Des prix littéraires prestigieux pour des Bretons ?

Présentation de livre publié le 8/10/08 12:38 dans Cultures par Bernard Le Nail pour ABP
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Dans quelques heures, l'Académie suédoise proclamera à Stockholm le nom de l'écrivain choisi cette année pour recevoir le Prix Nobel de littérature le 10 décembre prochain. Ce prix, le plus prestigieux de la planète, est d'un montant de près d'un million d'euros. Il a été fondé en 1901 par le chimiste suédois Alfred Nobel pour "récompenser un auteur ayant élaboré une œuvre littéraire faisant la démonstration d'une impressionnante force idéaliste", ce qui est en fait un objectif assez vague.

Aucun écrivain breton n'a encore reçu le Prix Nobel de littérature, même si, dans les années 1960, certains avaient commencé un travail de 'lobbying' en faveur de Roparz Hemon et de son œuvre, en s'appuyant sur le fait que Frédéric Mistral avait été choisi pour une œuvre écrite essentiellement en occitat (provençal) et que ce prix avait aussi été donné à des auteurs écrivant dans des langues de diffusion très restreinte comme l'islandais, alors parlé par moins de 300 000 personnes...

Cette année, il se pourrait bien que le Prix Nobel de littérature soit décerné à un grand écrivain d'origine bretonne, Jean Marie Gustave Le Clézio. On parle beaucoup de lui en tous cas comme étant un des lauréats possibles...

Né à Nice le 13 avril 1940, JMG Le Clézio est le fils d'une Bretonne et d'un médecin britannique qui était lui-même le descendant d'un Breton parti avec son épouse s'installer en 1793 dans l'Île de France, devenue île Maurice après être passée quelques années plus tard sous autorité britannique. JMG Le Clézio qui écrit depuis l'âge de sept ans, est vraiment l'homme de deux langues et de deux cultures, la française et l'anglaise, même si, comme il l'a écrit "Le français est peut-être mon seul véritable pays". Grand voyageur, il a notamment vécu à Maurice, en France, en Angleterre, au Mexique, au Maroc, en Thaïlande, au Panama et, depuis 1975, il a pour épouse Jemia, une Sarahouie. JMG Le Clézio est aussi très attaché à ses origines bretonnes et l'a exprimé avec force à maintes occasions.

Personnage assez secret, fuyant les mondanités et n'appartenant à aucune 'école' ou coterie, JMG Le Clezio a composé, avec une belle régularité, une œuvre qui compte déjà quarante titres et qui a été traduite dans de nombreuses langues : allemand, chinois, danois, espagnol, grec, hébreu, italien, japonais, portugais, russe, suédois, turc, etc. Nombre de ses livres abordent des thèmes vraiment universels. Son choix ferait sûrement honneur à la littérature française, mais aussi à la Bretagne.

Au niveau de la France, le prix littéraire le plus prestigieux est certainement le Prix Goncourt, même s'il n'est doté que d'un montant dérisoire : 7,50 euros ! Neuf écrivains bretons ou proches de la Bretagne, à un titre ou à un autre, l'ont reçu depuis sa création en 1903 :

- en 1903, John-Antoine Nau pour "Force ennemie"

- en 1911, Alphonse de Châteaubriant pour "Monsieur de Lourdines"

- en 1912, André Savignon pour "Les Filles de la pluie"

- en 1913, Marc Elder pour "Le Peuple de la mer"

- en 1934, Roger Vercel pour "Capitaine Conan"

- en 1951, Julien Gracq (qui refusa de le recevoir) pour "Le Rivage des Syrtes"

- en 1985, Yann Queffélec pour "Les Noces barbares"

- en 1988, Érik Orsenna pour "L'Exposition coloniale"

- en 1990, Jean Rouaud pour "Les Champs d'honneur"

Il se pourrait bien que, cette année, le lauréat du Prix Goncourt soit à nouveau un Breton car "La Beauté du monde", le dernier roman de Michel Le Bris, fait partie de la dernière sélection du jury Goncourt, en lice avec huit autres romans. La prochaine sélection sera connue le 5 novembre et le nom du lauréat sera proclamé le 10 novembre.

"La Beauté du monde" est de l'avis de tous ceux qui l'ont déjà lu, un roman d'une rare intensité, peut-être le meilleur de tous les livres qu'a écrits à ce jour Michel Le Bris, dont l'œuvre est déjà considérable. On retrouve dans ce roman foisonnant et mené à un rythme endiablé, beaucoup de thèmes qui sont chers à l'auteur, né à Plougasnou en 1944 : le voyage vers des îles lointaines, l'aventure exotique, l'Afrique des grands espaces, les arts primitifs (masques africains, sculptures polynésiennes, le jazz, le cinéma, la révolte de la jeunesse contre l'ordre établi, New-York et l'Amérique des années folles... Michel Le Bris fait revivre les aventures des Johnson, pionniers du film documentaire animalier, au moment de la Première guerre mondiale. La jeune et belle Osa qui a quitté son Kansas natal à l'âge de 16 ans, part avec l'intrépide Martin Johnson, ami de Jack London, pour les mers du Sud, afin de rapporter la matière de documentaires sur les réducteurs de têtes des Nouvelles-Hébrides et les Big Nambas de Malekula, puis pour le Kénya afin de filmer la faune sauvage africaine chez les Masaïs et les Kikouyous.

Lorsqu'ils reviennent après trois ans d'absence, le monde a bien changé : la guerre dans laquelle se sont engagés les États-Unis en 1917, a pris fin; une terrible révolution a éclaté en Russie; on découvre les œuvres d'un certain docteur Freud; le cinéma, nouvel art balbutiant avant leur départ, connaît un développement rapide; l'Amérique qu'ils avaient quittée, n'existe plus; la jeunesse a pris le pouvoir au sortir de la guerre; le jazz est en train de naître dans un quartier de New-York dénommé Harlem, en particulier avec un certain Duke Ellington; la jungle new-yorkaise apparaît plus dangereuse que l'enfer vert de Bornéo.

Ce roman qui est manifestement le fruit de longues recherches sur cette période des 'années folles' (les 'roaring twenties'), doit aussi beaucoup au propre parcours de Michel Le Bris et, au delà du temps et de l'espace, il rejoint l'intérêt passionné qu'il porte à l'Amérique, aux voyages et à l'aventure, qu'il s'agisse de la vie et de l'œuvre de Robert Louis Stevenson, des chercheurs d'or et des pirates.


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Dimanche 5 mai 2024

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