle souffre, elle accepte notre demande d'entretien avant la première session de l'année 2009 au Conseil régional de Bretagne. Charmante, aux antipodes de la caricatures du milieu breton dont elle souffre, cette élue considérée par certains comme «l'ennemi numéro un de l'emsav» répond à toutes les questions avec le sourire. Sylvie Robert en toute franchise.
Quel est votre état d'esprit au moment d'engager cette session du Conseil régional de Bretagne avec une forte tonalité culturelle ?
Un état d'esprit toujours très serein. On parle de Culture en mars, on en parlera aussi en juin. C'est une question qui revient souvent. Quand il y a des rapports comme aujourd'hui, c'est plus important. Mais, dans une session, il y a toujours un moment où l'on parle Culture.
L'esprit de la Charte culturelle de 1977 est-il mort ?
Je ne pense pas que cet esprit soit mort. Par contre, les outils qui ont prévalu à la mise en oeuvre de ce qui s'est passé en 1977 ont besoin d'être mis au goût du jour, adaptés au XXIe siècle, actualisés. C'est tout simplement ça. Je crois surtout à cette idée d'une Bretagne singulière, spécifique, à l'identité plurielle avec sa maritimité, son armor et son argoat, ses métropoles. C'est une terre un peu particulière, singulière en matière culturelle aussi. Tout cela est constitutif de l'identité de notre région.
La mise en place du nouveau Conseil culturel de Bretagne sera l'un des gros morceaux de cette session.
La création de ce Conseil s'inscrit dans la réaffirmation de cette identité, pour la reconnaître avec toutes ses spécificités, sa pluralité et tous ses acteurs. Il y en a beaucoup, et encore de 1977, une période très importante pour notre région et pour la revendication de son identité. Cette identité est maintenant devenue naturelle. C'est une forme de reconnaissance. Un Conseil culturel pour marquer son rayonnement. Car la Bretagne rayonne. La création de ce Conseil culturel avec le Conseil économique et social à côté de la Région Bretagne est un acte très important qu'il faut saluer.
Qui sera membre de ce Conseil culturel de Bretagne new look ?
Il sera composé de trois collèges, l'un avec des personnes morales et publiques, on va dire associatives, avec des sous-collèges, le second avec des experts et le troisième avec des personnes qui seront nommées par arrêté du Président et emblématiques. Ces dernières participent de l'identité de cette région, dans les domaines de la littérature comme de la danse ou de l'histoire. Christian Guyonvarc'h en parlait, cela peut être des gens qui n'habitent pas obligatoirement en Bretagne, mais qui portent son image et contribuent à son rayonnement.
Qui présidera ce Conseil culturel, vous-même ou Jean-Yves Le Drian ?
Absolument pas. Un président sera nommé...
Et ce serait ?
Ah, ah ! Je ne sais pas encore, je ne peux vous le dire.
Quand ce Conseil entrera-t-il en vigueur ?
Nous allons passer le rapport aujourd'hui. Ensuite, il faudra mettre en oeuvre sa composition et donc demander aux personnes susceptibles d'en être parties prenantes si elles acceptent ou non. Tout cela se fera très rapidement, dès la semaine prochaine. Je ne peux pas vous dire officiellement quand, je laisse le soin au Président Le Drian de le faire. Après ce rapport, il y a tout un travail de mise en oeuvre assez lourd.
Cela signifie que vous allez couper les vivres de l'Institut culturel de Bretagne ou de l'actuel Conseil culturel ?
C'étaient des outils nés de cette période de 1977. Après s'ils veulent continuer à vivre...
Sans subvention, sans salarié ?
On verra. En tout cas, nous on crée de façon importante et officielle ce nouvel outil.
Au départ, est-ce votre idée ou celle de Jean-Yves Le Drian ?
Je pense que c'est Jean-Yves qui a eu l'idée en premier.
Vous pensez ou vous en êtes sûre ?
J'en suis sûre. Vous savez, ça vient dans des discussions, des réunions de travail. Donnons à Jean-Yves Le Drian cette paternité-là.
Sujet d'actualité, comme vous êtes née à Nantes.
Oui, je suis née à Nantes.
Vous avez lu dans Ouest France les derniers résultats du sondage du CNRS sur la Loire-Atlantique en Bretagne. Ils donnent une majorité 51 % de personnes favorables au rattachement de ce département à la région Bretagne, 28 % contre et 20 % de sans opinion. Que cela vous évoque-t-il ?
Je suis assez étonnée, car on a vu ce sondage, et il y a quelques temps un autre qui disait le contraire. Je ne sais pas qui ...
Ce dernier sondage est assez conforme à ceux qui donnent une large majorité pour la Bretagne à cinq. Si vous aviez dû répondre par oui, non ou ne sais pas à cette question, qu'auriez-vous choisi ?
Moi, je suis nantaise effectivement. Je suis arrivée à Rennes et puis j'ai une mère quimpéroise. Je suis un peu un mélange. Je dirais que ce n'est pas obligatoirement une revendication que j'ai naturellement. Je l'ai dit.
Parfaitement. Il faut être claire.
Par contre, qu'est-ce qu'on fait à Rennes ? Des relations avec Nantes ou au niveau de la région lorsque je crée un EPCC sur les cinq départements comme avec Livres et lecture. Je suis plus pour les coopérations à entretenir, pour mettre du lien et tisser des relations que de prôner comme ça de facto la réunification de la Bretagne.
Alors, vous choisissez : oui, non ou ne sait pas ?
Je suis obligée de vous répondre ? (dit-elle avec le sourire)
Vous n'êtes pas obligée. On ne va pas vous torturer.
Pfff... écoutez, pour moi, ce n'est pas vraiment une question aujourd'hui qui est la plus importante dans le contexte dans lequel on vit. Voilà.
Un mot sur le forum de Libération de la semaine passée où vous êtes intervenue à propos de conceptions de la culture. Y a-t-il une culture de droite et une culture de gauche ?
Je ne le pense pas. Par contre, je pense qu'il y a une vision culturelle de droite et une vision culturelle de gauche. C'est ce que j'ai essayé d'expliquer. Je pense que la culture est intimement liée à la façon dont on conçoit un projet de communauté avec des valeurs très fortes. Cela participe aussi de politiques différentes.
Comme nous parlons de droite et de gauche, vous avez pris récemment du galon au Parti Socialiste en devenant secrétaire nationale de la Culture. En quoi cela consiste-t-il ?
C'est récent. Après le congrès de Reims, Martine Aubry m'a demandé d'être dans son équipe en qualité de secrétaire nationale. Il s'agit simplement d'être en veille. Je suis forcément avec beaucoup d'acuité tout ce qui se passe au niveau gouvernemental. C'est aussi élaborer, construire une politique et un discours au niveau du parti socialiste, travailler, réfléchir, renouer avec beaucoup d'acteurs, s'entourer d'intellectuels et d'experts. Je me déplace et vois beaucoup de gens.
Bon. Et quelle est l'ambiance au Parti Socialiste actuellement ?
Une ambiance de travail.
Peut-être vous verra-t-on un jour rue de Valois, ministre de la Culture ?
Écoutez, vraiment, je ne pense pas pour l'instant à ce... Je ne pense pas du tout à cela. J'ai énormément de travail avec mes mandats et ces nouvelles fonctions. L'actualité est plus là plutôt que de penser (elle lève les yeux au ciel) un jour à ce que vous dites.
Propos recueillis par Ronan Le Flécher, à Rennes le 27 mars 2009
■On ne peut pas dire que la «nouvelle» génération bretonne du PS soit pro-Bretagne avec Benoît Hamon, Sylvie Robert, Claudy Lebreton associé avec les caciques que sont Ayrault, Delaveau et Lebranchu. Cela fait froid dans le dos....