Avec la reconnaissance l'an dernier des langues régionales dans la Constitution, auparavant la promulgation de la Charte des Droits fondamentaux de l'Union européenne, la signature du Traité de Lisbonne, nous avions la candeur d'espérer que l'État aurait fait passer, non seulement le message, mais l'ordre de respecter une bonne fois pour toutes les différentes langues de son territoire.
Mais non, rien n'a changé ! Avec M. Yves Amiard – directeur du courrier à la Poste pour l'Ouest Bretagne – la répression continue. La raison évoquée ? Purement technique. En effet, le système de lecture optique de ses services appréhende mal les apostrophes. Toutes les apostrophes ? Non. Seulement quand elles sont bretonnes. Le système serait ainsi capable de distinguer le L', le D' et le C' quand ils sont français… mais incapable de lire le C'H breton ?
« Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France »… un effet d'annonce de plus ?
De ce fait, la Poste explique aux Bretons le retard de courrier du fait de l'orthographe de leur langue : ils n'ont qu'à s'en prendre à eux-mêmes ! Et elle pousse encore plus loin sa volonté discriminatoire - illégale - puisqu'elle invite à ne plus donner de nom breton aux rues (avec ou sans apostrophe) mais à corriger les orthographes, à traduire le nom des lieux-dits, à privilégier les noms français… Comme si on en n'avait pas encore assez avec le maire de Plouguerneau !
Et la liste des services publics d'État, cette dichotomie répressive illégale mais impunie, ne s'arrête pas là : rappelons les refus des recteurs d'académie concernant l'ouverture de classes bilingues ou autres classes Diwan ; avec l'attitude de la CAF quant à l'aide aux crèches bilingues ; le refus du bilinguisme dans les gares, sur nos routes : la liste est longue et non limitative.
Cet appel grossier à la discrimination va même à l'encontre de l'article 75-1 de la Constitution française. Mais on peut saisir la Halde ? - Haute Autorité de Lutte Contre Les Discriminations et pour l'Égalité - oui, bien sûr et si nous étions juifs ou musulmans, nous aurions quelque chance que la plainte soit examinée. Nous en avons déjà fait l'expérience. Mais hélas, nous ne sommes seulement que des Bretons et les Bretons selon le code officiel, ça n'existe pas. Il n'y a qu'un seul peuple, le peuple français. Que pas une tête ne dépasse ! Que pas une lettre ne dévie face à la lecture optique discriminatoire ! À moins que la concurrence européenne n'oblige avant peu les services français à respecter une éthique admise dans l'Europe des 27 pays, sauf en Grèce et en France ! Le mauvais feuilleton continue : «Comment éradiquer une langue vieille de plus de 1000 ans ? ». Aujourd'hui les lieux-dits, demain les patronymes ? Après-demain…
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