En décembre 2007, l'Agence Bretagne Presse avait annoncé la future parution d'un livre de Michel Moisan sur l'incroyable développement de la production laitière en Bretagne au cours des 50 dernières années. Voir (voir notre article).
Ce livre, très attendu, sort enfin des presses cette semaine et il sera présenté jeudi prochain à Carhaix aux professionnels du lait de toute la Bretagne occidentale, puis, le lundi 30 juin, à Rennes aux professionnels de la Bretagne orientale. Ce livre de 448 pages illustrées est édité par Coop Breizh et sera mis en vente en librairie prochainement. Il a été préfacé par Pierre Méhaignerie, député-maire de Vitré et ancien ministre de l'agriculture, et il a aussi bénéficié d'une conclusion de Jean Le Vourc'h, qui a été pendant 23 ans le président du groupe Even.
En Bretagne, en 1950 - il faut le rappeler - la production de lait était bien loin d'avoir atteint l'importance qui est la sienne aujourd'hui (on parle maintenant d'un véritable «fleuve de lait») et les activités de transformation restaient bien modestes. Il n'y avait pour ainsi dire pas d'industrie laitière, sauf en Ille-et-Vilaine et en Loire-Atlantique, où les entreprises existantes étaient d'ailleurs de taille modeste, et le beurre produit dans la péninsule était essentiellement du beurre fermier qui n'avait pas très bonne réputation à l'extérieur (à Paris avant-guerre, certains grands restaurants garantissaient ainsi sur leur carte qu'ils n'utilisaient pas de beurre breton dans leur cuisine).
Aujourd'hui, l'industrie laitière bretonne est devenue une industrie puissante, une des plus performantes d'Europe, dont le développement a accompagné et soutenu l'explosion de la production laitière. Pourquoi, à partir de 1950, ces paysans bretons qu'on disait volontiers attardés, ont-ils soudainement fait preuve d'un tel dynamisme, au point que la Bretagne soit devenue un des principaux bassins laitiers européens ? Pourquoi cette révolution s'est-elle passée en Bretagne, 50 ans après celles du Danemark, des Pays-Bas et, pour ce qui concerne la France, celles des Charentes, de la Normandie et de la Lorraine ?
Avec la collaboration de ses amis de l'ABRIL, une association d'anciens dirigeants et cadres de l'industrie laitière bretonne, Michel Moisan a voulu répondre à ces questions.
Il explique dans son livre la naissance de la révolution culturelle qui, au sortir de la guerre, s'est emparée de la jeunesse rurale, l'amenant à remettre radicalement en cause les méthodes traditionnelles de production ; ceci aboutira à cette explosion de la production, entraînant ainsi la naissance de cette industrie laitière que nous connaissons aujourd'hui. L'auteur montre, avec de nombreux tableaux de chiffres et de nombreux graphiques, comment les exploitations agricoles sont passées d'un système de polyculture-élevage, plus ou moins autarcique, à des ateliers spécialisés hautement compétitifs.
Il décrit aussi les étapes de la création de ces grandes usines laitières qui, adoptant les technologies de pointe, occupent maintenant les premières places en France pour la production de beurre et d'emmental et qui réalisent 20 % des exportations françaises de produits laitiers. Son livre raconte également les bouleversements que cette évolution accélérée a provoqués dans les campagnes, ainsi que les importantes restructurations qui s'en sont suivies dans l'industrie ; les pressions de la grande distribution, les quotas laitiers et la mondialisation des marchés sont les derniers défis, mais non les moindres, auxquels producteurs et industriels ont dû faire face.
Michel Moisan est fils d'une famille d'agriculteurs de la région de Loudéac qui ont joué un grand rôle dans la modernisation de l'agriculture. Diplômé de l'École de laiterie de Nancy, il a pris, fin 1971, la direction du laboratoire inter-professionnel de l'URCIL à Carhaix, chargé d'analyser pour le paiement les livraisons de lait des producteurs des trois départements de la pointe bretonne. Énorme laboratoire qui compta un moment plus de 60 000 producteurs. Il innova en mettant au point un système de vérification des résultats par informatique, et des méthodes pour réaliser en grandes séries de nouvelles analyses (butyriques, lipolyse). Fort de cette expérience, en 1984, Michel Moisan fut nommé au Centre National Inter-professionnel de l'Économie Laitière (CNIEL), chef du service assistance et harmonisation des 37 laboratoires interprofessionnels laitiers fonctionnant alors en France.
Il faut aussi signaler que Michel Moisan a été pendant des années l'adjoint à la culture du maire de Carhaix et que c'est lui en particulier qui a porté le projet du futur centre culturel (auquel a été donné le nom du barde Glenmor). Il est le frère de Victor Moisan, resté agriculteur dans la région de Loudéac, qui a joué, lui, un rôle de premier plan dans la révolution fourragère bretonne et dans les organisations agricoles des Côtes-d'Armor. Michel Moisan est par ailleurs le père du professeur Jean-Paul Moisan, qui est un des meilleurs spécialistes français et européens des empreintes génétiques et qui a fondé en 2003 à Nantes l'Institut Génétique Nantes Atlantique. Il se bat pour faire de Nantes un pôle majeur de biotechnologies en Europe.
Voir (voir notre article) pour la présentation du livre à Carhaix.
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