Soutien aux six jeunes Nantais inculpés pour leur action pro-réunification de la Bretagne et lettr

A l'appui de son soutien aux six jeunes Nantais inculpés pour leur action pro-réunification, Bretons du monde-OBE vous prie de bien vouloir prendre connaissance du texte ci-dessous de la Lettre ouverte envoyée le 9 février par son président d'honneur Marcel Texier à Monsieur Jacques Auxiette, président de la Région «Pays de la Loire», au sujet des poursuites en cours contre ces six jeunes Nantais.

Pour le Bureau de BdM-OBE, le Président Pêr Le Roux.

Lettre ouverte de Marcel Texier Président d'honneur de Bretons du monde-OBE, Organisation des Bretons de l'Extérieur.
Lettre ouverte à Monsieur Jacques Auxiette,
Président de la Région «Pays de la Loire»
44966 Nantes Cedex 16

Le 9 février 2009

“Monsieur le Président,

“L'organisation «Bretons du monde-OBE» (voir le site) , qui regroupe des associations de Bretons réparties sur les cinq continents, et dont je suis Président d'honneur, se doit d'intervenir en faveur des six jeunes Nantais poursuivis, suite à la plainte de la «Région Pays de la Loire», pour avoir protesté contre les atteintes à l'identité bretonne en Loire-Atlantique par des inscriptions en faveur de la réunification de la Bretagne apposées sur du matériel «Pays de la Loire».

“Nous entendons bien que vous ne pouvez être tenu pour responsable du découpage aberrant qui place Nantes et son département en dehors de la Bretagne administrative. Nous voulons bien encore admettre que lesdits «Pays de la Loire» ne sont pas le résultat direct du décret Pétain-Darlan du 30 juin 1941.

“Il n'en reste pas moins que ces très artificiels «Pays de la Loire», apparus en 1956 avec les Régions de programme officialisées ensuite en 1972, sont perçus comme un héritage du découpage de Vichy, héritage qui en est pour ainsi dire la préhistoire.

Ainsi, un de nos anciens membres, alors Président de l'Association des Bretons du Royaume-Uni, Charles Guillois, lecteur de l'Appel du Général de Gaulle en breton, et Président également des Anciens des Forces Navales Françaises Libres, qualifiait-il ces «Pays de la Loire» de «punition de Pétain», ce dernier étant furieux, pensait-il, de voir tant de Bretons rejoindre les Français Libres. Le plus furieux, à notre avis, était probablement l'amiral Darlan qui nourrissait une haine profonde contre les Anglais. Charles Guillois est maintenant décédé, mais lui et ses camarades étaient très amers de voir perdurer ce qu'ils ressentaient comme une blessure.

“Les historiens infirmeront ou confirmeront peut-être un jour cette volonté de «punir les Bretons», mais un texte troublant, découvert dans le fonds d'archives Henri Fréville par un de mes anciens élèves à l'ENSAM (Ecole Nationale Supérieure d'Arts et Métiers) de Paris, laisse apparaître, chez les gouvernants collaborationnistes de l'époque, une autre motivation, encore plus inavouable, celle de complaire aux Occupants.

“En effet, le tracé des Kommandantur régionales rattachait Nantes, considérée sans doute comme un foyer potentiel de troubles du fait de sa tradition anarcho-syndicaliste, à la province d'Angers, plus rurale et censée être plus calme. Le siège de la Gestapo pour l'Ouest de la France avait été, pour cette raison semble-t-il, situé à Angers. Le texte ci-après met indirectement en lumière la veulerie des gouvernants français de l'époque. Il émane de l'Obergruppenführer (général SS) Werner Best, responsable de l'administration civile de l'Ouest de la France, personnage qui poursuivit ensuite une «brillante» carrière au Danemark, comme organisateur, dans ce pays, de la déportation des Juifs vers les camps de la mort :«C'est à cette époque que le gouvernement français procéda à une réforme de l'organisation administrative créant des régions comprenant plusieurs départements, avec à la tête de leur administration des »préfets régionaux«. Avant que cette organisation ne reçoive notre aval pour la zone occupée, il nous fallut examiner ce qu'elle impliquait pour les intérêts de l'Occupation ainsi que pour ceux des territoires occupés.» (52 J 158 Fonds Henri Fréville – Werner Best)

“Il fallait donc l'aval de ce Monsieur pour créer cette fameuse Région ! Il n'est pas indifférent de savoir que Werner Best fut condamné à mort par un tribunal danois en 1948, peine commuée en douze ans de prison en 1951 et qu'il est mort, après avoir été très actif dans les associations d'entraide à ses camarades SS, en 1989.

“Encore une fois, monsieur le président, vous n'êtes pour rien dans cette «préhistoire» d'une «Région» née sous de bien vilains auspices et portée sur les fonds baptismaux par des parrains peu reluisants. Mais, comme la tache de sang sur la petite main de Lady Macbeth, cette souillure originelle ne veut pas, ne peut pas disparaître.

“Il y a autre chose qui ne veut pas et ne peut pas disparaître, et de cela nous ne pouvons que nous réjouir, c'est mille ans d'histoire de la Bretagne. Cette histoire, elle est là, et elle est incroyablement prégnante, malgré les efforts déployés depuis des décennies pour la faire oublier et donner de la consistance à des «Pays de la Loire» qui, décidément, n'en ont aucune et n'en auront jamais. Leur création fut une erreur et, pour certains, une faute. Il est urgent que cette page soit tournée de manière définitive.

“Le droit des gens à vivre dans la vérité, à vivre leur identité dans la sérénité et en harmonie avec les autres identités, ce n'est pas rien. Ce droit pèse infiniment plus que les petits calculs politiciens, infiniment plus que les prétendus intérêts économiques à court terme.

“Les jeunes Nantais qui ont revendiqué ce droit l'ont peut-être fait maladroitement, mais la cause qu'ils défendent est éminemment juste. Ils se sont dressés contre une insulte à la démocratie (jamais les populations concernées n'ont été consultées), une insulte à l'histoire, une insulte au bon sens. Reconnaître cet état de fait et en tirer les conséquences, serait, de votre part, faire preuve d'honnêteté intellectuelle et une marque d'élégance.

“Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'expression de mes sentiments distingués.

Marcel Texier, agrégé d'anglais hors-classe et ancien professeur à l'ENSAM de Paris
Président d'honneur de Bretons du Monde-OBE
(voir le site)